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Publié il y a 6 ans - Mise à jour le 19.08.2017 - philippe-gavillet-de-peney - 4 min  - vu 982 fois

VINS DE L'ÉTÉ Mas des Tourelles : pas si fous ces Romains !

Le Mas des Tourelles (Photo : Philippe Gavillet de Peney/Objectif Gard)

Pendant l'été, tous les samedis à 11h30, Objectif Gard part à la recherche des typicités gastronomiques de la région. Aujourd'hui nous avons fait étape à Beaucaire, au Mas des Tourelles, où l'on produit de surprenants vins antiques...

Implantée à Beaucaire, sur le versant sud du plateau qui s’étend d’est en ouest au sud de Nîmes et sur lequel est située l’appellation des Costières de Nîmes, la propriété des Tourelles offre plusieurs singularités qui méritent incontestablement le détour.

Un pressoir romain a été reconstruit à l'identique dans la cave gallo-romaine du Mas des Tourelles (Photo : Philippe Gavillet de Peney/Objectif Gard)

Sur un terroir qui présente l'originalité de compiler trois appellations (Vin de Pays d’Oc pour le Languedoc, Costières de Nîmes et Côtes du Rhône gardoises pour la Vallée du Rhône) et autant de typicités, le Mas des Tourelles regroupe plus de 100 hectares de vignes répartis sur une vingtaine de parcelles.

Les vins romains font l'originalité du Mas des Tourelles (Photo : Philippe Gavillet de Peney/Objectif Gard)

Aujourd'hui dirigée par Guilhem Durand, la pimpante propriété viticole est dans le giron familial depuis 1762. Elle a été érigée en bordure de la Via Domitia (*) sur les vestiges d'une pars rustica, une villa romaine, comme le prouve les campagnes de fouilles successives réalisées sur place par des archéologues. Au 1er et IIe siècle de notre ère, une communauté de potiers y fabriquait des amphores gauloises destinées à exporter les vins de la région dans tout l'Empire romain.

L’important pigeonnier témoigne de l’étendue de la propriété et de sa richesse. Il fallait, en effet à l’époque, justifier d’une surface de terres assez importante pour que les pigeons du mas n’aillent pas se nourrir des semences des voisins. Un ensemble de bâtiments de ferme (bergeries, étables, porcherie, fours à pain et plus tard cave viticole) témoigne de la persistance d’une activité agricole tout au long de son histoire.

À la tête du domaine, Guilhem Durand est l'héritier d'une longue dynastie de viticulteurs (Photo : Philippe Gavillet de Peney/Objectif Gard)

Quoi de plus normal qu'en plus de sa production traditionnelle la famille Durand ait voulu mettre en valeur ce patrimoine millénaire en se lançant dans la création de vins antiques. Des nectars originaux vinifiés et aromatisés dans des dolias (grandes jarres en terre cuite de 400 litres) comme à l'époque romaine dont les jus, après avoir été extraits par un foulage aux pieds, sont pressés dans un immense pressoir reconstitué grandeur nature d'après un texte de Caton dans un imposant cella vinaria (cave gallo-romaine).

Et pour mieux se rendre compte de ce que les adorateurs de Bacchus se glissaient dans le gosier quoi de mieux qu'une dégustation ? À dire vrai, pour le béotien que je suis, ces "Romanum vinum", ne livrent pas d'emblée leur secrets et il est difficile au nez de discerner tous leurs arômes.

Les hôtesses du domaine, qui reçoivent 13 000 visiteurs par an, accompagnent et commentent les visites et les dégustations (Photo : Philippe Gavillet de Peney/Objectif Gard)

Heureusement, une charmante hôtesse est là pour venir à notre secours et commenter cette dégustation. Et, grâce à ses indications, on parvient enfin à mettre un nom sur les épices et les plantes qui parfument délicatement de divin breuvage.

Et contrairement à l'ordre habituellement établi, on commence par un vin rouge. Ce Mulsum, allongé de miel, de plantes aromatiques et d'épices rappelle l'hypocrace, le vin médiéval. Consommé au gustatio (l'apéro, version Romains !) il avait la réputation de conserver aux hommes la jeunesse et durant de nombreuses années Rome en avait interdit la consommation aux femmes et aux éphèbes. Si l'on souhaite prolonger le plaisir, le Mulsum accompagnera parfaitement un magret de canard aux figues ou des petites cailles aux raisins et aux pignons de pin, voire un morceau de Roquefort ou un fondant au chocolat noir (servir à 14°).

Le Mas des Tourelles propose aussi toute une gamme traditionnelle de vins du terroir (Photo : Philippe Gavillet de Peney/Objectif Gard)

Plus complexe s'avère le décryptage du Turriculae. Élaboré précisément selon une recette de Lucius Columelle, ce blanc sec intègre de l'eau...de mer, de l'iris, du fenugrec et du defrutum (un condiment à base de moût de raisin réduit utilisé par les cuisiniers de la Rome antique). Le résultat, un peu surprenant au premier abord, s'avère très agréable en bouche. Ce Turriculae se révélera un excellent compagnon de table pour les poissons, les huîtres (dont les Romains raffolaient !) et autres omelettes au truffes ou aux asperges. Sans oublier les foies gras poêlés, les gâteaux aux noix ou le Comté du Jura... (servir à 18°)

"Last but not least", dernier mais pas le moindre, si vous voulez épater vos commensaux, le Carenum qui conclut le triptyque est un vin liquoreux aux subtils arômes de coing et de pêches confites qui remplacera avantageusement le classique Sauternes pour se marier délicatement avec un fois gras mi-cuit ou des tartes aux fruits (servir à 14°).

La visite guidée permet de découvrir les nombreux vestiges gallo-romains mis au jour lors des fouilles archéologiques réalisées sur le domaine (Photo : Philippe Gavillet de Peney/Objectif Gard)

La date des ''Vendanges Romaines'' approche ! Elles sont programmées pour le dimanche 10 septembre 2017 de 14h à 17h. Réservez dès à présent votre après-midi pour vivre en direct le travail dans la cave gallo-romaine reconstituée, le foulage, le fonctionnement du pressoir et le tout début de la vinification de des "Romanum Vinum". Profitez de ce moment pour déguster les vins des années précédentes. Tarif : 5,80 euros adulte – gratuité pour les moins de 18 ans accompagnant leurs parents. Mas des Tourelles – 30300 Beaucaire,  4294 route de Saint-Gilles (D38). Contact : 04 66 59 19 72 et www.tourelles.com

Philippe GAVILLET de PENEY

philippe@objectifgard.com

(*) La voie Domitienne (Via Domitia) est une voie romaine construite à partir de 118 avant J.C., à l'initiative du général romain Cneus Domitius Ahenobarbus, pour relier l’Italie à la péninsule ibérique en traversant la Gaule narbonnaise.

Philippe Gavillet de Peney

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