Publié il y a 12 ans - Mise à jour le 23.11.2011 - stephanie-marin - 3 min  - vu 114 fois

AFFAIRE AGNÈS : ROBERT GELLI, PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE DE NÎMES, POUR UNE "ÉVALUATION DE DANGEROSITÉ" SUR MESURE

Au lendemain de son rendez-vous avec Michel Mercier, ministre de la Justice, Robert Gelli, procureur de la République de Nîmes revient sur l'affaire Agnès Marin, jeune fille "tuée et violée" mercredi dernier à Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire). Rencontre.

Le lycéen âgé de 17 ans, originaire de Nages-et-Solorgues (Gard), présumé meurtrier de la petite Agnès, avait déjà été mis en examen à Nîmes pour "viol sur mineur de moins de 15 ans" en août 2010. Après quatre mois de détention provisoire, il avait été libéré et placé sous contrôle judiciaire. Représentait-il un danger ?

Robert Gelli : "Les expertises psychiatriques et psychologiques ne faisaient pas apparaître de pathologie particulière. Ces éléments étaient favorables à la réinsertion du garçon. De plus, et c'est assez rare dans un dossier concernant un mineur, les parents du jeune homme étaient dévoués et s'étaient fortement mobilisés pour qu'il ne reste pas en prison et pour qu'il soit de nouveau scolarisé."

A la sortie de sa détention, comment était suivi le présumé meurtrier d'Agnès ?

R.G : "La Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) était en charge de rédiger régulièrement un rapport sur le suivi des obligations du contrôle judiciaire soit : intégrer un internat, être soumis à un suivi médical et ne plus se rendre dans le Gard. À ce propos, je lis un peu de tout dans la presse. Alors oui, le jeune homme était bien revenu dans le Gard mais avec l'autorisation du juge pour qu'il puisse rendre visite à ses parents qui entre temps, avaient déménagé dans une autre commune du département, loin de là où les faits s'étaient passés. D'ailleurs, il y a peu de temps, la victime a été interrogée par le juge d'instruction qui lui a demandé si son agresseur avait pris ou tenté de prendre contact avec elle. Sa réponse a été non."

Le juge d'instruction a-t-il été informé des deux exclusions d'une semaine du lycéen ?

R.G : "Non. Les éducateurs de la Protection judiciaire de la jeunesse auraient dû le faire mais encore aurait-il fallu qu'ils aient été tenus au courant par la direction du collège-lycée."

Peut-on croire que la direction de l'établissement cévenol n'était pas au courant du passé judiciaire du lycéen ?

R.G : "L'équipe de la Protection judiciaire de la jeunesse a rencontré la direction du collège-lycée en mars 2011. Il est vrai que révéler le contenu judiciaire est une infraction, surtout lorsqu'il s'agit d'un mineur et que de surcroît l'affaire est en cours. Je ne sais pas ce que le directeur de l'établissement et l'éducateur de la Protection judiciaire de la jeunesse se sont dit mais le procureur de la République de Clermont-Ferrand a dit que l'établissement savait. Je pense que nous avons toutes les bonnes raisons de le croire.

Enfin, hier, Luc Chatel (ministre de l'Education nationale) a présenté la lettre écrite par les parents du jeune homme à la direction de l'établissement, avant même l'inscription de leur enfant. Il est écrit que "le garçon était en prison pour des faits graves" qui les stupéfiaient. Il me semble que lorsqu'on reçoit les parents et l'enfant quelque temps après, on a envie d'en savoir un peu plus."

Que pensez-vous des mesures du projet de loi concernant "l'évaluation de la dangerosité" des délinquants, qui sera présenté demain au Conseil des ministres ?

R.G : "Deux solutions possibles. Soit tout le monde subi le même sort et on enferme tout le monde sans suivi. Et là, à mon sens, on aura plus de récidives. Soit on pense à une évaluation de dangerosité et un traitement de peine sur mesure, c'est-à dire au cas par cas. En prenant en compte un facteur risque. Il peut y avoir des récidives, le risque zéro n'existe pas. Mais on peut s'en approcher en se dotant d'outils d'évaluation comme des éducateurs, des psychologues, des psychiatres et autres médecins, des enseignants. Je pense que nous devons travailler sur ça."

Mais faut-il un réel partage du secret professionnel entre la Justice et l’Éducation nationale ?

R.G : "Quelle va-t-être la conséquence si on dévoile aux chefs d'établissement le passé judiciaire d'un élève ? La quasi-totalité n'en voudront pas. Et si un accepte et qu'il se trouve en situation de récidive, c'est ce même chef d'établissement qui va porter le chapeau. C'est pour cela que je pense que la direction du collège de Chambon-sur-Lignon qui demande le secret professionnel partagé doit être prudente et réservée sur ce point.

Je pense qu'il devrait y avoir en quelque sorte un contact informel qui pourrait révéler quelques informations afin que les chefs d'établissement puissent porter une attention particulière à l'élève en question tout en pouvant se préserver. Car aujourd'hui, on cherche à tout prix un coupable, mais il ne faut tout de même pas oublier que c'est ce jeune lycéen qui est responsable de sa propre récidive."

 

Stéphanie Marin

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