Publié il y a 5 ans - Mise à jour le 09.12.2018 - veronique-palomar - 4 min  - vu 725 fois

DIMANCHE VILLAGES Visite de la maison de Gaston Doumergue à Aigues-Vives

La demeure familiale de l'ancien président de la République gardois sera prochainement ouverte au public.
Phonographe, ouvrages hétéroclites et le sanglier couché, une préprogrammée sensation originale d'un toro de combat (photo Véronique Camplan)

Gaston Doumergue, qui faisait chambre à part avec son épouse, est mort dans ce lit en juin 1937 (photo Véronique Camplan)

La grande demeure familiale de Gaston Doumergue, au cœur d'Aigues-Vives, va devenir une "maison musée". Elle a été mise en sécurité pour pouvoir recevoir du public. Reste à régler la scénographie des lieux pour pouvoir l'ouvrir aux visites. 

Gaston Doumergue est né dans cette maison en 1863 et il y est resté très attaché. Durant toute sa vie, il y revient régulièrement et y meurt en 1937. Président de la République de 1924 à 1931, il a été président du conseil et ministre sous plusieurs présidence. Sa demeure nous parle de lui.

Avocat puis magistrat

Avant d'être un homme politique, Gaston Doumergue fut avocat puis magistrat (photo Véronique camplan)

Avant d'entrer en politique Gaston Doumergue est étudiant en droit à Paris dont il revient en 1885 pour s'inscrire au barreau de Nîmes et participe au procès retentissant du député Numa Gilly (*). En 1890, il entre dans la magistrature comme substitut à Hanoï, en Indochine. À la suite de quoi, il entre en France puis part à Alger où il est juge de paix.

Collections orientaliste et fantaisies exotiques

On ne résistera pas à cette représentation du président jeune en mandarin. Une rareté (photo Véronique Camplan)

Sa carrière politique commence en 1891 lorsqu'il revient d'Alger à Aigues-Vives et se présente à une élection législative partielle. Mais son attachement pour les colonies, dont il sera ministre sous plusieurs présidences, de 1902 à 1905 puis de 1914 à 1917, reste fort. Il tombe amoureux de l'orientalisme dont il collectionne peintures et sculptures.

De ses voyages, il rapporta de magnifiques collections de photos  (photo Véronique Camplan)

Il est ministre sans interruption de 1906 à 1910, d'abord au Commerce et à l'Industrie, où il crée la direction de la marine marchande, puis à l'Instruction publique et aux Beaux-Arts, à partir de 1908, en remplacement d'Aristide Briand.

"Gastounet" affable et simple, seul chef d'État français protestant avec Henri IV

Le bureau du président (photo Véronique Camplan)

Au sein d'un monde politique aussi instable, Doumergue s'évertue à soutenir la gestion des affaires publiques dans des valeurs de Gauche et une ligne directrice conservatrice. Homme affable et courtois, il séduit depuis le début de sa carrière politique par sa bonhomie et son accent. Après son élection à la présidence de la République, sa simplicité continue de lui valoir dans l'opinion publique une popularité qui se traduit notamment par le surnom familier de « Gastounet ».

Par ailleurs, l'accession de Gaston Doumergue à la présidence de la République fait de lui le seul chef de l'État protestant qu'ait connu la France depuis l'abjuration d'Henri IV, le 25 juillet 1593. Dans sa maison, pas de chambre de bonne mais une grande simplicité. La président et son épouse recevaient mais ne menait pas grand train.

Seul Président à se marier pendant son mandat avant… Sarkozy

La chambre de l'épouse du président est plus spacieuse et plus claire que la sienne. On y trouve un grand bureau. Madame Doumergue, agrégée, y passait de longues heures (photo Véronique Camplan)

Il est aussi, après Louis-Napoléon Bonaparte, le deuxième président de la République française célibataire au moment de son entrée en fonction. Bien que "vieux garçon", il n'en est pas moins, selon Adrien Dansette, "sensible au charme féminin" mais ses fréquentes liaisons passagères ne sont que les "mœurs parisiennes d'hommes politiques".

Il entretient une liaison de longue durée avec Jeanne-Marie Gaussal, veuve Graves, agrégée de l'Université. Durant son mandat présidentiel, il va tous les matins prendre son petit déjeuner avec elle à son ancien domicile du 73 bis avenue de Wagram, où il se rend à pied depuis l'Élysée. Le 1er juin 1931, douze jours avant son ultime conseil des ministres et la fin de son mandat, il épouse sa maîtresse devant le maire du 8e arrondissement, Gaston Drucker, venu spécialement à l'Élysée, et devient ainsi le premier président de la République à se marier au cours de son mandat. Le suivant sera Nicolas Sarkozy.

Homme de progrès aux goûts plutôt en avance sur son temps

Une vaste salle de bain qui pourrait être celle d'une maison moderne (photo Véronique Camplan)

Tout au long de la visite, on constate que Gaston Doumergue et son épouse, tout en restant très simples, avaient des idées d'avant-garde : tendre les murs du salon de toile de jute, un papier peint jaune soleil dans la chambre du président, deux toilettes, une vaste salle de bain et la fameuse verrière qu'il fit rajouter sur les plans d'un architecte de renom.

Attaché aux traditions et amoureux de sa région natale

Grand amoureux des traditions de sa région, Gaston Doumergue aimait la corrida et les toros dont il a plusieurs représentations dans son bureau.

"Délivrer un message citoyen"

La verrière, a été sécurisée par un film invisible pour la mise en sécurité en vue des visites du public (photo Véronique Camplan)

320 000 euros ont été investis pour les travaux dans cette maison léguée à la commune en 1937 et laissée à l'abandon pendant des années avant qu'en 1991, l'Association des amis de Gaston Doumergue se mobilise pour sa sauvegarde, puis la mairie, la Région, l'État et Département, qui ont participé à sa mise en sécurité.

L'orchestration de la dernière tranche de la transformation de cette maison en musée a été confiée à Maguelone Nouvel Kirschleger (Université Paul Valéry), chargée de mission par la mairie d'Aigues-Vives. Elle sera chargée de la scénographie, c'est-dire la mise en scène des objets, leur valorisation, leur protection, mais aussi des contenus historiques, visite virtuelle du premier étage pour les personnes à mobilité réduite, étiquette en braille,  animations sonores… Le tout en collaboration avec les étudiants de l'Université Paul Valéry. Le couple Doumergue, avait émis le souhait testamentaire que cette maison serve à l'éducation des jeunes. "Elle délivrera un message citoyen", se réjouit la chargée de mission en conclusion.

Véronique Palomar-Camplan 
* Tonnelier devenu député-maire de Nîmes, le socialiste anti-opportuniste Numa Gilly acquiert une notoriété nationale en septembre 1888 quand il accuse de corruption la majorité des membres de la commission du budget.
Véronique Palomar

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