Publié il y a 4 ans - Mise à jour le 27.07.2019 - anthony-maurin - 4 min  - vu 1847 fois

NÎMES La ville retrouve un réalisateur

Le festival un réalisateur dans la ville débute samedi soir pour s'achever le 31 juillet. Tous les soirs, des projections sont organisées aux Jardins de la Fontaine.
Ici en 2017 aux Jardins de la Fontaine (Photo Anthony Maurin).

Volker Schlondorff (Photo : DR)

Voilà un festival qui sort un peu des sentiers battus. Un réalisateur dans la ville n'est pas une nouveauté mais cette animation estivale plaît à son public.

Balayant les grandes forces du cinéma français depuis une quinzaine d'années, mettre en lumière l'Allemand Volker Schlöndorff n'était pas si logique que cela. Peu connu par le grand public, le cinéaste est un sacré bonhomme. Dès 1966 à Cannes, son Les désarrois de l'élève Törless avait connu un vif succès en épatant la critique internationale. Ensuite, il y a raflé la Palme d'Or avec son film Le tambour (projeté demain dimanche). Mais avec ce film, il a aussi ravi l'Oscar du meilleur film en langue étrangère. Plus récemment, en 2015, il a reçu le César de la meilleure adaptation pour Diplomatie.

Pourquoi avoir choisi un tel profil après des années de cinéma très populaire ? Fabien Ontoniente, Thomas Gilou, Patrice Leconte... Puis par le passé, Bouquet et Depardieu ou Chabrol, Blier, Becker, Tavernier, Rossellini, Lhermitte, Hossein, Huppert, Jugnot, Brasseur, Mocky, Le Guay sont venus faire un petit tour et ont défendu leurs films. Avec Volker Schlöndorff, c'est un monde nouveau mais très ancien qui débarque à Nîmes.

Le public installé confortablement au pied du grand mur des Jardins de la Fontaine pour une séance de cinéma en compagnie du réalisateur et de quelques acteurs (Photo Archives Anthony Maurin).

Pour le maire de Nîmes, Jean-Paul Fournier, " Volker Schlöndorff est un grand réalisateur avec un film phare, culte et qui a connu un vif succès. Pendant cinq soirées, nous allons vivre des moments précieux avec une entrée gratuite dans un cadre exceptionnel. Cela fait plus de soixante ans que Volker n'est pas revenu à Nîmes. " En effet, le réalisateur était passé dans la région avec ses parents et se souvient avoir pris une photo du Pont du Gard qu'il doit encore posséder dans des archives qu'il ne jette jamais.

Des films à redécouvrir

Pour l'illustre Jean-Claude Carrière, qui a fondé le festival au côté de Sophie Rigon, Carole Bouquet et Gérard Depardieu, " j'aime ce thème. Un réalisateur vient présenter ses films en ville, sur un très grand écran et en extérieur dans un magnifique écrin. Les réalisateur n'ont jamais regardé leurs films comme ça et les redécouvrent chaque année. Ils sont épatés par le format et la qualité des installations. " Avec une jauge de 2 000 places assises, il est certain que la salle en extérieur peut faire peur aux timides ou aux introvertis.

Lors des tournages, il doit se passer quelque chose, ce moment particulier que le réalisateur attend pour le fixer sur la pellicule. Volker Schlöndorff est-il venu à Nîmes pour renouer avec ce sentiment, lui qui travaille actuellement sur un documentaire très écologiste et militant ?

" Quand Jean-Claude vous invite, vous ne pouvez pas refuser ! Je n'ai pas peur des 2 000 mais si nous ne sommes que 90 ça ne rendra pas de la même manière... Je ne l'espère pas ! Un bon film doit marcher partout. Je suis un sentimental et on va ressentir des choses en commun. Je voulais revoir ces films sans la pression que j'ai pu connaître lors de leur sortie. Je n'ai pas peur du public mais j'aime avoir cette distance avec mes films car à l'époque je ne les reconnaissais pas, je ne les voyais pas ", annonce le cinéaste qui a rencontré Jean-Claude Carrière en 1964 alors que Schlöndorff était l'assistant de Louis Malle sur un tournage en Italie.

Et Jean-Claude Carrière de reprendre : " Peu après, nous nous sommes revus au Mexique. Nous faisions la fête tous les soirs alors que nous étions en repérage pour un film. De temps à autres Volker me demandait un coup de main comme sur Le Tambour par exemple. " Des cinq films projetés à Nîmes, trois sont issus de la collaboration entre les deux hommes. Volker Schlöndorff a une connaissance extraordinaire de la technique au cinéma et il parle cinq langues...

Anecdotes et coïncidence ?

Revenons au Tambour, son film le plus connu. Oui il a reçu la Palme d'Or à Cannes et oui il l'a reçue en étant ex-æquo avec un certain Apocalypse Now de Francis Ford Coppola, rien que ça. Et pourtant il ne voulait même pas faire ce film au début du projet !

Pour l'anecdote, et une fois qu'il était dans la boîte, le film était trop long pour les distributeurs de l'époque et Volker Schlöndorff a dû tailler dans la masse une vingtaine de minutes pour le rendre plus commercial. Une fois la Palme acquise malgré ce défaut, le réalisateur a demandé à ses distributeurs de bien vouloir sortir la version complète. Que nenni, lui ont répondu en cœur les financiers, il serait devenu un film primé tout en étant incomplet. Impossible, cela ne se fait pas. Pendant 40 ans, le temps que les droits et les contrats se diluent dans le temps, la situation est restée ainsi. Vous pourrez enfin voir la totalité du projet grâce à la director's cut qui sera projetée dimanche soir.

Un réalisateur dans la ville avec Sophie Rigon, Jean-Claude Carrière, Jean-Paul Fournier, Volker Schlöndorff et Frédéric Pastor, adjoint aux festivités de la Ville (Photo Anthony Maurin).

Autre film incontournable, Un amour de Swann. " Évidemment nous touchions à Proust et c'était le problème ! Ça relevait de l'hérésie. Ce film a été très controversé mais j'avais envie de le revoir, surtout de revoir la scène de jalousie de Swann qui parcourt Paris la nuit. Jack Lang était ministre de la culture et il m'avait permis de bloquer de nombreuses rues de Paris trois heures en pleine nuit. C'était magique et les images sont sublimes ", ajoute Volker Schlöndorff qui manie fort bien la langue de Molière.

Le cinéma a-t-il changé ?

Lors de ce festival, le public verra en quelque sorte une version raccourcie du travail de l'artiste. " Je voulais mon premier film et mon dernier comme ça on verra si le cinéma a changé en 50 ans. On verra aussi si mon cinéma a changé ! Et puis j'avais aussi envie de voir un film intimiste en grand. C'est plus intéressant qu'un péplum ! ", conclut Volker Schlöndorff. Pas de Ben Hur à l'horizon mais des histoires d'époques, des fils à tirer, des scènes à zyeuter, des dialogues à écouter et surtout, surtout, de bons moments à passer. C'est aussi le luxe gratuit d'un réalisateur dans notre ville.

Les films suivants sont projetés aux Jardins de la Fontaine : Diplomatie (2014), samedi soir. Le Tambour (1979) dimanche 28/7, Un amour de Swann (1984) lundi 29/7, Homo Faber (The voyager 1991) mardi 30/7 et Les désarrois de l’élève Törless (1966) mercredi 31/7. Enfin et pour les plus curieux, la leçon de cinéma sera donnée au CGR avec Le coup de grâce (1976).

Anthony Maurin

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