Publié il y a 4 ans - Mise à jour le 28.05.2019 - elodie-boschet - 3 min  - vu 492 fois

FAIT DU JOUR La Seconde Guerre mondiale racontée par Jeanine

Jeanine Soulages est intervenue dans la classe de Vincent Bury à l'école des Prés-Saint-Jean d'Alès. Photo Élodie Boschet/Objectif Gard

Aujourd’hui âgée de 91 ans, Jeanine Soulages était encore une jeune fille lorsque la seconde guerre mondiale a éclaté. Originaire de Saint-Geniès-de-Malgoirès, elle est venue raconter ses souvenirs à une classe de CM2 de l’école primaire des Prés-Saint-Jean à Alès.

Jeanine n’était plus venue sur les bancs de l’école depuis fort longtemps. Arrivée au bras de sa fille Nicole, la nonagénaire a franchi la semaine dernière le portail de l’établissement scolaire des Prés-Saint-Jean, à Alès, où une vingtaine d’élèves de CM2 l’attendait avec des questions plein la tête. « Parlez plus fort mes petits, je ne vous entends pas très bien… », prévient-elle d’emblée. Si Jeanine Soulages a perdu un peu de son ouïe avec l’âge, ses souvenirs, eux, sont intacts. C’est cette mémoire qui intéresse les écoliers, pour qui la Seconde Guerre mondiale appartient à un autre monde.

« Mon frère s’est caché au Pont-de-Montvert »

Jeanine Soulages était adolescente pendant la seconde guerre mondiale. Photo Élodie Boschet/Objectif Gard

Né à Saint-Geniès-de-Malgoirès, à mi-chemin entre Alès et Nîmes, Jeanine Soulages n’a jamais – ou presque – quitté son village. « Quand la guerre a commencé, j’étais en pension à Nîmes. On a entendu dire que les Allemands entraient en ville. Je peux vous dire que cela faisait peur. Mon frère, qui ne voulait pas partir au front, est allé se cacher dans la montagne, au Pont-de-Montvert », raconte-t-elle. Pendant ces quatre années de guerre, Jeanine prend régulièrement le train pour aller voir son grand frère dans les Cévennes. « Une fois arrivée là-bas, il fallait encore que je marche neuf kilomètres à pied pour le retrouver ! Mais j’étais tellement contente de le voir que ça ne me dérangeait pas. »

Captivés par le récit de cette dame qui pourrait être leur arrière-grand-mère, les élèves enchaînent les questions : « Connaissez-vous des gens qui sont allés dans des camps de concentration ? », demande un jeune garçon. « Oui, et ils sont revenus très malades. Ils n’ont pas vécu longtemps », répond Jeanine. « Avez-vous déjà parlé à un Allemand pendant la guerre ? », s’interroge un autre élève. « Non !, assure Jeanine. Mes parents me l’interdisaient et mon frère aussi. Ce n’était pas bien vu ! Les femmes qui parlaient aux Allemands étaient tondues. Parfois même on leur mettait du goudron sur la tête pour pas que leurs cheveux repoussent », explique-t-elle devant les minots ébahis.

« Il y avait des bals en cachette »

Les élèves avaient de nombreuses questions à poser à cette dame âgée de 91 ans. Photo Élodie Boschet/Objectif Gard

L’habitante de Saint-Geniès-de-Malgoirès est également revenue sur la vie dans son village à cette époque, où « il n’y avait pas de combat très important comme en zone occupée », rappelle l’instituteur Vincent Bury. Pour autant, l’ambiance était particulière. « Nous avions des tickets de rationnement pour aller chercher de l’alimentation. Mais nous n’avons pas souffert de la faim car mon père cultivait un potager et allait toutes les semaines tuer un agneau », se remémore Jeanine. Elle se souvient aussi du couvre-feu qui imposait à la population de ne plus sortir dans les rues à partir de 21 heures : « Nous étions tristes, mais nous essayons quand même de nous amuser. D’ailleurs, il y avait parfois des bals organisés en cachette. »

D’autres cachettes abritaient des Résistants, dont l’un s’était réfugié chez Janine et sa famille. « Il me demandait souvent d’aller voir ce qu’il se passait dehors. Un jour, j’ai vu la Gestapo et je lui ai fait signe de partir. Je crois que je l’ai sauvé », pense-t-elle. Comme si c’était hier, la Gardoise se rappelle enfin de ce jour où le conflit a pris fin, avec la victoire des Alliés sur l’Allemagne nazie : « Les cloches ont sonné et nous sommes allés danser dans le café du village. Tout le monde chantait, les gens étaient heureux. » D’autres cloches sonnent à l’école des Prés-Saint-Jean et les écoliers retournent s’amuser dans la cour de récréation avec l’histoire de Jeanine dans un coin de leur tête.

Élodie Boschet

Elodie Boschet

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