FAIT DU JOUR. La Grand'Combe, du communisme à l'extême-droite
Le résultat des élections européennes en a - parfois hypocritement - surpris certains dans la classe politique. Il était pourtant plus ou moins attendu. Du côté de la Grand'Combe, le maire communiste a été réélu il y a deux mois dès le premier tour, emportant de fait l'adhésion de la majorité de la population. Pourtant, dimanche, le FN y est arrivé en tête avec 29,67% des voix. Et Patrick Malavieille ne se dit pas étonné.
La Grand'Combe, tout comme Barjac, Rousson ou St-Martin-de-Valgalgues, fait partie de ces communes d'extrême-gauche qui ont basculé à l'extrême-droite lors du scrutin de dimanche. Le Front de Gauche y a obtenu un score honorable, 24,46%, mais loin derrière les 29,67% des voix du Front national représenté par Louis Aliot dans la circonscription Sud-Ouest. Comme dans de nombreuses villes, le score affiché lors des européennes de 2009 était pourtant inférieur à 8%.
Patrick Malavieille, qui entame son troisième mandat de maire ne semble pas surpris outre mesure. "Tout au long de la journée, j'ai bien vu que les gens de gauche ne se sont pas déplacés. Ceux qui sont allés aux urnes y ont été pour voter FN", assure-t-il. "Lors des élections municipales, on vote davantage pour un homme qu'un parti, en particulier dans les villages", ajoute le maire de la commune de 5 000 habitants. "Le FN a pris des racines nationales et européennes, les citoyens ont voté contre l'ensemble des politiques qui sont menées actuellement. Même à Nice où la politique sécuritaire est forte, les habitants ont préféré l'original à la copie : le FN est monté à 32% contre 27% pour l'UMP. ".
Le Front de Gauche en perte de vitesse
Pourtant, en choisissant l'extrême, les électeurs ne se sont pas tournés vers le côté gauche de l'échiquier politique. Une fois encore, c'est au FN qu'a profité "le raz-le-bol français". Le Front de Gauche a obtenu 6,34% des voix dimanche dernier contre 6,48% en 2009. "Il y a plusieurs courants au Parti communiste, ce n'est plus un secret. Certains étant plus radicaux que d'autres. A l'instar de Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon affiche aussi une vision extrémiste mais ça ne fonctionne pas. Sa personnalité est controversée et les désaccords au sein du parti, notamment sur le devenir de l'Euro, ne jouent pas en sa faveur", explique le maire.
Quand l’intolérance devient source de violence
Selon Patrick Malavieille, ce n'est plus l'immigration qui dirige les électeurs vers le bulletin Front national, mais bel et bien le chômage, et la précarité en général, qui deviennent sources de rejet. "Les citoyens sont perdus et ont peur. Quand je discute autour de moi, on me dit régulièrement qu'on est impatient d'être à la retraite. C'est un véritable signe de désespoir, ce n'est pas normal. Quant au chômage, il engendre des problèmes financiers et sociaux qui créent de la jalousie et donc de l’intolérance. Les gens ont des rapports de plus en plus violents entre eux. Dans ma commune, les violences conjugales sont devenues les premiers actes de violences relevés en termes de chiffres. Et on intervient de plus en plus pour des médiations entre voisins".
Et d'ajouter : "Pour le bien-être dans la ville, on a installé des luminaires qui restent en veille toute la nuit. Pourtant, à quelques mètres de certains d'entre eux, certains n'ont même pas l'électricité. En tant que maire, je suis démuni", déplore-t-il. De même dans les écoles primaires, l'ancien député se plaint de comportements sexistes et autoritaires dès le plus jeune âge de la part des garçons. "Tout cela est un terreau favorable à la haine de l'autre, conclut-il, il faut absolument réagir. Si on continue à désespérer les gens de la sorte, on ne sait pas jusqu'où ils pourront aller".
Pourtant, il serait réducteur d'expliquer ces actes par des problèmes liés à l'emploi. Car une autre tendance se dégage aujourd'hui : les conservateurs et les électeurs de droite descendent dans la rue. Même si on se souvient du 30 mai 1968 sur les Champs-Elysées pour soutenir De Gaulle, ou des manifestations pour la défense de l’École libre en juin 1984, "ceux qui ont manifesté contre le mariage pour tous il y a un an n'ont pas protesté contre une perte de droits. Il s'agissait pour eux d'empêcher aux autres d'en avoir, on ne leur enlevait rien du tout. Même l'Eglise s'est radicalisée et a défilé. L’intolérance survient partout et elle est assumée".
Eloïse Levesque
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