Publié il y a 7 ans - Mise à jour le 17.07.2016 - thierry-allard - 4 min  - vu 795 fois

HOMME DE L’OMBRE Jérôme Talon, un "fonceur" directeur de cabinet du maire de Bagnols

Jérôme Talon, ici lors du dernier conseil municipal de Bagnols en date (Photo : Thierry Allard / Objectif Gard)

L’homme est affable, a le tutoiement très facile, parle vite, comme s’il était toujours un peu pressé, jamais apaisé.

C’est que Jérôme Talon, 43 ans, directeur de cabinet du maire de Bagnols Jean-Christian Rey depuis son élection en 2008, empile les dossiers et les choses à faire.

« C’est un Zébulon, il est monté sur ressort »

« Je suis un peu l’homme à tout faire du maire, reconnaît-il d’emblée. C’est un avantage mais aussi un inconvénient, car ça m’empêche de temps en temps de me consacrer à certains dossiers. » Homme à tout faire, mais aussi collaborateur zélé : « j’ai horreur du vide, quand je vois que les choses ne sont pas faites, je les fais même si elles ne sont pas de mon ressort. »

« C’est un Zébulon, il est monté sur ressort, on a l’impression qu’il ne se pose jamais, lâche un ancien de la mairie de Bagnols. Il fait cinquante choses à la fois et ne prend pas forcément le temps de la réflexion. » Un aspect que Jérôme Talon affirme essayer de gommer, reconnaissant « manquer un peu de discipline dans mon travail, mais je me soigne. » Il se soigne par exemple en n’empiétant pas sur les plates-bandes de la directrice générale des services Martine Delaunay : « je ne m’immisce pas dans la gestion du personnel. Mon avis je le donne au maire, et il en fait ce qu’il en veut. »

Un maire à qui son « côté bulldozer, fonceur », selon ses termes, mais aussi son carnet d’adresses et son sens du contact conviennent. Il faut dire que les deux hommes étaient amis avant la politique. Enfin, avant de travailler ensemble, car concernant Jérôme Talon, la politique, c’est presque depuis l’enfance.

Elu à 22 ans

Originaire de Montfaucon, arrivé à Tresques à 10 ans, il se retrouve proche du PS dès le lycée. « C’est mon prof de français René Masse, adjoint à la culture de Georges Benedetti, qui vers mes 15 ans m’a fait venir à la section PS de Bagnols, et depuis j’y suis resté. » En 1995, à 22 ans, il est élu conseiller municipal à Tresques sur la liste de René Boissin, et rentre par la même occasion au bureau du SITDOM, le tout alors qu’il n’a pas fini ses études : « j’ai un DESS, je suis sorti de la fac en 1999. » De 2004 à fin 2010, il est, avec le futur député Fabrice Verdier, assistant parlementaire du sénateur Simon Sutour, avant de passer d’un mi-temps à un plein-temps à la direction du cabinet du maire.

Il prendra la présidence du SITDOM en 2001 pour ne plus la lâcher, après être devenu le premier adjoint d’Alexandre Pissas à Tresques. Entre les deux hommes, l’entente va durer cinq ans. En 2006, ils se retrouvent tous les deux candidats à l’investiture pour les cantonales. « Pissas l’a considéré comme un crime de lèse-majesté », affirme Jérôme Talon. Alexandre Pissas sera investi puis élu, et en 2008, Jérôme Talon deviendra simple conseiller municipal, avant de se présenter contre Alexandre Pissas en 2014, en vain. « Il a loupé un coche, c’est dommage, commente Alexandre Pissas. En 2002, Loulou Nicollin lui avait dit (à Jérôme Talon, ndlr) qu’il devait suivre les pas de son maire. Je pense que Loulou Nicollin avait un propos sage. »

« Une fois que le maire a pris une décision, même si je ne la partage pas, j’exécute »

« Il a choisi son camp, estime pour sa part un ancien de la mairie de Bagnols. Il est livré corps et âme à Jean-Christian Rey. C’est son porte-flingue. » Avec le maire de Bagnols, Jérôme Talon « forme un tandem atypique », note-t-il. « Je reste un soldat, il détermine le fond, sur la forme j’ai ma liberté, détaille le directeur de cabinet. Une fois qu’il a pris une décision, même si je ne la partage pas, j’exécute », non sans engueulade : « ça fait longtemps que ça n’est pas arrivé, mais il y a pu y avoir des moments très durs. Après, il n’y a jamais eu de rancune entre nous », poursuit Jérôme Talon.

Les deux hommes peuvent tout se dire, et s’écoutent : sur la stratégie politique, « le maire m’écoute énormément, affirme son directeur de cabinet. Il partage 95 % des stratégies. » Pourtant, certains comme cet élu, n’ont pas pour habitude de suivre ses conseils : « quand il me donne un conseil en stratégie politique, je fais l’inverse. » « C’est pas mal, ça le renforce dans sa position », glisse Jérôme Talon, moins susceptible que la moyenne du monde politique gardois. Au delà de la stratégie politique, le tandem maire - dircab compte « une grande force : on a juste besoin de se regarder pour savoir comment se positionner », affirme ce dernier.

Une proximité conjuguée à une latitude qui peuvent agacer certains élus : « c’est inhérent à la fonction, se défend Jérôme Talon. J’essaie de partager les décisions le plus possible avec les élus, mais il m’arrive de les informer a posteriori, alors que la logique voudrait que ce soit a priori. » Du côté de l’ancien de la mairie, on estime que le directeur de cabinet fait dans le dépassement de fonction : « Jérôme prend de plus en plus la parole à la place des élus référents. » Au delà de la majorité, celui qui affirme « faire volontiers le lien avec l’opposition » a une bonne cote : « j’ai d’excellents rapports avec lui, c’est quelqu’un de compétent, témoigne l’élu UDI Claude Roux. Il n’a qu’un seul défaut, il est à gauche. »

« Le libéralisme n’est pas un gros mot »

A gauche, mais tendance libérale : « le libéralisme n’est pas un gros mot, il faut savoir en tirer les bonnes ficelles », affirme celui qui soutient ouvertement Emmanuel Macron, après avoir fait partie des soutiens de DSK. Et Rocard ? « Les idées me plaisaient, pas le bonhomme », explique Jérôme Talon, avant d’avouer avoir voté Tapie plutôt que Rocard aux Européennes en 1994. De quoi lui inspirer cette comparaison risquée : « Macron n’est pas Tapie, il y a du fond chez Macron, mais il y a ce petit côté ‘coup de pied dans la fourmilière’. Avec Macron, je retrouve du rocardisme avec un côté sexy. »

Pour notre ancien de la mairie, Jérôme Talon et Emmanuel Macron ont un point commun : « les velléités politiques. » A en croire le principal intéressé, ce n’est pas si sûr : « me présenter à Tresques en 2020 ? Je ne sais absolument pas. »

Thierry ALLARD

thierry.allard@objectifgard.com

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