FAIT DU JOUR Rodilhan : Piqués au vif, les anti-corrida s'emparent de la ville
Piqués au vif. Oui parce que les anti-corrida ont vécu comme une provocation l'organisation du festival taurin à Rodilhan ce dimanche 27 octobre. Le souvenir de la manifestation à l'improviste lors de la finale de Graines de toros en 2011 et des violences qui en avaient découlé, est encore bien présent. Et sera à nouveau ravivé, mais cette fois-ci devant la Justice, au cours du premier trimestre 2014. "Le procès n'a pas encore eu lieu et malgré cela, Serge Reder (maire de Rodilhan), autorise et même encourage, l'organisation d'une corrida dans sa ville. C'est insupportable" lance Thierry Hély, porte-parole de la Fédération des Luttes pour l'Abolition des Corridas (FLAC). Alors, ce dimanche, les anti-corrida ont une nouvelle fois fait entendre leur voix de manière tout à fait officielle, puisque les manifestations de 10 heures et de 14 heures avaient été déclarées au préalable par l'organisation, le CRAC présidé par Jean-Pierre Garrigues, en préfecture du Gard. Leur projet était annoncé : s'approcher au plus près des arènes, voire s'y introduire. "Nous ferons tout pour empêcher le massacre cet après-midi, et nous assumerons", Jean-Pierre Garrigues avait prévenu.
Les fouilles de voitures et au corps passées, le défilé des 750 manifestants, mis à distance par le biais d'un arrêté municipal, a dû se stopper à 400 mètres des arènes. Enfin pas longtemps, puisque que le cortège de départ a très vite été éclaté en plusieurs groupes qui ont réussi à se rapprocher un peu, jusqu'à une centaine de mètres des arènes, pour finalement être bloqués par des barrières et quelques 268 gendarmes, CRS et policiers qui veillaient au grain, bombes lacrymogènes et flash-ball en main. Au cœur du centre-ville, c'était comme un No Man's Land, on entendait les anti s'égosillaient sans les voir tandis que les aficionados s'étaient réfugiés à l'intérieur même des arènes. C'est à 14 heures que les premiers débordements ont commencé, à seulement une heure de la corrida organisée par l'Association des Matadors de Toros Français et le Club Taurin "Toros y Caridad". "Je savais que venir à Rodilhan serait compliqué, mais je ne m'attendais pas à ce que ça suscite une telle hystérie" a commenté avec étonnement ou ironie, Lionel Rouff, alias Morenito de Nîmes, le président l'AMTF. Je pense que leur combat n'est pas si important que ça. Et je suis un peu déçu que nos impôts servent à payer un dispositif de sécurité si important."
Pas d'anti dans les arènes
Jets de pierres, de fumigènes, de pétards, de bouteilles d'eau etc, les anti ont voulu impressionner les aficionados qui avaient pour consigne de jouer la carte de l'ignorance. "J'appelle tout le monde à rester calme et à respecter l'autre", a précisé le maire de Rodilhan. Mais pas question pour lui de céder à la pression. "Encore une fois, les anti ne veulent pas que les aficionados vivent leur passion et veulent empêcher la corrida. Seule la loi peut abolir la corrida, et notre tradition se poursuivra jusque-là. Ce n'est pas un groupuscule qui va empêcher le spectacle." On le pensait pourtant car Jean-Pierre Garrigues avait laissé entendre qu'il y aurait cette année une nouvelle intrusion dans les arènes de Rodilhan. Aussi, dans les gradins, la tension était palpable, tout le monde se scrutait du coin de l’œil et les forces de l'ordre étaient sur le qui-vive. Le premier taureau est entré dans les arènes sans musique puisque la pena n'a pu passer le barrage des anti... On a attendu, attendu, ils ne sont jamais venus. "Nous avons essayé d'acheter des billets mais les aficionados ont très clairement souhaité rester entre eux. Soit disant la corrida se jouait à guichet fermé. C'est désolant " s'est exclamé le président du CRAC avant de poursuivre : "Je suis écœuré par le comportement des autorités. Je ne parle pas des gendarmes ou des CRS mais des politiciens qui soutiennent un maire qui contribue à dépenser de l'argent public, soit 50 000€ au frais de l'État, pour mettre en place un tel dispositif de sécurité. Mais depuis 2012, pour un maintien de l'ordre que l'on juge exorbitant, on a le droit de saisir le préfet pour demander à ce que ce soit la mairie qui paie et non l’État. Et cette démarche, nous allons la faire, parce que c'est le maire qui est responsable de tout aujourd'hui, il aurait dû annuler la corrida."
Une manifestation pas sans heurt
La manifestation qui s'est poursuivie jusqu'à la nuit tombée, ne s'est pas déroulée sans heurt. Des dizaines de manifestants sont tombées sous le jet des bombes lacrymogènes, trois autres, d'après Jean-Pierre Garrigues, ont été plus lourdement touchés par "des tirs de flash-ball et de grenades." Côté force de l'ordre, trois hommes ont aussi été blessés par des jets de projectile dont deux CRS et un gendarme. Emmanuel Durand, avocat au barreau de Nîmes mais aussi créateur de l'Institut international du droit taurin et membre de l'Observatoire nationale des Cultures Taurines, a aussi été pris à partie. Alors qu'il allait passer les barrières pour rejoindre les arènes où il devait présider la corrida, l'avocat à la cravate illustrée de taureaux a immédiatement attiré l'attention des anti-corrida. "Ils m'ont encerclé et ont fait sonner une corne de brume dans chacune de mes oreilles. J'ai été sonné, puis ils m'ont versé du colorant sur la tête." Grâce à l'intervention des gendarmes, Maître Emmanuel Durand, a tout de même pu gagner les arènes. Le visage nettoyé et sa mésaventure racontée, il a, comme il s'y était engagé, rejoint son siège de président. Mais dès demain, il portera plainte à la fois contre Jean-Pierre Garrigues, organisateur de la manifestation et donc responsable des actes des manifestants, mais aussi contre x. "Je ne sais pas qui m'a fait ça, mais il y aura certainement des vidéos ou des photos !"
Par ailleurs, au cours de la manifestation, deux personnes ont été placées en garde à vue, l'une pour port d'armes, deux couteaux avaient été découverts dans son véhicule lors de la fouille matinale, la deuxième pour dégradation de véhicule.
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Stéphanie MARIN
stephanie.marin@objectifgard.com
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