Publié il y a 8 ans - Mise à jour le 10.10.2015 - baptiste-manzinali - 3 min  - vu 195 fois

LES SPÉCIALISTES Fresque de l'école Prosper Mérimée : l'avocate Marie Christelle Goubet analyse la situation

Fresque de l'école Prosper Mérimée....sans le taureau et son torero. (Photo Baptiste Manzinali / Objectif Gard)

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Depuis que l'Alliance Anti-Corrida a demandé à l'Académie de Montpellier de faire retirer un dessin d'une fresque à l'école Prosper Mérimée, c'est l'emballement médiatique. D'un côté les pros s'insurgent contre la censure culturelle, de l'autre les antis crient au prosélytisme, et au milieu, des enfants dans la plus pure expression de leur innocence. Bâtonnière de l'ordre des avocats du barreau d'Alès, Marie Christelle Goubet a répondu à nos questions en toute objectivité et propose une analyse intéressante, en déplaise à certains.

Objectif Gard : Peut-on considérer un dessin réalisé par des enfants comme du prosélytisme ?

Marie Christelle Goubet : Ce dessin donne plutôt lieu à l'interrogation, il incite à la réflexion, à l'imagination et permet à des enfants de s'exprimer. On ne peut pas parler de prosélytisme, au contraire. Ce qui est important, dans le cadre scolaire, c'est le sens que l'on peut donner à ce dessin : parler, illustrer et décrire un phénomène de société relève de la compétence de l'école.

L'Académie avait-elle le droit de faire retirer ce dessin ?

La décision de l'Académie remet en cause deux choses : la liberté de l'enfant et la liberté de l'enseignement pédagogique. L'Académie a un rapport de coordination et peut intervenir dans le cadre pédagogique d'un enseignant, c'est un pouvoir qui lui est donné. Mais encore faut-il qu'elle ne soit pas proche de la censure. Faisons référence à l'article 13 de la convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 qui indique que l'enfant a le droit à la liberté d'expression. L'exercice de ce droit ne peut faire l'objet que des seuls restrictions qui sont rendus par la loi et il convient de faire respecter les droits et la liberté d'autrui, l'ordre et la moralité publique également. En l’espèce, on ne voit pas quelles droits ou quelles atteintes auraient pu être bafoué par ce dessin.

Le maire Jean Paul Fournier, avec les parents d'élèves, veulent que ce dessin soit réintégrer à la fresque. Est-ce possible ?

Cela doit faire l'objet d'une réunion avec l'Académie, il me semblerait normal sur un sujet aussi médiatique que la société s'interroge et discute pour éventuellement revenir en arrière. Je pense à cet enfant qui a dessiné et à qui on dit, "Ça, il faut le supprimer". C'est terrible et incompréhensible sur le plan pédagogique. Comment l'enseignant qui l'a guidé peut-il lui faire comprendre que ce qu'il a dessiné est désormais interdit ?

Les parents d'élèves peuvent-ils se retourner contre l'Académie ?

Ils peuvent se saisir du Défenseur des droits, une autorité indépendante qui peut faire un rapport sur l’application des droits de l'enfant, ou d'un médiateur de l'enseignement public. Il y a aussi des possibilités de médiation, que tout le monde se retrouve autour d'une table : la mairie, l'académie et les parents d’élèves, afin que l'on comprenne le sens de ce travail, en quoi il est nécessaire et quelle est sa qualité pédagogique. En cela, les Anti-corridas n'ont pas à intervenir dans la sphère de cette table, cela doit avoir lieu en dehors de tout groupe de pression. Si, au contraire, l'Académie a agit sous la pression des anti-corridas, cela devient alors un phénomène politique. Il faut dans ce cas là exercer des recours hiérarchique et interroger le ministère de l’Éducation Nationale. Les idées des Anti-corridas sont peut-être défendables, mais pas dans ces lieux.

 Baptiste Manzinali

Baptiste Manzinali

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