Publié il y a 7 ans - Mise à jour le 04.09.2016 - anthony-maurin - 4 min  - vu 2709 fois

NÎMES Le rempart augustéen le plus original du monde romain

La tour de rempart romain récemment mise au grand jour (Photo Anthony Maurin).

Chaque année au mois d'août, une campagne de fouilles archéologiques prend ses quartiers d'été au pied du rempart romain situé entre le haut de la colline de Montaury et le bas de la route de Sauve. De nouvelles découvertes viennent confirmer l'originalité de l'enceinte romaine nîmoise.

Et oui, même à l'époque de la République ou de l'Empire Romain, les réboussiers nîmois faisaient déjà parler d'eux car ils ne faisaient rien comme les autres! A Nîmes, l'enceinte avait naturellement la vocation de protéger la cité mais 20 siècles plus tard, elle se dévoile peu à peu.

Au pied du mur, les archéologues fouillent encore pour débusquer du mobilier, des poteries et pièces de monnaie utiles pour une datation affinée (Photo Anthony Maurin).

Depuis trois ans à raison d'un mois par an, les fouilles archéologiques menées par Richard Pellé  de l'Institut National de Recherches Archéologiques Préventives nous en apprennent plus sur la construction, une des plus vastes, des mieux conservées et certainement la plus originale du monde romain.

L'enceinte fut construite un siècle avant l'amphithéâtre (les arènes pour les profanes) et probablement en 15 ou 20 ans alors que les travaux avaient été offerts par l'Empereur Auguste en 15 avant JC. Le chantier fut important et nécessita de nombreuses professions différentes mais aujourd'hui les archéologues découvrent la nature exacte de cet édifice perdu dans les siècles et dans les broussailles salvatrices.

Richard Pellé face à un bloc de pierre qui laisse entrevoir, sur la face du bas, une meurtrière (Photo Anthony Maurin).

"On sait comment on circulait sur cette partie du rempart, on pourra même connaître le pourcentage de la pente! On n'a jamais trouvé ou reconnu comme tel des blocs comme ceux que nous trouvons. Ils nous en disent beaucoup sur la construction. On a aussi la preuve que des meurtrières existaient du temps des romains" affirme Richard Pellé qui est secondé dans ces fouilles par une dizaine d'étudiants courageux.

Le rempart culminait à 9m de haut mais nous savons que le chemin de ronde était certainement à une dizaine de mètres du sol. Et la tour qui vient d'être mise au jour est aujourd'hui la plus élevée de Nîmes après la Tour Magne!

Les nouveaux plans, plus détaillés, seront la base des études à venir (Photo Anthony Maurin).

"Il y a également énormément de fragments de colonnes dans les tours du milieu et du bas. Ils viennent de la carrière de Leins qui fournissait aussi les pierres très blanches des chapiteaux de la Maison Carrée. On y voit des feuilles d'acanthes mais on ne sait pas pourquoi ils sont dans cet état... On dirait que les gens se sont acharnés afin de les détruire dans les règles de l'art!" note Richard Pellé. Les débuts de l'avènement du christianisme?

Sur la colline de Montaury, une tour circulaire élevée d'un étage ayant peut-être porter une façade octogonale vient donc bouleverser les connaissances sur le sujet. En effet, on ne savait même pas que cela se faisait ni que les tours avaient des étages!

Les fouilles se poursuivent mais le chantier est vaste et nécessité toute l'attention des jeunes étudiants qui font partie de l'aventure (Photo Anthony Maurin).

L'enceinte de Nîmes est de mieux en mieux comprise mais des zones d'ombres subsistent. Si les remparts augustéens sont relativement connus, on ne savait pas qu'ils n'étaient pas communs. Sur la colline, les trois tours découvertes ont trois architectures différentes quand les archéologues pensaient qu'il n'en existait qu'une!

Mais ces constructions ont eu quelque chose avant elles... A la base de la tour du bas, on a trouvé les traces de la culture de la vigne sur ces coteaux en pente et ce sol rocheux. Le coin a été à de nombreuses reprises passé sous le fer des engins mécaniques pour de basses raisons immobilières mais les archéologues exercent leur oeil de lynx.

La tour du milieu, entre le haut de Montaury et le bas de la route de Sauve. Sur la colline d'en face et dissimulée dans les branchages du pin, la Tour Magne point convergeant de l'enceinte romaine de Nîmes (Photo Anthony Maurin).

La porte qui reliait le rempart à la tour est à nouveau au grand jour grâce à la découverte de trois moellons miraculeusement conservés, les secrets tombent les uns après les autres. Les ouvertures des trois tours mesuraient la même taille et étaient toutes identiques.

Presque collé à la tour du bas mais probablement enterré du temps des romains, un caveau funéraire a du mal à se livrer. Et pour cause, cette double tombe est intrigante et énigmatique. A l'intérieur, la maçonnerie y est simple mais assez solide pour être encore visible aujourd'hui après tant de possibilités d'effondrement. Un fémur d'homme y a été retrouvé ainsi que quelques offrandes. Le corps était exposé plein nord.

A gauche, le rempart, au pied, le "décaissage" quasi sauvage datant des année 1960 et qui a laissé s'échapper de nombreuses réponses aux questions actuelles (Photo Anthony Maurin).

Mais c'est à côté de cette tombe que le mystère s'épaissit. Quelques bouts du squelette d'un très jeune enfant enterré bien plus tard que le premier corps viennent de sortir de terre. Difficilement explicables, il faudra un peu de temps pour essayer de comprendre les raisons d'un tel ensevelissement car autour on ne trouve rien d'autre mais on sait que le caveau a été réutilisé ultérieurement...

Avec ces nouvelles découvertes et les certitudes apportées par l'équipe de Richard Pellé, il serait de bon ton de poursuivre l'aventure... "J'avais demandé une campagne de trois ans mais je pense qu'il en faudrait un de plus! Je vais en faire la demande mais rien n'est sûr, je n'aurais peut-être pas les autorisations nécessaires... Il faudra aussi trouver des fonds et tout ce qui va!" brosse Richard Pellé.

La tour donnant sur la route de Sauve en bas à droite de l'image, un caveau funéraire a été retrouvé (Photo Anthony Maurin).

Nîmes et sa campagne de candidature à l'UNESCO pour son exceptionnel patrimoine romain antique et présent ne peuvent se passer de ce site d'une incroyable richesse historique. Petit couac, le terrain sur lequel a été construit le rempart et ses tours appartient à un groupement immobilier qui ne pourra pas, quoiqu'il arrive, construire dessus. La Mairie pourrait avoir des envies d'acquisitions... La Mairie devrait avoir des envies d'acquisitions!

Anthony Maurin

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