Publié il y a 7 mois - Mise à jour le 21.09.2023 - Corentin Migoule - 4 min  - vu 2138 fois

ALÈS Jean-Claude Labrune et Mounir Mahjoubi, deux patrons à succès livrent les secrets de l'entreprenariat

Labrune et Mahjoubi

Jean-Claude Labrune et Mounir Mahjoubi, deux générations d'entrepreneurs.

- Corentin Migoule

Le fondateur de Cedegim et l'ancien secrétaire d'État au Numérique étaient en visite à Alès ce mercredi 20 septembre. En fin de soirée, dans l'amphithéâtre principal de l'École des Mines, les deux patrons à succès ont livré leur vision de l'entreprenariat face à une centaine de patrons locaux.

"Les grandes rencontres" organisées par le réseau Gard entreprises ce mercredi 20 septembre ont d'abord permis de visiter les locaux ultramodernes de deux fleurons de l'économie alésienne : Bastide 1880, spécialisé dans les arts de la table, entre autres, et Capelle, leader européen du transport exceptionnel. Conviés pour l'occasion, Jean-Claude Labrune, fondateur de Cegedim (Centre de gestion, de documentation, d'informatique et de marketing) dont il est resté PDG, et l'ancien secrétaire d'État au Numérique Mounir Mahjoubi, y ont participé. 

En fin de journée, c'est dans l'amphithéâtre principal de l'IMT Mines Alès que les deux patrons étaient attendus par une centaine d'entrepreneurs locaux et quelques élus. Citons pêle-mêle Olivier Martin, président de la communauté de communes de Cèze Cévennes, Jean-Charles Bénézet, maire de Saint-Christol-lez-Alès, l'avocat nîmois Vincent Vinot en qualité de vice-président du réseau organisateur, et le Bagnolais Philippe Broche, candidat aux élections partielles de la CCI qui se profilent. 

Labrune et Mahjoubi
Jean-Claude Labrune et Mounir Mahjoubi, deux générations d'entrepreneurs. • Corentin Migoule

Après le propos introductif du président Jean-Pierre de Faria suivi de la présentation de l'école par la directrice Assia Tria, Mounir Mahjoubi a précédé Jean-Claude Labrune au pupitre. Celui qui est désormais installé à Saint-Ambroix où il s'apprête à faire revivre l'ancienne filature bientôt transformée en auberge-école écoresponsable a dévoilé la provenance de sa fibre entreprenariale alimentée par le triptyque composé de "l'esprit du technicien, l'esprit de l'innovateur et l'esprit de sagesse"

L'innovateur a un rôle "très important" dans la société a exprimé le fondateur de "la Ruche qui dit oui" en s'adressant aux élèves ingénieurs présents dans l'auditoire. Ce rôle, c'est celui qui consiste à "aller là où personne n'est jamais allé". Il est susceptible de générer des "erreurs" qu'il faut accepter. "J’ai créé huit boites dont cinq beaux échecs", s'est marré Mounir Mahjoubi avec autodérision. Le dernier nommé laissait ensuite la parole à celui dont il venait de lire "l'impressionnante biographie"

"Je ne comprends pas comment on peut être aussi bon que toi et avoir accepté d’être secrétaire d’État au Numérique", lui a alors lancé Jean-Claude Labrune, taquin pour la première fois de la soirée. Le fondateur de Cegedim, spécialiste des logiciels de gestion de la relation clients (CRM) pour l'industrie pharmaceutique et l'un des principaux éditeurs européens de logiciels destinés aux médecins, pharmaciens et acteurs de l'assurance-santé, a tenté de relever un défi : "Raconter ma (sa) vie en peu de temps." 

Assia Tria et De Faria
Assia Tria et Jean-Pierre de Faria ont assuré le propos introductif. • Corentin Migoule

Celui qui a grandi à la campagne dans le Berry y est parvenu en une grosse vingtaine de minutes au cours desquelles l'octogénaire a vanté les mérites du travail. "Je travaille toujours à 80 ans, c’est pour ça que je suis encore debout", a-t-il enclenché en préambule. Avec un père mécanicien et une mère couturière, le patron d'un groupe qui pèse 620 millions d'euros de chiffre d'affaires et vient d'enregistrer une hausse de 12% au premier semestre n'aurait "jamais imaginé vivre ça"

Tout juste s'est-il autorisé des études au conservatoire des Arts et Métiers à Angers, puis à Paris, avant d'enquiller à l'école IBM et son laboratoire de calcul scientifique. La création de Cegedim en 1969 et son entrée en bourse en 1995 restent gravées dans sa mémoire. Jean-Claude Labrune s'est aussi souvenu sans mal de ce "formidable outil" qu'était le Minitel, le "micro-ordinateur", et appréhende le raz-de-marée de l’intelligence artificielle qui, par sa puissance de calcul, va impacter "près de 80% des métiers dans lesquels" il est engagé.

Les soubresauts de Cegedim, mais aussi ses coups d'éclat, Jean-Claude Labrune s'est voulu relativement exhaustif dans le récit de sa vie professionnelle, comprenant un passage à vide en 2014 avec la vente de la plupart de ses actions pour remettre le navire à flot, et une "folie" en 2007 lorsqu'il a déboursé 550 000 millions d'euros pour racheter son principal concurrent américain. La création de OneKey, première base mondiale de données de tous les professionnels de santé, figure aussi parmi ses plus grands succès.

La France trop "compétitive" en matière de technocratie

Jean-Claude Labrune l'espère, l'histoire de Cegedim, entreprise conçue à l'époque "sans aucun calcul de pérennité", va se prolonger avec ses enfants. C'est d'ailleurs son fils qui en tient les rênes depuis peu quand lui n'assure plus que "la représentation". À l'invitation de Jean-Pierre de Faria, le temps était venu de "poser des questions" à l'invité de marque du soir. Ce qui a occasionné une petite passe d'armes avec Mounir Mahjoubi quand le dernier nommé, se posant en défenseur de la politique macroniste, a répondu aux "attaques" de Jean-Claude Labrune sur la "compétitivité" de la France en matière de "technocratie"

"L’État ne prend pas assez soin de ses bons employés", avait notamment pesté l'octogénaire qui, en ce qui a trait aux nombreux contrôles fiscaux dont il a été l'objet, préfère la méthode anglaise à la méthode française. La dernière intervention de la soirée est une pique bien amenée par Jean-Michel Perret. Dans une assistance remplie de grands patrons, avec sa verve habituelle, le maire de Saint-Hilaire-de-Brethmas a interpellé le fondateur de Cegedim sous forme de question rhétorique. "Quelle est la valeur ajoutée qu'on apporte vraiment à l'intérêt général ?", a malicieusement interrogé l'élu saint-hilairois, tout en reconnaissant que l'œuvre de Jean-Claude Labrune en a créée dans le domaine médical.

Après quoi, Jean-Michel Perret a invité tout un chacun à ne "jamais oublier que les infrastructures qui font que la France n'est pas à la remorque sont financées par des fonds publics". "L'intérêt général est là, j'y participe suffisamment. Et je paye mes impôts en France sans aucun problème", a simplement rétorqué le chef d'entreprise. "Maintenant place au cocktail dînatoire", a habilement conclu Jean-Pierre de Faria, sentant que l'atmosphère avait besoin d'être détendue. 

Corentin Migoule

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