Publié il y a 5 ans - Mise à jour le 09.12.2018 - veronique-palomar - 3 min  - vu 2211 fois

FAIT DU JOUR Vie et mort d'un ragondin

La Communauté de communes de Petite Camargue au secours du marais.
La saison a commencé, Yannick Bouterin agent de gestion des milieux aquatiques est en charge du piégeage (photo Véronique Camplan)

Objectif Gard a eu l'occasion de suivre dans leur tournée deux agents de gestion des milieux aquatiques de la communauté de communes de Petite Camargue.

Sur un territoire qui rassemble les communes d'Aimargues, d'Aubord de Beauvoisin, du Cailar et de Vauvert, dans le cadre de l'exercice de la compétence Gemapi (Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations) les deux hommes ne manquent pas de travail. Parmi leurs missions, le piégeage des ragondins, un rongeur intrus qui cause de multiples dégâts. L'occasion d'en apprendre plus sur la bestiole et de prendre la mesure de la fragilité du milieu.

Petit matin en Camargue

Poésie d'un matin d'hiver dans le marais de Camargue à hauteur de Franquevaux (photo Véronique Camplan)

Il est tôt lorsque la journée de Yannick Bouterin et Pascal Thibaut commence. Ce matin là, ils ont de nombreux invités sur leur tournée. On trouve là des élus de la CCPC et leur président, Jean-Paul Franc, ainsi que Jean Denat, maire de Vauvert, commune qui jusque-là exerçait la responsabilité de la régulation des ragondins. Rendez-vous était donné au Café du Centre à Gallician. C'est là que Jean Denat, un spécialiste du ragondin, qu'il piège, observe et à propos duquel il réfléchit depuis de nombreuses années, plante le décor.

Un intrus venu d'Amérique du Sud

Ce ragondin ne fera plus de trous dans les digues (photo Véronique Camplan)

C'est ainsi que l'on apprend que le ragondin ou myocastor est un rongeur originaire d'Amérique du Sud. Il a été introduit en Europe au XIXe siècle pour le commerce de sa fourrure. À l'époque, il était élevé dans des fermes. La plupart des fourrures étaient revendues en Amérique du Nord jusqu'à l'effondrement boursier de 1929.

À cette époque de nombreuses fermes font faillites et les animaux sont relâchés dans la nature. Les particuliers continuent à le chasser pour sa fourrure et pour sa chair, jusqu'en 1980 époque à laquelle la  fourrure passe de mode. Les ragondins, n'ont plus de prédateurs et leur population augmente dangereusement pour le milieu naturel. La municipalité de Vauvert prend le relais et se charge de contenir la population de rongeurs.

Sans prédateur, la collectivité se charge de la régulation…

Marais de Camargue Franqueveaux (photo Véronique Camplan)

Difficile de les dénombrer mais en Camargue, il y en aurait aujourd'hui entre 20 000 et 30 000 selon les sources. Chaque saison de piégeage en éliminait 4 000 jusqu'à ce qu'une loi change la forme des pièges, qui moins efficaces, n'en capturent plus que 2 000 par an. Un réel problème, sachant que l'animal est prolifique puisque les femelles donnent naissance à 7 à 8 petits 3 fois par an.

Une natalité élevée qui contribue à leur survie dans leur milieu d'origine où ils sont la proie des caïmans et des jaguars. Mais rien de tel dans les étangs camarguais pour contenir les populations.

Des dégâts considérables

La sagne est impitoyablement rongée par les ragondins et les digues s'affaissent creusées par un trop gênant nombre de nids  (photo Véronique Camplan)

Mais en quoi sont-ils si dangereux pour le milieu ? Yannick Bouterin répond : "Ils se nourrissent exclusivement de la sagne (roseaux), dont ils consomment les parties tendres. Avec le reste de la plante ils construisent des nids qui ressemblent à ceux du castor avec deux trous, un pour l'entrée, l'autre pour la sortie. La multiplication des nids, donc des trous, provoque l'effondrement des digues. La sagne est endommagée et elle ne retient plus la terre. Sans compter que le roseau ne pousse plus aussi beau et fort qu'avant."

En Camargue, l'effondrement des digues est une véritable catastrophe, la prolifération du ragondin est donc une vraie nuisance. Il n'est pas question d'éradiquer complètement l'animal mais de le contenir dans des proportions raisonnables.

Trappeurs à la mode camarguaise…

Yannick Bouterin (Photo Véronique Camplan)

Désormais, chaque année, de septembre à mai, les deux agents de gestion du milieu aquatique vont se muer en trappeurs camarguais. Depuis le début de la saison, chaque jour, en barque, ils relèvent les pièges, les réamorcent et collectent les cadavres gardés en chambre froide jusqu'à ce que l'équarrissage viennent les prendre. Un mal nécessaire mais dommageable à plus d'un titre.

Parfois Jean Denat se prend à rêver que l'on puisse exploiter le potentiel de l'animal plutôt que de le combattre. "À Oléron, qui comme nous a été envahie par les mycastors, ils ont transformé la nuisance en valorisation économique. L'île a aujourd'hui son parc animalier qui permet de découvrir cet animal somme toute assez drôle et attachant et à passer par la boutique où l'on peut, entre autres, se procurer des cosmétiques à base de l'huile qu'il sécrète ou des plats cuisinés avec sa viande réputée comme savoureuse (parole de camarguais). Un jour peut-être…

Se donner les moyens de la préservation du milieu naturel

Jean-Paul Franc, président de la CCPC, est sous le charme de la découverte du marais en barque (photo Véronique Camplan)

En attendant, la Communauté de communes de Petite Camargue investit dans de nouveaux pièges, a embauché un agent supplémentaire et parle à la fois de rallonger la saison des piégeages et d'étendre la zone de capture pour sauver le marais camarguais.

Véronique Palomar-Camplan

Véronique Palomar

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