Demain, Dominique Seau, le PDG d'Eminence, leader français du sous-vêtement masculin, rencontrera le ministre Arnaud Montebourg pour évoquer la délicate question des relocalisations. Une démarche que le groupe a déjà expérimentée. 

"C'est un honneur pour moi de représenter l'industrie textile du Languedoc-Roussillon et même de la France devant le ministre du Redressement productif", réagit Dominique Seau. Le PDG du groupe Eminence, leader français du sous-vêtement masculin, doit s'entretenir demain, dans le luxueux salon Michel Debré de l'Hôtel des ministres, avec le ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg. Intitulée "Le choix de la France", la réunion portera sur la présentation des conclusions du rapport Sémaphores-PIPAM concernant dispositifs et les enjeux pour favoriser le "made in France". Le célèbre leitmotiv de l'ancien candidat à la Primaire socialiste et chantre de la démondialisation.

"Le choix de la France" pour le haut de gamme

Depuis 69 ans, le groupe de 900 salariés exploite son savoir-faire au travers de deux usines gardoises basées à Aimargues et Sauve. "Nous avons aussi un site en Roumanie et en Italie", ajoute Dominique Seau, précisant que la production est bien localisée dans l'hexagone. Le relocalisation, thème qui séduit l'opinion publique, a déjà été expérimentée par la firme, lorsque celle-ci connaissait quelques difficultés économiques. "Au premier trimestre 2012, nous avions constaté une baisse de 10% de notre chiffre d'affaire. Il a fallu réagir, soit par le chômage technique, soit par la relocalisation de nos volumes en France plutôt qu'en Asie. Nous avons choisi la deuxième solution", explique le PDG.

Plusieurs arguments expliquent ce "choix de la France". Il y a d'abord la réactivité d'approvisionnement : "nous avons plus de 15.000 références. (...) Si soudain, nous avons besoin de plus de produits, s'approvisionner en France prendra quelques jours, alors que le délai est de plusieurs mois en Asie et de plusieurs semaines en Europe de l'Est. Produire en France c'est une meilleur maitrise de la qualité du service à apporter au client ". A l'approvisionnement se succède l'argument de l'innovation : "En moyenne, l'ancienneté de nos salariés est de 18 ans. Ce sont des experts, ils maitrisent toutes les techniques, ce qui facilite l'innovation et permet d'avoir de l'avance sur nos concurrents internationaux", rajoute le PDG.

Mais ne nous y méprenons pas, toutes les activités ne sont pas relocalisables : "si nous avons pu faire cela, c'est que nous avons une gamme de produits très diversifiée", affirme Dominique Seau. Des produits à haute valeur ajoutée qui permettent d'engranger des bénéfices, vitales pour la survie de l'entreprise, et des produits à bas coût.

Les moyens du "made in France" 

Si Arnaud Montebourg est loin de faire l'unanimité chez les patrons, Dominique Seau préfère voir le positif : "le gouvernement a enfin pris conscience de la nécessité d'avoir une politique industrielle. La réalité nous montre que lorsque l'on perd de l'activité industrielle, on perd aussi des services".

Fort de son expérience, le dirigeant dénonce le traditionnel problème de "coût du travail en France".  "Le travail supporte des charges sociales qui n'ont rien à voir avec l'emploi, comme les allocations familiales. Cela nous pénalise face à la concurrence allemande, italienne, espagnole où la main-d'oeuvre est moins chère". La transmission du savoir est aussi une préoccupation : "aujourd'hui nous avons des métiers qui n'existent plus dans les CFA, BAC Pro, BTS en alternance alors que nous en avons besoin. Il y a des enjeux de formations internes", conclut Dominique Seau, désireux de redorer l'image d'un secteur qui, loin d'être poussiéreux laisse encore place à l'innovation et la création d'emploi.

Coralie Mollaret

coralie.mollaret@objectifgard.com