Publié il y a 1 an - Mise à jour le 06.03.2023 - Propos recueillis par Corentin Migoule - 8 min  - vu 2758 fois

FAIT DU SOIR Christophe Rivenq, président d'Alès Agglomération : "Je suis le plus grand ambassadeur du territoire"

En marge d'un échange relatif à l'avancée de divers projets communautaires, Christophe Rivenq, président d'Alès Agglomération et premier adjoint au maire d'Alès délégué à l'Urbanisme, a répondu sans ambages à une série de questions l'invitant à s'exprimer sur la réforme des retraites, le lancement du parti territorial "1+1 = trois", son rapport aux médias et à la communication, tout en se projetant sur les élections municipales en 2026. Interview.

Objectif Gard : Vous êtes un président d'Agglo réputé optimiste, notamment à travers la déclamation de slogans porteurs pour le territoire. Pourtant, ces derniers temps, vos discours sont parfois teintés d'inquiétude, notamment lors de la conférence de presse avec les Logis Cévenols (relire ici). La situation est-elle vraiment alarmante ?

Christophe Rivenq : Je suis inquiet, réaliste, mais optimiste. Je suis inquiet pour l'année 2023, mais optimiste pour la suite. Je suis surtout plus inquiet pour les particuliers que pour l'économie. L'inflation, la crise de l'énergie, la réforme des retraites : tout ça est en train de créer du stress. Mais le covid a entraîné une forme de résilience des entreprises qui sont assez réactives. Ça, c'est plutôt intéressant. Je m'aperçois en discutant avec les entreprises et les instituts de formation que les jeunes sont plutôt dans une optique de monter leur entreprise, ce qui n'est pas déconnant, plutôt que d'être dans la situation d'avoir un patron. On est dans un basculement de notre société, avec une nouvelle façon de voir la vie. En ce qui concerne les collectivités, on est sujet à de telles contraintes exogènes pour monter nos budgets que nous n'avons plus de moyens de gérer nos ressources. Pour la Ville et l'Agglo, la hausse du coût de l'énergie représente 4 millions d'euros jetés à la poubelle. Pour les Logis, le cri d'alarme c'est pour faire en sorte que le Gouvernement entende ce qu'il se passe. Si on arrête les constructions de logements, ça aura un impact néfaste sur les entreprises du bâtiment. Mais il n'y a pas de doute, l'inflation va finir par se stabiliser et l'année 2024 devrait voir l'étau se desserrer. 

Le chômage est à la baisse sur ce territoire. Malgré tout, le salon TAF a fait recette la semaine dernière avec plusieurs milliers de visiteurs (relire ici). Ça en dit long sur le chemin qu'il reste à parcourir...

Les gens se réjouissent du monde qu'il y a sur le salon, moi ça me désole. En revanche, ça m'encourage à penser que les gens veulent s'en sortir. Trop souvent on entend dire que les gens se laissent aller et profitent des aides. C'est sûrement vrai pour certains, et trop vrai d'ailleurs, mais ce n'est pas vrai pour tous. Ce qui m'intéresse dans ce salon, et c'est la raison pour laquelle l'Agglo a rejoint la Région dans l'organisation, ce sont les instituts de formation. Car les gens ont besoin de se former. On sait qu'en moyenne, la nouvelle génération exercera quatre à cinq métiers différents durant une carrière professionnelle. Pour ça il faut des formations à proposer.

La lutte contre la réforme des retraites bat son plein. Quel est votre regard sur ces mobilisations qui s'enchaînent et sur le projet en lui-même ?

Sans rentrer dans le détail de la réforme, je dis à qui veut bien l'entendre que c'est n'est absolument pas le bon moment pour la passer. C'est une erreur majeure du Gouvernement au moment où on est en train de sortir d'une crise sanitaire, qu'on est dans une crise de l'énergie et une guerre internationale. La deuxième chose, le sujet principal sur lequel on ne veut pas se concentrer parce qu'on ne veut pas regarder les choses en face, c'est le problème du travail des seniors. Les organisations syndicales, notamment la CGT, sont aussi extrémistes d'un côté que l'est le Gouvernement de l'autre. Avoir un pays où il y autant d'actifs que de retraités, ce n'est pas soutenable. Par contre, aujourd'hui, à partir de 55 ans, le nombre de personnes qui sont en période de non-emploi, et qui sont payées par Pôle emploi ou l'Assurance maladie, c'est colossal. Notamment pour ceux qui ont exercé des métiers pénibles. Toutes ces années-là durant lesquelles on les paye jusqu'à la retraite, ça reste de l'argent public. Il faut chiffrer ce que coûte le non-emploi.

"Le travail, pour beaucoup de françaises et de français, c'est émancipateur !"

Christophe Rivenq

Quel est le premier bilan du lancement du parti 1+1 = trois (relire ici) ?

Les adhésions décollent. Le site Internet tourne. Beaucoup m'en parlent, et de loin ! De Nîmes, de Montpellier et même de Paris ! Olivier Véran, que j'ai rencontré il y a quelques semaines, en avait entendu parler. Sébastien Martin, président d'Intercommunalités de France, aussi. Certains amis au niveau régional veulent s'emparer de l'outil. Le député de Lozère Pierre Morel à l'Huissier est très intéressé. Le maire de Castelnau-le-Lez, Frédéric Lafforgue, est adhérent. À l'échelle locale, à moins qu'on ne me dise pas la vérité (rires), j'ai le sentiment que la démarche est bien accueillie. On me pose beaucoup de questions car je n'ai pas encore vraiment développé. Ce qui est apprécié, c'est cette volonté de dépolitiser les débats. Les gens n'ont plus envie d'être dans des cases. Ils ne sont plus de Droite ni de Gauche. C'est l'idée de ce parti qui, je le rappelle, n'a pas vocation à me faire quitter Alès.

Vous élaborez la stratégie politique de la mairie d'Alès depuis 30 ans. Pourtant, d'aucuns vous placent dans la position du petit jeune qui doit encore faire ses preuves. Vous en souffrez ? 

J'ai passé l'âge de souffrir de quoi que ce soit. Mais ça me surprend. Je vais avoir 60 ans dans trois ans. Voilà 30 ans que j'œuvre matin, midi et soir pour ce territoire. J'ai conçu les campagnes de Max Roustan (le maire d'Alès, NDLR), j'ai monté des projets. Je crois très sincèrement que c'est plutôt certains journalistes qui ne connaissent pas l'histoire du territoire qui ont cette vision. Ça dérange peut-être que ça se passe aussi bien entre Max et moi. Ce qu'on vit avec Max, c'est sûrement unique en France à ce niveau-là. Pour autant, je ne suis pas l'élève qui attend de dépasser le maître. Je rappelle que si je suis premier adjoint et président d'Alès Agglomération aujourd'hui, c'est à la demande de Max Roustan. C'est son choix ! Je n'ai jamais eu de plan de carrière. Quoi qu'il en soit, si tout se passe comme il le souhaite, ça ne sera pas son dernier mandat municipal. Il m'accompagnera au-delà de 2026. Je pense que Max Roustan aura besoin toute sa vie d'avoir une activité publique. 

"Je suis dans les bistrots tous les matins"

Christophe Rivenq

On vous prête un supposé déficit de popularité qui n'est finalement pas mesurable tant que les urnes n'auront pas rendu leur verdict. Vous compensez par une omniprésence sur le terrain, et maintenant avec un nouveau rendez-vous mensuel en live sur Facebook chaque dernier mardi du mois. Quelle est la véritable volonté derrière cette démarche ?

C'est sûr que je suis moins connu que Max Roustan. Je m'aperçois dans la rue tous les jours que les gens me connaissent bien. Par contre, et ça me surprend un peu, apparemment j'impressionne certaines personnes qui n'osent pas trop venir vers moi. Des gens me disent qu'ils n'osent pas me déranger. Je suis dans les bistrots tous les matins. En ville tous les midis. Je ne me force pas, j'aime ça ! Si je suis tous les samedis matins de 9 heures à 13 heures en ville, ce n'est pas pour être tranquille. C'est pour rencontrer les gens, humer la population. L'une de mes fiertés, je pense, c'est que je porte l'image d'Alès à l'extérieur, notamment avec les campagnes de com' à Paris. Des choses qui font qu'aujourd'hui on est à plus de 1 000 habitants accueillis chaque année. Pour le nouveau rendez-vous sur Facebook, c'est parce que j'aime être transparent sur ce qu'on va faire. Ça me permet d'avoir des échanges directs qu'on a perdus pendant le covid. Je pense que c'est un nouveau mode de communication complémentaire. Les gens viennent, ils regardent trois minutes, cinq minutes, une heure. Ils font comme ils veulent. Les réunions publiques où tu viens pour t'asseoir pendant deux heures, les gens n'en veulent plus. À part pour venir voir un spectacle quand c'est un tribun comme Mélenchon qui fait du one-man-show.

Ce Facebook live mensuel s'ajoute à une communication massive sur les réseaux sociaux, ainsi qu'au journal d'Alès Agglomération. Vous rêvez également d'avoir votre propre émission de télé. On serait presque tenté de penser que vous voulez débarrasser des médias. C'est le but ?

C'est une très bonne question et il faut en parler de manière décontractée. Je pense qu'avec les médias traditionnels, on n'a pas les mêmes objectifs. On a fait une étude qui montre que la première source d'information sur le territoire, c'est le journal mensuel d'Alès Agglo. La nouveauté, si l'on en croit nos sondages, c'est qu'on a autant de crédibilité que les journalistes quand on annonce quelque chose. Quand je lis la presse, certaines choses me dérangent parfois. On ne peut pas faire croire aux gens que les choses arrivent de manière spontanée sur ce territoire. Je ne demande pas que les médias disent tous les matins "c'est grâce à Rivenq", mais quand même. Alors, oui la presse est importante. Même si elle se perd un peu ces dernières années à cause d'Internet et de la course à l'info.

"De plus en plus de gens ont envie que je continue"

Christophe Rivenq

Si les élections municipales avaient lieu en mars 2023, Christophe Rivenq serait-il élu maire d'Alès ?

Oulaaa ! Je ne vais pas répondre à ça. Si je dis oui, on va dire "l'autre pour qui il se prend ?", et si je dis non, je donne trop d'importance aux autres potentiels candidats (rires). En mon for intérieur, je connais la réponse. Une élection, c'est le résultat de ce qu'on a produit et de ce qu'on propose. Avec ce que j'ai déjà donné, je suis sûrement le plus grand connaisseur du territoire. Je suis aussi, en termes de communication, le plus grand ambassadeur du territoire. Ce que je ressens, c'est que de plus en plus de gens ont envie que je continue. J'aurai 60 ans en 2026. En un mandat, on ne fait rien. Donc il faut que je m'engage pour au moins deux mandats. Après, on verra bien !

Pensez-vous que le paysage politique alésien sera le même en 2026 qu'il ne l'est aujourd'hui ? Autrement dit, doit-on s'attendre à voir émerger de nouvelles têtes ?

On entend bruisser des choses, comme quoi des gens voudraient tenter ceci ou cela, c'est le cas à chaque élection. Mais il faut arrêter les conneries ! La politique, c'est trop sérieux pour avoir envie de se présenter juste comme ça contre quelqu'un. Les gens qui n'ont pas connu ce que représente la gestion d'une collectivité ne peuvent pas savoir à quoi correspond l'engagement sacerdotal d'un maire. Après, les opposants, je pense qu'on les connaît déjà. Je pense qu'on crée son opposition. Quand on est à l'écoute des gens, très sincèrement, contre quoi vous voulez vous opposer aujourd'hui ? En 2026, je pense qu'il y aura de moins en moins de candidats, et donc de moins en moins de candidats sérieux. J'entends beaucoup de maires me dire qu'ils ne continueront pas. Quant à moi, si je suis candidat et que je ne suis pas élu, c'est que tel était mon destin. 

Le compte rendu de la deuxième partie de cette interview consacrée aux projets de la ville d'Alès et de l'Agglomération sera à lire demain, mardi, sur Objectif Gard.

Propos recueillis par Corentin Migoule

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