L’INTERVIEW Jean-Luc Mincheni (Le Rocher) « On peut être heureux au Chemin Bas d’Avignon »
Arrivé à Nîmes il y a un an avec son épouse Siaska, Jean-Luc Mincheni est le responsable de l’antenne nîmoise de l’association Le Rocher. La structure catholique d’éducation populaire s’installe dans les quartiers urbains en difficulté pour tisser des relations de proximité et de confiance. Le néo-Nîmois fait le point sur la situation du Chemin Bas d’Avignon où il est basé.
Objectif Gard : Quelle est votre mission au sein de l’association Le Rocher ?
Jean-Luc Mincheni : C’est vivre avec les personnes des quartiers du Chemin Bas d’Avignon et du Clos d’Orville. Cette immersion nous permet de mieux connaître le quotidien des habitants.
Comment se décline votre présence sur le terrain ?
Nous sommes présents dans la rue et tous les mardis au marché du Chemin Bas d’Avignon et nous y proposons du café ou du thé pour créer du lien et écouter les gens.
La situation des habitants du quartier s’améliore-t-elle ces dernières années ?
On entend souvent dire qu’il y avait beaucoup plus de mixité il y a 20 ans et que c’était bien plus paisible. Il y a une sorte de recroquevillement et un certain communautarisme. Il est urgent de rétablir de la mixité à tous niveaux.
Le Chemin Bas est-il un quartier agréable à vivre ?
Oui, on peut être heureux au Chemin Bas d’Avignon, car il y a tout. Il y a un travail d’urbanisation qui y contribue et le tram-bus qui traverse le quartier. Énormément de personnes y sont attachées.
Que propose l’association Le Rocher ?
Être dans un accueil inconditionnel dans la mesure où il y a un respect mutuel. Tout le monde est le bienvenu au Rocher. Nous serons toujours là pour aider les personnes à se relever, mais toujours dans le respect et dans un espace laïque.
L’identité catholique de l'association n’est-elle pas un frein au rapprochement dans le quartier ?
Nous ne mettons pas en avant notre identité catholique. C’est notre quotidien et nous vivons notre foi dans le cadre privé. Nous sommes rejoints par des valeurs communes de la République et des valeurs humanistes. Ce qui manque le plus aux gens, c'est de se sentir aimé. Une fois qu’ils se rendent compte que l’on est là pour les aider, il y a des petites choses qui se mettent en place. Personne n’est inutile dans notre société. Nous n’avons pas la vérité, nous ne sommes pas des sauveurs. Il y a des gens qui tombent et qui retombent, mais on s’engage à garder l’espérance.
Tout passe par les rencontres ?
Bien sûr, avec les femmes, nous organisons des groupes de parole autour d’un café. Il y a aussi de l’accompagnement à la scolarité afin de définir les points forts et les points faibles et on y investit les parents. On a des ateliers théâtre, des ateliers couture, mais aussi des sorties à vélo. Tout simplement vivre normalement et redonner à la personne un horizon.
Qu’avez-vous envie de faire découvrir à ces Nîmois ?
J’aimerais leur donner envie d’être Français. La plupart le sont, mais ils redonnent souvent en premier leur origine : « moi je suis Algérien, je suis Marocain, je suis Tunisien ». C’est flagrant, alors par exemple, nous avons installé, dans nos locaux, une télévision pour regarder le match France – Tunisie. Ce sont des choses toutes bêtes comme aller à la commémoration du 11 novembre. Le tout en accueillant leur culture qui nous enrichie. Le but est de construire un monde dans la paix.
Y a-t-il des moments décourageants ?
Tous les jours, mais tous les jours nous avons des pépites. C’est parce qu'il y a des choses très difficiles et des choses très belles que nous avons l’impression qu’il vaut mieux être présents qu’absents.
Lundi dernier, Le Rocher de Nîmes organisait une rencontre entre des entreprises et des associations œuvrant dans le quartier. Où en est l’insertion professionnelle au Chemin Bas d’Avignon ?
Il faut créer du lien partout, sentir que tout est ouvert, que chacun se préoccupe de son voisin. Il faut avoir un vrai contact avec les entreprises du territoire pour qu’elles s’approprient le projet de donner aux jeunes l'envie de continuer leurs études ou leur formation. Le but est de créer un lien de confiance sur la durée.
Combien de personnes font parties de votre association ?
Il y a trois salariés, ma femme, Saskia, une adjointe et moi. Ensuite, nous avons un couple de seniors bénévole, trois services civiques et une trentaine de bénévoles.
Comment le Rocher est-il financé ?
L’association fonctionne à 75% de dons de particuliers et d’entreprises. Le reste vient de subventions publiques.
Êtes-vous des missionnaires ?
Non. En tant que catholiques et chrétiens, on se dit que c’est important d’être là pour créer ce lien. Les églises se vident et on cherche les catholiques et les chrétiens du coin, mais on n’est pas là pour ça. Notre mission est citoyenne et humanitaire. Notre foi est là pour nourrir tout ça.
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