Publié il y a 10 mois - Mise à jour le 20.06.2023 - François Desmeures - 4 min  - vu 819 fois

SANTÉ Pour la CGT, le système hospitalier gardois est au bord de la rupture

Les délégués CGT de tous les établissements de soins publics du Gard, réunis au centre hospitalier Alès-Cévennes

- François Desmeures

Alors que des fermetures de services d'urgence ont déjà sporadiquement eu lieu, faute de personnels, la CGT tire un bilan alarmant de la situation des établissements de soins de tout le département, de Nîmes à Alès, en passant par Bagnols, Uzès ou Le Vigan. 

Les délégués CGT de tous les établissements de soins publics du Gard, réunis au centre hospitalier Alès-Cévennes • François Desmeures

"Chaque jour, la situation se détériore un peu plus", énonce Coralie Jonget, de l'hôpital du Vigan, en entamant une conférence de presse aux sombres perspectives pour le service rendu aux patients. Manque de personnel, fermeture de lits, horaires de douze heures d'affilée, rappels systématiques ou presque sur les jours de repos... et des tensions de plus en plus fortes avec les malades ou leurs familles. "Pourra-t-on se faire soigner cet été dans le Gard ?", insiste Coralie Jonget, alors que l'État "annonce des miettes pour le système de santé" et que "le fonctionnement en dégradé devient le fonctionnement quotidien. Notre travail n'est plus une vocation mais une abnégation."

Des condtions de travail qui font mécaniquement augmenter l'absentéisme, "plus fort que la moyenne nationale". Et incitent à délaisser les métiers du soin. Autour du Vigan, Coralie Jonget prend l'exemple de "l'équipe mobile de soins palliatifs, dont le médecin est parti à la retraite et n'est remplacé qu'un seul jour par semaine". Quand ce ne sont pas les Ehpad qui n'arrivent pas à recruter. 

"On assiste à une maltraitance institutionnelle qui se matérialise par le sous-financement chronique des structures"

Lionel Petit, CGT du centre hospitalier d'Uzès

Dans un hôpital de proximité excentré comme l'est celui de Ponteils-et-Brésis, c'est le service pneumologie qui a entièrement fermé. "On a lutté pendant quatre ans pour que la prise en charge soit eficace, qu'on soit relais du centre 15, relais de nos collègues des urgences, explique Thomas Bernard pour la CGT du CH Ponteils. On a aussi lutté pour avoir un deuxième kiné, sinon comment faire de la rééducation ?" 

"Les conditions de travail changent sous l'effet du changement de profil des résidents, témoigne Lionel Petit, du centre hospitalier d'Uzès. On assiste aussi à une maltraitance institutionnelle qui se matérialise par le sous-financement chronique des structures. On se retrouve avec des contractuels, qui doivent venir combler un besoin ponctuel. Mais qui tiennent, en fait, des postes pérennes sans être titularisés." À Uzès, toujours, se trouve l'hôpital psychiatrique principal du département, le Mas Careiron, avec une antenne à Saint-Hippolyte-du-Fort. Philippe Alby, de la CGT, insiste : "Aujourd'hui, la psychiatrie agonise." Lui y voit des conséquences directes, comme le meurtre récent d'une infirmière à Reims, par un patient atteint de troubles mais non pris en charge. "Les familles trinquent", insiste le délégué CGT, qui souligne aussi les défaillances de personnel face à un métier devenu harassant, où les "ratios de prise en charge" changent. "On va accepter qu'un service de vingt lits n'ait plus qu'une seul infirmier !" Alors qu'entre dix et douze postes seraient vacants rien qu'à Uzès. 

C'est à Bagnols-sur-Cèze que les fermetures de services d'urgence ont commencé depuis ce début d'année. "On dégrade l'offre de soins, argumente Boris Vigne. La nuit, l'hôpital local ne compte qu'un seul médecin et un interne. Et plus qu'un interne si le médecin doit partir avec le Smur. Comment laisser un établissement de santé sans moyens ?" Le délégué CGT de l'hôpital de Bagnols y voit aussi une santé qui s'oriente vers les groupes privés, ravis de récupérer les pans rentables de l'hôpital public. Et ça ne s'arrange pas, à Alès : "On a une carence de médecins sur l'ensemble du service du centre hospitalier, explique Romain Sabran pour le centre Alès-Cévennes. Les services les plus impactés sont les urgences, la maternité, la cardiologie, la pneumologie et la psychiatrie." 

"Il va y avoir des morts !"

Alors que le bloc obstétrical a été fermé quelques temps au mois de mai, des femmes ont dû aller acccoucher à Nîmes. "Entre deux et quatre postes de gynécologues seraient nécessaires, estime Romain Sabran. Et six à huit médecins aux urgences pour une prise en charge correcte." Des urgences calibrées pour 25 000 passages par an et qui en recevraient 47 000. "À ce jour, vingt gardes ne sont pas encore couvertes pour l'été." Il faudrait donc choisir son jour pour faire appel aux urgences... Et si le CHU de Nîmes est un peu mieux doté en médecins, la CGT souhaite voir une organisation mutualisée à l'échelle du territoire. "On demande une meilleure organisation sur l'entraide médicale", enfonce Romain Sabran. La CGT préconise également des mesures de fonds, comme la suppression de la taxe sur les salaires, qui ne concerne que les hôpitaux publics, le passage à la semaine de quatre jours pour rendre à nouveau le métier attractif, la fin de Parcours Sup pour l'entrée en école d'infirmière ou encore la création de centres de santé communaux avec des médecins salariés. 

La CGT espère aussi un sursaut des usagers, afin qu'ils se rendent compte que c'est leur système de santé qui est en train de flancher. "Il va y avoir des morts", prophétise la CGT, en citant les différences de traitement des patients selon le lieu d'habitation. Des agents hospitaliers dénoncent, de surcroît, la double peine qui les voit être les premiers à souffrir du manque de personnel et à devoir écoper la colère et l'agressivité des usagers... pour cette même raison. 

François Desmeures

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