Publié il y a 2 ans - Mise à jour le 23.09.2021 - boris-de-la-cruz - 4 min  - vu 2157 fois

NÎMES À 91 ans, il surgit dans la nuit une canne à la main et une machette dans l'autre...

Mais face à lui, il n'y avait pas les agresseurs de sa fille comme il le pensait, mais des policiers municipaux venus régler un conflit de voisinage...
Maitre Julie Stenger Daquin. Photo Tony Duret / Objectif Gard

L'homme avance doucement jusqu'à la barre du tribunal correctionnel de Nîmes. À 92 ans, il tient à peine sur ses jambes. 

La présidente du tribunal correctionnel de Nîmes accepte exceptionnellement que ce prévenu reste assis face à elle. Car le nonagénaire n'est pas la victime, mais bien l'auteur de "violences avec arme". La juge est obligée de hurler pour se faire entendre et comprendre. La magistrate évoque des faits survenus le 7 février 2020. Les policiers municipaux affirment que lorsqu'ils arrivent pour régler un conflit de voisinage, ils font face dans la nuit noire à "un homme qui surgit une machette à la main". L'agresseur serait le nonagénaire qui marche péniblement avec une canne.

"J'ai surpris dans l'obscurité des ombres qui avançaient sur moi, j'ai eu peur, je croyais que c'était les gens qui causent des problèmes. Je pensais qu'ils revenaient nous ennuyer après avoir agressé ma fille. On a monté un guet-apens à ma fille vous comprenez ? Elle a été agressée et a fini à l'hôpital. Je ne savais pas que c'étaient des policiers dans l'ombre, on a besoin des policiers. Pourquoi j'aurai agressé des policiers ? Je pensais que les agresseurs revenaient", déclare la main sur le coeur cet homme de 92 ans au casier judiciaire vierge. "On a toujours besoin des policiers. Des personnes avaient cassé l'éclairage, je n'ai pas vu les uniformes. Je n'ai pas menacé", répète plusieurs fois le vieil homme.

Un problème de voisinage serait à l'origine des actes le soir des faits. La fille du prévenu ne parvenait pas à pénétrer dans le chemin qui mène à la maison de son père, car des grosses pierres au milieu de l'allée faisaient obstruction. Selon le prévenu, les problèmes de voisinage se multiplient dans le quartier de Nîmes où il vit et il est sorti pour défendre sa fille d'éventuels agresseurs.

Dans la nuit face aux policiers une machette à la main

"Il dit qu'il n'a pas menacé. Ce soir-là, il faisait nuit noire, j'ai juste vu deux yeux blancs dans la haie, c'est à ce moment-là que j'ai vu traverser un objet long, la machette se déplier, puis ensuite monsieur me faire face. Moi, sur le coup, j'ai pris l'objet pour un bâton. Je me suis présenté en qualité de policier, mon coéquipier a également crié police", indique à la barre de la juridiction un policier municipal de Nîmes qui a déposé plainte.

"Mon collègue a sauté sur monsieur pour essayer de le mettre au sol ce qu'il n'a pas pu faire, mon second collègue est arrivé et on l'a mis au sol, puis la fille de ce monsieur est arrivée. Depuis cette intervention je fais très attention. Je suis parti sur un simple conflit de voisinage, je me suis retrouvé face à une machette", complète le policier.

Les policiers ont cassé mon appareil auditif, ils m'ont menotté

"Non c'est pas vrai, ils sont tombés sur moi, j'ai pris des coups de pieds, les policiers ont cassé l'appareil auditif. Vous voulez voir les morceaux ? Ils m'ont menotté et frappé sur la tête", poursuit le nonagénaire. À une question de son conseil, Me Julie Stenger-Daquin, le prévenu répond : "J'avais une canne à l'époque, je me déplaçais avec comme aujourd'hui". Puis il rappelle ses combats dans l'armée française.

"Il est évident qu'il a brandi cette machette, il reconnaît que c'est un geste défensif croyant sa fille en danger", estime le substitut du procureur en réclamant une peine de 2 mois de prison avec sursis et l'interdiction de porter une arme pendant 5 ans, en plus de la confiscation de la machette.

Un ancien militaire sans casier judiciaire

"Il y a un contexte particulier, la fille de monsieur a été agressée avant par les voisins et il y a de nombreuses plaintes. Sa fille a même été blessée et transportée par les pompiers. Ce soir-là, elle appelle son père au secours en disant je suis coincée, je ne peux pas rentrer, ils ont bloqué l'entrée, j'appelle la police. Elle est seule dans sa voiture et il est 22h, un 7 février, il fait nuit noire, rappelle maître Stenger-Daquin. Mon client a 91 ans au moment des faits, il a une carte handicapé, il n'entend pas, il est appareillé et il a du mal à tenir debout. Il est fortement diminué, tout le monde peut le constater, mais il veut sauver sa fille qu'il croit en danger dehors, donc il sort. On indique qu'il aurait surgi, mais quand je le vois je ne parviens pas à croire et à imaginer qu'il ait pu surgir", dénonce l'avocat de la défense qui plaide la relaxe. Il était dans un contexte d'anxiété, de peur, pour lui il s'agit des agresseurs de sa fille, des voisins qui lui font face". 

Le tribunal a condamné cet "homme qui a fait toute sa carrière au service de la France comme militaire", souligne son conseil, à une peine de 2 mois avec sursis. Il a toutefois été décidé de ne pas inscrire cette décision sur le bulletin numéro 2 du casier judiciaire.

Boris De la Cruz

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