Publié il y a 9 mois - Mise à jour le 14.07.2023 - Anthony Maurin - 4 min  - vu 1882 fois

FAIT DU SOIR Quand les Gardois faisaient la fête...

ici, un carnaval dans les rues de Quissac. Photo TD

En ce 14-Juillet, rappelons-nous de l'intérêt qu'avant les Gardois portaient au carnaval et aux fêtes...

Le sud de la France a un passé vif et atypique. Ici, la mentalité est ardente et quand on lâche les chevaux, on le fait dans les règles de l’art, il n’y a qu’à voir les fêtes comme la feria qui ont pris la relève de celles dont nous allons brièvement parler…

Février est le mois du carnaval. Il précède le temps de Carême instauré par l’Église catholique qui a prescrit à ses fidèles d’observer une période de jeûne et d’abstinence pendant 40 jours avant la fête de Pâques.

Avant d’entrer en Carême, période solennelle, il était d’usage de se distraire. Le Carême commençant un mercredi (le mercredi des Cendres pour être tout à fait précis), les fêtes et réjouissances étaient organisées la veille, jour de Mardi-Gras.

Savoir apprécier la folie d’antan

Il est certain que le Français lambda, moderne, d’aujourd’hui, a un écho lointain de tout cela… Mais quand on creuse un peu comme l’on fait Marie-Claire Pontier, directrice des Archives départementales puis Céline Chépy et Vincent Mollet, on découvre de beaux souvenirs… Des souvenirs incroyables. 

Il était donc d’usage de se livrer à des mascarades (dans le sens de divertissement) et à des défilés tel celui que décrivent les frères Platter qui passe à Avignon le jour de Mardi-Gras 1596. Ils y voient "des troupes masquées et costumées différemment, en pèlerins, paysans, mariniers, Italiens, Alsaciens, avec de nombreux musiciens ; des danses étaient exécutées dans les rues par des jeunes gens masqués et ils relèvent la richesse des costumes et des bijoux."

ici, un carnaval dans les rues de Quissac. Photo TD

On pouvait aussi donner des représentations théâtrales, des bouffonneries et il existait tout un répertoire de chansons dédiées spécifiquement à cette journée. La tradition a d’ailleurs perduré au cours des siècles mais commence nettement à décliner dans la seconde moitié du XXe siècle.

Débordements nîmois…

En effet, dans la région, les poètes du mouvement du Félibrige ont contribué à la maintenir, tel Jan Castagno qui publie en 1924 "La grando pieta de Carnaval, boufounado espetaclouso que se jogo davans las poupulaços, lou Dimars-Gras sus las plaços." Toutes ces fêtes donnaient souvent lieu à des débordements, ce qui a conduit les autorités à les interdire périodiquement.

Ainsi, en 1545, la cour royale de Nîmes a observé qu’il "se commettait à Nîmes une infinité de désordres et de violences dans les jours de carnaval" et a prononcé une "défense générale de faire des mascarades, de se couvrir le visage pour se déguiser, soit dans les rues, soit dans les maisons, de porter les armes et d’aller dans des assemblées, de jour ni de nuit, sous peine de 100 livres d’amende, de la prison et de l’estrapade." Quand même !

Il semble toutefois que cette interdiction n’ait guère été suivie d’effet… Cette période de fête s’achevait par la mise à mort de Carnaval, représenté par un mannequin de paille promené dans toute la ville sur un âne, puis jeté dans une rivière ou brûlé sur une place.

La danse des Bouffets, Uzès en force

À Uzès, il semble que la tradition dite de la danse des Bouffets ait quant à elle pris un tour très particulier si l’on en croit un article publié dans L'Illustration en 1857. Il y est rapporté que dans cette ville, la crémation était accompagnée d’une danse particulière, appelée "danse des bouffets" et ainsi décrite.

Visiblement, dès le mercredi matin, les bouffetiers, vêtus d’un pantalon blanc, d’une chemise, d’un bonnet de coton et armés d’un soufflet, se répandent dans toute la ville et se lancent dans une farandole au son du tambour.

Un carnaval du Chemin Bas d'Avignon à Nîmes

Ils se poursuivent avec ces soufflets et courent également après les badauds avant d’accompagner le bonhomme Carnaval vers le bûcher. L’article précise encore que "cette danse semble être l’exclusivité d’Uzès, n’étant en usage dans aucune autre ville du bas Languedoc."

Chandeleur… un peu d’histoire

Depuis le Moyen-Âge, le 2 février est marqué par la fête de la Chandeleur. Si, aujourd’hui, cette date évoque surtout les crêpes que l’on fait sauter, il faut se souvenir que ce fut avant tout une fête religieuse.

La Chandeleur donnait d’ailleurs lieu à une célébration religieuse solennelle, comme en témoignent les pages d’un antiphonaire consacrées à cette fête. Cet ouvrage liturgique manuscrit, qui contient tous les chants exécutés par le chœur durant les offices et les messes, a été réalisé sur parchemin au XVIe siècle et proviendrait vraisemblablement du prieuré d’Aramon (il est à admirer aux Archives départementales).

L'Afrique est au rendez-vous de la fête... Même en feria ! 

Déjà, dans l’Antiquité, les Romains fêtaient vers le 15 février Lupercus, dieu de la fécondité et des troupeaux, tandis qu’il existait chez les Celtes, aux alentours du 1er de ce même mois, un rite célébrant la purification et la fertilité au sortir de l’hiver, en l’honneur de la déesse Brigid.

Dès le Ve siècle, l’Église intègre en quelque sorte ces rituels en célébrant, à cette date, la présentation de Jésus au Temple. En effet, selon les textes de l’Ancien Testament, les petits garçons, circoncis au huitième jour, devaient être présentés au Seigneur par leur mère, 40 jours après la naissance, avec un sacrifice d’un agneau ou de deux tourterelles pour les plus pauvres.

Le 2 février (40 jours après Noël), on célébrait donc cette fête dans les lieux de culte. Par la suite, l’Église y a associé la célébration de la purification de la Vierge, qui rappelle la divine maternité de Marie. Quant à la fête de la déesse Brigid, elle est devenue la Sainte-Brigitte (1er février).

D’après la chronique réalisée par Marie-Claire Pontier, directrice des Archives départementales, paru dans Passerelle, revue du personnel du Conseil général du Gard, n° 54, février 2005 et des recherches complémentaires de Céline Chépy et Vincent Mollet, mars 2017.

Anthony Maurin

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