CINEMA "Vie sauvage", la marginalité au coeur des Cévennes
Tourné dans le Languedoc-Roussillon, près de Nîmes, à Florac et à Montpellier, le nouveau film de Cédric Kahn "Vie sauvage" sortira le 29 octobre prochain. Un père qui aime vivre hors du système part un jour avec ses deux enfants dont sa femme avait la garde. La cavale va durer 11 ans. Ce long-métrage inspiré d'une histoire vraie traite du choix de la marginalité au prix de la solitude. Rencontre avec le réalisateur.
Objectif Gard : Il s'agit de votre deuxième adaptation de faits divers, dix ans après Roberto Succo. Pourquoi avoir aujourd'hui choisi de traiter de ce thème via une histoire vraie?
Cédric Kahn : J’ai découvert l’affaire en 2008 en lisant un grand reportage dans la presse et j’ai immédiatement pensé qu’il y avait là une matière incroyable pour le cinéma. À la fois un mélodrame familial et la possibilité d’un film d’aventure et de cavale, en osmose avec la nature. Le temps a passé, l’idée a fait son chemin, et un jour, j’ai décidé de me plonger plus attentivement dans l’affaire en lisant les deux livres-témoignages qui avaient été publiés simultanément : celui de la mère, récit bouleversant d’une femme privée de ses garçons, et celui du père et des deux fils, récit écrit à trois mains, mélangeant la chronique d’une cavale et la défense d’un mode de vie. Les deux pouvaient être matière à un film très différent. Avec une seule évidence pour moi, c’est qu’il était impossible de prendre parti pour le père ou la mère. Le seul point de vue auquel je pouvais m’attacher était celui des garçons.
O.G : Dans le film, vous parvenez à vous détacher du jugement et des stéréotypes qui entourent ce sujet. Était-ce difficile?
C.K : Je n'ai pas voulu faire de reconstitution. Ce qui m'intéressait, c'était le trajet des enfants. Au début, ils voient leur père comme un héros. Puis les adolescents se construisent et développent leur libre-arbitre. Ils se rebellent et souffrent de la clandestinité. D'un autre côté, ils ne se sont jamais désolidarisés de leur père. Le film ne condamne pas un mode de vie, mais le mensonge. Je trouve courageux d'inventer un contre-système.
O.G : Cet homme, Paco, est en quête permanente de liberté. Mais ne s'en est-il pas rendu prisonnier?
C.K : Effectivement. Il est pris au piège de sa propre radicalité. Car au bout de la route, c'est la solitude qu'il l'attend. Comme dans le film "Into the Wild". Cet homme devient prisonnier de la nature.
O.G : Finalement, la liberté existe-t-elle?
C.K : Oui. Elle n'est pas forcément un piège mais elle a un prix, le risque de la marginalité. Je m'y retrouve moi-même en tant que cinéaste. Je cherche toujours à déjouer le système et ça peut me jouer des tours.
O.G : Pourquoi avoir choisi le Languedoc-Roussillon pour le tournage?
C.K : Parce-que c'est dans cette région que ce sont passés les faits réels. Le père et ses deux fils ont passé au moins 6 ou 7 ans dans les Cévennes, et nous avons tourné ces scènes près de Florac.
Propos recueillis par Eloïse Levesque
Le film sera projeté en avant-première le 14 octobre à 19h aux Arcades d'Alès, et à 20h45 au Sémaphore de Nîmes, en présence du réalisateur.
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