GARD La gauche peut-elle dépasser l'union de circonstance ?
Unie derrière Carole Delga pour contrer le FN, la gauche a conservé dimanche la Région. À travers la création de "Maisons de la gauche", le PS gardois souhaite renouer le dialogue avec ses partenaires (Front de Gauche-EELV…) pour sceller une véritable alliance, au-delà de celle dictée par les circonstances.
Victorieuse. Voilà ce qu'a été la gauche, dimanche, au soir du second tour des Régionales. Avec 44% des voix, la coalition PS-PRG-Front de Gauche-EELV a distancé le Front National d'une dizaine de points, lui permettant ainsi de conserver son bastion Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées. Pour autant, l'heure n'est pas à la fête. Le champagne n'a pas le même goût que celui de 81, lors de la victoire de Mitterrand à la Présidentielle ; les langues de belle-mère n'ont pas chanté comme en 97 pour la nomination de Jospin au poste de Premier ministre ; et les serpentins n'ont pas recouvert les sols des QG de campagne nîmois comme en 95 lorsque la gauche a récupéré Nîmes.
Des "Maisons de la gauche" pour le PS
Alors pourquoi ? Pourquoi telle victoire électorale est plus belle qu'une autre ? Pour le secrétaire départemental du PCF gardois Vincent Bouget : "l'union d'entre-deux-tours de la gauche a été une union de circonstance pour barrer la route au Front National. Ce n'était pas un ralliement sur un projet d'émancipation". Voir le Front National confirmer ses électeurs et même, en grappiller de nouveaux, est un échec pour la gauche. Cette situation sonne comme un mauvais présage : "Dans l'état actuel de la situation, la gauche a tout intérêt à partir sur une candidature unique pour 2017", analyse le premier fédéral PS du Gard Jean Denat. Dimanche soir après l'annonce des résultats, le socialiste a très vite embrayé sur la création d'une "Maison de la gauche" au premier trimestre 2016, en lieu et place de la fédération PS du Gard.
Ce concept a été lancé au niveau national par le Premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis. "L'objectif est d'ouvrir les portes du PS à la société civile et à ses partenaires pour permettre la bataille des idées", explique Jean Denat. Si le patron de Solférino n'a pas toujours brillé par ses propositions pour unir la gauche, celle-ci ne déplaît pas aux communistes : "je suis prêt à participer à tous les débats", répond Vincent Bouget qui glisse toutefois : "nous organisons depuis longtemps des discussions où nous convions le PS, comme à la Fête de Lézan ou avec les Amis de l'Huma".
Union de la gauche : sur quel programme ?
Aux régionales, l'union de Carole Delga et de Gérard Onesta n'était scellée sur aucune base programmatique. Les déclarations incantatoires sur leur capacité à travailler ensemble, une fois aux affaires, suffiront-elles encore longtemps à mobiliser leurs électeurs, déçus de François Hollande ? Pour le Front de Gauche, il n'y a pas de dichotomie entre la politique nationale et les enjeux locaux. Alors, entre la règle d'or budgétaire imposée par l'Europe, le CICE (crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi) ou la baisse des dotations aux collectivités… Une partie de la gauche se braque, attendant des preuves concrètes de la volonté du gouvernement d'unir la gauche. "Pour l'instant il n'y a rien", déplore le patron des communistes, "regardez, il n'y aura pas de coup de pouce pour le SMIC et on nous a récemment présenté la déchéance de la nationalité qui avait été mise en place sous Pétain !".
"En 1936, quand il a fallu s'allier pour lutter contre les ligues fascistes, le Front Populaire portait la semaine à 40 heures et les congés payés", poursuit, en bon professeur d'histoire-géo, Vincent Bouget. Les premières années de Mitterrand ont été marquées par la retraite à 60 ans, la semaine à 39 heures ou encore la cinquième semaine de congés payés. Idem pour Jospin, Premier ministre, qui a mis en place les 35 heures ou les emplois jeunes, à l'époque bien accueillis par le peuple de gauche… Même si parfois, l'état de grâce a été de courte durée, en raison notamment des crises économiques.
L'histoire semble donc se répéter. Ce qui diffère aujourd'hui pourrait être l'incapacité des partis de gauche à dialoguer pour proposer des mesures unificatrices et concrètes, qui mobiliseront davantage l'électorat. "Le PS reste au centre de la gauche et on ne fera jamais sans le PS", défend Jean Denat, candidat malheureux du canton de Vauvert. La réciproque est également vérifiée pour le Front de Gauche et EELV qui ont permis la victoire de Delga, dimanche. Il ne reste plus qu'à observer à présent comment l'idée de Solferino sera mise en musique sur le terrain.
Coralie Mollaret
*Le Front National confirme son score du premier tour en récoltant 35%.
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