Publié il y a 12 ans - Mise à jour le 13.01.2012 - stephanie-marin - 5 min  - vu 867 fois

SABINE, LA MÈRE DE FABIEN VIGNE : "LE COUTEAU NE DOIT PLUS ÊTRE UN OBJET BANAL"

En 2009, Fabien Vigne, 19 ans, décède des suites d'une agression au couteau lors d'une fête votive à Montarnaud. Depuis, Sabine, sa mère, se bat pour lutter contre la banalisation du port de couteau.

Quatre jours de procès, le verdict est tombé. David Prodhomme, 21 ans, est condamné à 20 ans de réclusion assorti d'une peine de sûreté de 13 ans, pour le meurtre de Fabien Vigne, lors de la fête votive de Montarnaud (Hérault) en 2009. Ça y est, c'est fini. Trois ans après les faits, le rideau tombe. Le jeune homme dans le box, les yeux baissés, celui qui ne se souvient plus, et qui finalement avoue avoir juste "voulu piquer" Fabien pour "lui faire peur", celui qui pour un mauvais regard "dégaine" un couteau comme si la vie était un Western, celui-là a été condamné. La mort de Fabien n'est plus impunie. Oui mais la peine de la famille de Fabien, qu'en fait-on ? A-t-elle disparu à l'annonce du verdict ? Bien sûr que non. "David a pris 20 ans. C'est une peine qui semble juste. Mais nous, ses parents, sa famille, ses amis, nous avons pris à perpétuité. J'avais avec Fabien une relation très fusionnelle, tout comme avec sa sœur. Nos vies ne seront plus les mêmes." raconte Sabine Vigne, la mère de Fabien, au lendemain d'un procès que l'on imagine très éprouvant.

Éprouvant et pourtant. La mère de Fabien et présidente de l'association Vies sacrées, poursuit son combat contre la violence et la banalisation du port de couteau. "Je m'adresse régulièrement au ministère de la Justice et de l'Intérieur et je peux vous dire que l'on ne se sent pas forcément écouter. Mais des rumeurs courent sur des "choses" qui devraient être mises en place pour améliorer la réglementation. Mais quoi ? On ne sait pas, il y a tellement de "choses" à faire. On ne met pas assez de moyens pour lutter contre la violence." lance Sabine Vigne qui pointe un doigt accusateur vers les jeunes qui achètent ces armes et sur leurs parents qui ne s'en inquiètent pas.

"Les fautifs sont aussi ces buralistes qui vendent des couteaux aux jeunes sans vérifier leur identité. Il y a deux ans, j'ai vu un mineur acheté un couteau pour faire un cadeau à son papa. Il était tout seul. Le buraliste n'a même pas réfléchi et lui a vendu sans poser de questions." Cette expérience, Objectif Gard, l'a faite aussi dans un bureau de tabac à Nîmes. Résultat, les propos de Sabine Vigne ont été confirmés. "Et puis, il y a ces stands dans les marchés de Noël où les enfants sont confrontés aux couteaux, qui peuvent être utilisés comme une arme. Il faut que ça change, le couteau ne doit plus être un objet banal. Je ne veux plus revivre ce que j'ai vécu."

Alors, la maman et présidente de Vies Sacrées propose une nouvelle réglementation qui donnera, à coup sûr,  matière à réflexion aux décideurs français : "Les couteaux devraient être vendus exclusivement chez les armuriers. Et, à chaque vente, l'armurier devra demander une pièce d'identité et un casier judiciaire. Ça n'empêchera pas tous les excès de violence et les accidents volontaires ou non, mais je suis persuadée que ça peut aider." Un travail de prévention auprès des jeunes est aussi nécessaire. Et là encore, c'est l'association Vies Sacrées qui s'en charge en menant de nombreuses actions car par exemple l'opération de distribution des bracelets "Je fais la fête sans arme". "On parlait un temps de supprimer les fêtes votives. Ce n'est pas ce que nous voulons. Fabien adorait ces fêtes et il n'aurait pas aimé que l'on y touche. Non, ce sont aux jeunes d'agir, ils doivent retrouver les valeurs que l'on avait autrefois." Le message est passé, il n'a plus qu'à faire boule de neige.

Ce qu'en dit l'armurier

Un armurier de Nîmes qui a tenu à témoigner sous couvert d'anonymat, affirme préférer perdre des ventes plutôt que de satisfaire un client "étrange". "Les mineurs, je ne les laisse même pas entrer dans ma boutique. Pour les majeurs, je leur demande leur pièce d'identité. Si je vois qu'il y a quelque chose de louche chez la personne, je trouve toutes les excuses possibles pour ne pas vendre le couteau. Mais lorsque je fais une vente, je rappelle la loi au client. La prévention est très importante dans notre métier" précise l'armurier qui au dessus de son comptoir a affiché la photo d'un homme d'une soixantaine d'années dont la famille a prévenu d'un éventuel danger s'il se trouvait en possession d'une arme. "Ça arrive parfois qu'on nous informe de ne pas vendre une arme à une personne. Personnellement, je prends l'information très au sérieux."

Tout comme Sabine Vigne, notre armurier nîmois a attendu parler d'un changement de réglementation, sans trop savoir de quoi il s'agissait. "Ce ne sont que des rumeurs, mais rien n'est précis. Mais j'ai arrêté de commander des couteaux car si la législation change et que le couteau devient prohibé, je me retrouverais avec un stock inutile. Donc j'attends et surtout je reste prudent avec mes clients !" confie l'armurier qui se souvient du temps où l'on se battait "correctement" avec les poings. "On avait pas besoin de couteau pour se faire respecter. Vous savez, ce n'est pas le couteau qui est dangereux, mais la personne qui l'a dans les mains."

Ce que dit la loi

Les armes, les éléments d'arme, les munitions ou les éléments de munition des catégories 5, 7 et 8, les armes nommément désignées de la 6e catégorie (armes blanches) ne peuvent être acquis et détenus par des mineurs que s'ils ont plus de seize ans, s'ils sont autorisés par la personne exerçant l'autorité parentale et s'ils satisfont en outre à l'une des conditions suivantes lorsqu'il s'agit d'armes de la 5e, 6e ou 7e catégorie : Être titulaire du permis de chasser ou être titulaire d'une licence d'une fédération sportive ayant reçu, au titre de l'article 17 de la loi du 16 juillet 1984 susvisée, délégation du ministre chargé des sports pour la pratique du tir, du ball-trap ou des armes blanches.

La vente de ces armes, éléments d'arme, munitions ou éléments de munition aux mineurs de moins de seize ans est interdite.

Sont interdits, le port des armes et munitions de 1re et 4e catégorie, des armes de poing de 7e et 8e catégorie, des armes de 6e catégorie énumérées à l'article 2 ainsi que, sans motif légitime, le port des autres armes de la 6e catégorie ; le transport sans motif légitime des armes et munitions de 1re et 4e catégorie, des armes de 6e catégorie et des armes de poing de 7e catégorie.

Quiconque, hors de son domicile et sauf les exceptions résultant des dispositions sur le port et le transport de ces objets (fonctionnaires, militaires), sera trouvé porteur ou effectuera sans motif légitime le transport d'une ou plusieurs armes de 1ère, 4e ou 6e catégorie ou d'éléments constitutifs des armes des 1ère et 4ème catégories ou de munitions correspondantes, même s'il en est régulièrement détenteur, sera puni : S'il s'agit d'une arme de la 1ère ou de la 4ème catégorie ou d'éléments constitutifs de ces armes ou de munitions correspondantes, d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 4000€, s'il s'agit d'une arme de la 6e catégorie, d'un emprisonnement de trois ans et d'une amende de 4000€.

Stéphanie Marin

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