Publié il y a 5 ans - Mise à jour le 17.05.2018 - anthony-maurin - 5 min  - vu 521 fois

FAIT DU JOUR Simon Casas : "Nîmes, c'est mon berceau"

(Photo Archives Anthony Maurin)

Simon Casas, Jean-Paul-Fournier et Frédéric Pastor lors de la présentation des cartels de Pentecôte 2018 (Photo Anthony Maurin).

En train d’assister au débarquement des toros de Las Ramblas pour la San Isidro (Madrid), à quelques jours de Nîmes, Simon Casas explique ses cartels, sa vie de directeur d'arènes quand tout à coup les toros s'emballent. « Ici, ça ne fait pas rire. C’est la bagarre, c’est l’enfer, c’est la folie, il n’y a rien de comparable à la tauromachie ». Interview.

Objectif Gard : Êtes-vous content des cartels nîmois ?

Simon Casas : Sur le papier c’est fait pour ça ! Nîmes est au plus haut niveau avec les principales vedettes et ganaderias. Cette année Nîmes a un aspect toros important avec le retour des Partido de Resina mais ce n’est pas une science exacte alors on doit réduire l’incidence du facteur chance. Je crois que ça va être très intéressant. C’est un métier de fou, vraiment, on dépend de la chance, du temps, des attentats… Mais la météo annoncée est bonne !

Que pensez-vous de la réaction des aficionados nîmois à l’annonce des cartels ?

Je suis très content des spécificités nîmoises, Nîmes contribue à l’émergence de toreros et peu d’arènes font ça. J’essaie d’être attentif à une chose : le programme des arènes d’Arles. Les vedettes qui ne sont pas à Arles sont à Nîmes et pour le mois de septembre, on inverse. Les grandes vedettes ne doivent pas être vues tout le temps. La tauromachie n’a rien de comparable, il faut éviter les répétitions. C’est souvent en France que sortent les toreros émergents, alors nous avons une place à jouer. Pour arriver à garantir le succès, il faut beaucoup de travail et d’expérience. À Nîmes, ça fait grosso-modo 40 ans que je gère les arènes et il me semble que je n’ai jamais raté une feria.

Vous avez un concept unique et figé ou vous essayez de vous adapter à chaque arène dont vous gérer la programmation taurine ?

J’ai le même concept pour toute ma production de Nîmes, à Valencia, en passant par Alicante ou Madrid : les plus grandes vedettes, la fraîcheur et la vision du futur avec les nouveaux talents. C’est le cas des alternatives nîmoises, par exemple. De la créativité et, de temps en temps, un événement fort avec un maximum d’originalité. Il faut respecter, connaître l’histoire et la sensibilité du public de chaque arène pour assurer une bonne programmation. À Madrid, les toros sont plus importants que les vedettes mais ailleurs, c’est le dosage qui change d’une arène à l’autre.

Comment jugez-vous la place de Nîmes en France et sur la planète des toros ?

Je ne juge pas, j’observe. Nîmes est incontestablement la première arène de France et une référence à l’international. J’ai toujours travaillé pour qu’il en soit ainsi. Nîmes est dans le groupe des principales arènes mondiales. Avant, il n’y avait qu’une petite feria et une corrida en septembre. J’ai créé la feria des Vendanges. Ça a aussi positionné Nîmes tout comme le fait de voir des matadors de toros tel qu’El Juli prendre l’alternative ici.

Votre réseau vous sert-il toujours autant dans le cadre de la réalisation de vos cartels ?

Bien sûr. Je garde toujours une partie de la programmation ouverte. Ça a été le cas pour Alvaro Lorenzo qui a coupé trois oreilles lors des Rameaux à Madrid. Je ne boucle jamais les cartels trop longtemps avant l’annonce pour mettre des toreros en forme. Ma société est leader en nombre de programmation, j’ai donc beaucoup de moyens pour faire venir toros et toreros à Nîmes. J’engage toute l’année et je suis l'imprésario qui possède le plus d’arènes de première catégorie. Ça m’apporte des moyens supplémentaires que d’autres n’ont pas.

Et vos liens avec Nîmes ?

Nîmes, c’est mon berceau. C’est plus que ça même. Je ne pense aux cartels qu’avec la passion. Ça me motive, l’art tauromachique, les challenges… J’ai toujours 20 ans dans ma tête mais Nîmes va bien au-delà de la tauromachie pour moi. Je m’y suis construit, j’ai été construit par cette ville. Je me rappelle le mont Margarot sur lequel nous allions user nos fonds de culottes au moment même où personne n’y croyait. Dans les années 1980 j’ai eu les arènes et j’ai une nouvelle fois été le seul à croire aux Vendanges ou aux corridas matinales. J’ai toujours inventé des choses que le temps a approuvé. Nîmes a été mon université professionnel et j’y ai appris plus de la moitié de mon savoir. Je lui dois tout mais je donne tout en retour !

Vous pensez à la transmission, au passage de relais ?

Le temps de la retraite n’est pas venu ! Je suis leader mondial et en pleine activité mais j’essaierai de prévoir ma succession. En tout cas, le moment n’est pas venu mais j’aurais une pensée particulière pour Nîmes. Je ne suis pas seulement un homme d’affaires. Je vois le monde changer. Il y a de grands bouleversements sociétaux et il faut gérer la tauromachie de manière sociologique. Je pourrai offrir ma vie pour ça et en plus, physiquement, il paraît que je suis encore bien !

Que craignez-vous dans les mois ou années à venir ?

Je ne crains pas l’extérieur, les anti-corrida ou les animalistes. Je crains l’intérieur. Il faut que le monde de la tauromachie s’adapte à notre époque. C’est en entreprise culturelle qu’il faut travailler. Aujourd’hui, le métier d’organisateur, qui n’était que purement commercial, doit devenir artistique. L’art et la culture sont les seuls vecteurs d’importance. Il faut travailler comme au cinéma, à l’opéra, dans la musique ou la peinture. C’est ce que j’ai toujours fait mais tous les milieux ne sont pas capables de le faire. Il faut former une nouvelle classe d’entrepreneurs taurins. C’est, là aussi, ce que je suis en train de faire grâce à mon profil très particulier : j’écris des livres, je communique plutôt bien, je connais la politique…

Vous avez toujours un coup d’avance ou raison avant l’heure en fait ?

C’est vous qui le dites mais je ne peux qu’acquiescer. Si je devais me juger, je dirais que je suis un visionnaire ayant une forte faculté d’adaptation et d’anticipation.

Vous qui mettez la main à la poche pour organiser en Délégation de service public, il y a la notion de public, au sujet des corridas de Nîmes, qu’avez-vous à dire à la Ville qui communique à l’international sans montrer un seul toro (taureau) ?

Il ne faut pas avoir honte ou se sentir coupable ! La tauromachie est un art exceptionnel dans ce que l’exception a de plus exceptionnel. Elle véhicule des valeurs universelles. C’est une économie importante qui a un potentiel considérable. Je ne critique ni ne juge personne mais je peux donner un conseil : n’occultons pas notre identité, ce n’est jamais bon de le faire. Les toros font partie de notre patrimoine identitaire et économique.

Un dernier mot à dire aux Nîmois, aux Gardois ?

Je vous aime ! Organiser des corridas est une chose complexe qui représente de grandes responsabilités mais la tauromachie n’est pas une science exacte. À Nîmes, je ne travaille que pour vous.

Anthony Maurin

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