ALÈS Roberta Pouget, libraire : "J'ai été agressée à cause de Zemmour"
À l’occasion de la rentrée, Radio Grille Ouverte a lancé une émission mensuelle dédiée à l'actualité, avec un invité fil rouge interrogé par les médias locaux que sont RGO, Midi Libre, La Marseillaise, Radio Totem, et Objectif Gard. Jeudi dernier, c'est Roberta Pouget, directrice de Sauramps Cévennes, qui a ouvert la bal de "La Revue de presse", à l'occasion de la remise du Cabri d'Or.
Les journalistes : Quel est l'objectif du concours littéraire du Cabri d'Or, dont vous êtes partenaire?
Roberta Pouget : Il permet de montrer au territoire qu'il y a des ouvrages importants en Cévennes, ainsi que de valoriser les éditeurs. C'est pourquoi nous n'acceptons plus les livres auto-édités. La sélection est plus serrée et le travail des maisons est mis en avant. Notons toutefois que ce prix récompense avant tout la qualité du texte.
LJ : Quelle est la portée de ce prix? Permet-il aux auteurs de booster leurs ventes?
RP : Oui, il a apporte une véritable dynamique. L'après-midi même où le lauréat est annoncé, les lecteurs viennent en librairie pour le découvrir. Les gens le veulent et l'achètent.
LJ : Le livre de Valérie Trierweiler fait également partie de ceux qui marchent. Qu'en a-t-il été à Alès?
RP : On en a vendu 380 à Sauramps Cévennes, c'est énorme pour une ville comme Alès. Les lecteurs sont surtout des femmes bafouées ou des clients qui n'ont pas l'habitude des fréquenter les librairie. Je pense que cette publication est un régicide. Ca a fini d'achever le président de la République.
LJ : Vous avez pourtant décidé de le vendre, tout comme celui d'Eric Zemmour. Pourquoi?
RP : Ces livres nous permettent d'attirer les gens vers les librairies et donc de vendre les autres ouvrages. Ils peuvent donner envie de se mettre à la lecture. J'ai été agressée verbalement il y a quelques jours parce qu'on avait choisi de mettre en avant le texte de Zemmour. C'est également arrivé deux fois à Montpellier. Mais, comme je l'ai expliqué à la personne concernée, nous ne sommes pas des censeurs. Nous ne sommes pas là pour juger les lectures des clients. Par ailleurs, je ne pense que l'on puisse contrer Zemmour sans connaître le contenu précis de sa pensée et de ses propos.
LJ : Pourquoi l'avez vous mis en avant sur les étals?
RP : Nous sommes des vendeurs en librairie, nous ne devons se le cacher. Celles qui l'ont renié ont toutes fermé. Le merchandising est important, et il fait partie de la stratégie de vente. Tout comme les coffrets cadeaux. Les chiffres du texte de Valérie Trierweiler nous ont bien aidé cette année, même si ce n'est pas décisif dans notre chiffre d'affaires global.
LJ : Les rayons littératures des grandes surfaces représentent-elle un danger pour votre commerce?
RP : Non. Ce n'est pas une concurrence sérieuse. A Alès, nous avons le monopole mais je ne pense pas que ce soit une bonne chose. Il est important d'avoir le choix. En revanche, Amazon qui ne paie pas d'impôts en France et dont les salariés sont sous-payés, est un vrai danger.
LJ : Les librairies vont-elles si mal qu'on le dit?
RP : Oui. La baisse du pouvoir d'achat d'un côté, la crise du livre de l'autre, on observe une baisse depuis plusieurs années.
LJ : Internet est pourtant dans l'air du temps. Vous devrez vous y mettre...
RP : Oui, on tend vers cela. On peut d'ailleurs déjà commander en ligne sur notre site. Mais c'est tellement merveilleux d'avoir quelqu'un en face de soi. Notre métier est une relation avec l'autre et on observe toujours une demande importante d'être accompagné. Je pense qu'à Alès et Montpellier, on a encore de belles années devant nous.
LJ : L'envie de lire passe aussi par l'école et les enseignants. Que faites-vous de ce côté?
RP : Nous avons contacté tous les établissements d'Alès pour faire des projets ensemble. Que ce soit des ateliers, des concours, ou autre. Cinq seulement ont répondu à notre appel. L'immédiateté d'Amazon ne cesse de nous desservir. Pourtant, je reste optimiste. Les librairies sont des lieux d'échange et de liberté, et le papier a une sensualité que l'écran de la liseuse n'aura jamais. Quant aux livres de poche, ils ne coûtent que 6€, moins qu'un paquet de cigarette. Il suffit d'arrêter de fumer!
Ecouter l'émission diffusée le 24 octobre sur Radio Grille Ouverte
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