FAIT DU SOIR Logement social : Marie-Noëlle Lienemann sonne l’alerte
L’ancienne ministre du Logement, désormais sénatrice et présidente de la Fédération nationale des sociétés coopératives d’HLM, Marie-Noëlle Lienemann, était à Avignon ce jeudi à l’invitation du bailleur social Grand Delta Habitat, qui intervient notamment sur le Gard. L’occasion de tirer un bilan du Conseil national de la refondation sur le logement, mais aussi la sonnette d’alarme concernant le logement social.
La crise du logement n’est pas neuve, « mais on arrive au paroxysme entre l’écart entre les prix du logement et les revenus », pose Marie-Noëlle Lienemann. En cause notamment, la hausse des taux des prêts immobiliers. Face à cette situation, le Gouvernement a organisé le Conseil national de la refondation sur le logement, dont la restitution s’est tenue le 5 juin. Et c’est peu dire que le compte n’y est pas : « Nous sommes ressortis unanimement déçus, et pour certains en colère », avance-t-elle, en citant les acteurs du bâtiment, les promoteurs ou encore les acteurs du logement social. « Nous avons demandé une certain nombre de choses, pour l’instant nous n’avons rien », résume la sénatrice.
La liste est longue des griefs, mais le principal, qui entraîne les autres, concerne le budget national consacré au logement, « qui va être largement ponctionné », regrette-t-elle. De plus, « une proposition d’encadrement du prix du foncier n’a pas été retenue, alors qu’elle était largement partagée dans l’arc politique. » Concernant le logement social, la situation se tend. En effet, « nos remboursements sont indexés sur le taux du livret A, nous arrivons dans un goulet d’étranglement », avertit l’ancienne ministre, alors que le taux du Livret A a été revu à la hausse, et pourrait encore augmenter prochainement.
Dans le même temps, le dispositif de prêts à taux zéro, qui facilite l’accès à la propriété, « n’a pas été maintenu dans le neuf sur 93 % du territoire national, ce qui veut dire que les catégories populaires et modestes ne vont plus avoir accès à la propriété », affirme Marie-Noëlle Lienemann. Et ce faisant, vont rester dans le parc HLM. Or, « nous manquons de logements, et de logements abordables », reprend-t-elle, et seuls 88 000 logements sociaux sont bâtis chaque année dans le pays, « il y a quelques années c’était 120 000 à 130 000 », pose-t-elle. Localement, « nous avons 18 000 demandeurs en attente sur le Vaucluse et 20 000 sur le Gard », affirme le président de Grand Delta Habitat, Michel Gontard, bailleur social qui a construit 300 logements sociaux cette année dans le Gard, soit un tiers de ce qu’il lui faudrait faire sur la période.
« Une bombe sociale »
« On est très, très, très loin de pouvoir satisfaire la demande, reconnaît Michel Gontard. On se heurte au contexte, mais aussi une spécificité du territoire : la rareté et le coût du foncier, et la volonté de certains élus. » « Ici on a un record de communes carencées ou qui n’atteignent pas les objectifs de la loi SRU (sur la production de logements sociaux, NDLR), et ça augmente, tonne l’ancienne ministre. Ce n’est pas vrai sur toute la France, mais c’est très vrai ici, et c’est une alerte importante. » Et ce sachant que « dans le Vaucluse et le Gard, 76 % de la population est éligible au logement social », rappelle le président de Grand Delta Habitat, notamment des salariés.
Bref, « nous sommes face à une bombe sociale », lance-t-il. Face à cette situation périlleuse, Marie-Noëlle Lienemann réclame « une politique de régulation » pour les prix du foncier et des loyers, « l’instauration de la TVA à 5,5 % sur l’ensemble de la gamme, l’abandon du prélèvement de la RLS (la réduction de loyer de solidarité, NDLR) contre un engagement de produire plus de logements. » Sur ce point, « cette ponction de l’État sur les bailleurs sociaux représente 14 millions d’euros annuels pour Grand Delta, ce qui équivaut à 400 logements pas construits », regrette Michel Gontard.
Sur ces points, « les résultats du CNR logement n’ont pas été au rendez-vous » pour le président de Grand Delta Habitat, alors que « les préoccupations sont unanimement partagées ». « Le Gouvernement veut faire des économies sur la retraite et le chômage, la santé et le logement », affirme de son côté l’ancienne ministre. « Peut-être font-ils le pari que les prix vont chuter », tente-t-elle ensuite, sans vraiment y croire : « À chaque fois qu’il y a eu une baisse, on a vu que très vite les prix remontent, ce ne sont que des trous d’air. » Un peu d’air, c’est justement ce dont manque le logement social.
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