Publié il y a 7 ans - Mise à jour le 29.12.2016 - anthony-maurin - 3 min  - vu 346 fois

NÎMES Lazare Bernard, Bernard Lazare, deux noms pour un homme d'exception

Bernard Lazare, journaliste dreyfusard née en 1865. (Photo Baptiste Manzinali / Objectif Gard).

Peu de Nîmois sont restés dans l'Histoire. Quelques uns sont même oubliés des grandes lignes de l'histoire de France... Bernard Lazare, de son vrai nom Lazare Bernard (1865-1903), est l'un d'entre eux.

Presque évidemment, il faut se replonger dans la France de la fin du 19ème siècle... Nîmes est une cité florissante ayant une économie riche. La famille Lazard (qui abandonnera ce nom pour y préférer celui de Bernard) s'est installée dans la cité des Antonin un siècle plus tôt. D'abord au début de la rue des Marchands, dans le quartier juif de la ville, la famille tient une boutique de textile (tailleur).

Quelques années passent et la famille prospère grâce à la mode vestimentaire. Si bien que la boutique déménage sur le luxueux boulevard Victor Hugo. Une consécration pour cette famille juive qui voit arriver la naissance d'un certain Lazare, Marcus, Manassé Bernard parmi ses rangs le 14 juin 1865. Dans ce groupe familial très pieux, le petit détone par son envie de liberté. Indépendant, raisonnable mais anarchiste sur les bords, le petit Lazare grandit à Nîmes et laisse le souvenir d'un pitchounet impétueux, pas comme les autres.

Lazare Bernard.

A ses 20 ans, il "monte à la capitale" comme on dit. Sur place, il se lie d'amitié avec des écrivains, des intellectuels et commence à écrire quelques articles avant de gravir un à un les échelons jusqu'à devenir directeur d'une revue politico-littéraire. Mais la véritable notoriété, Lazare la connaîtra sans trop la connaître et elle arrivera avec l'infâme affaire Dreyfus. De ce conflit social et politique qui scinde la France en deux, on ne retient que le nom d'Emile Zola comme chantre de la vérité. Pourtant, c'est bien à Lazare Bernard qui a parlé en premier de la supercherie... Et tant qu'on y est, le "J'accuse!", c'est aussi lui, Lazare Bernard, qui l'a écrit telle une anaphore dans sa toute première brochure qui démontait la condamnation de Dreyfus! Il a su filer le tuyau à Zola qui l'a filé à son tour à l'éternité d'un souvenir.

En effet, c'est plus de 2 ans avant Zola qu'il s'inquiète de l'histoire. Connaissant la plume, la verve et les idées acerbes du Nîmois, le directeur de la prison dans laquelle est enfermé le capitaine Alfred Dreyfus, avoue à la famille du prisonnier que seules 2 personnes en France peuvent faire changer les choses. Evidemment, le jeune Lazare, est l'une d'entre elles.

Convaincu par l'innocence de Dreyfus et connaissant mieux que quiconque l'histoire du peuple juif, Lazare Bernard ou Bernard Lazare comme on l'appelle, prend les manettes de la communication du camp Dreyfus et devient le premier dreyfusard. En 1895 il publie une première brochure (celle où il dit "J'accuse!") sur le sujet et la transmet à tout le gratin politique, scientifique et littéraire du grand Paris de l'époque. Les gens ne s'agitent guère... 2 ans plus tard, il renouvelle l'expérience et les positions judiciaires bougent un peu.

A l'est des Jardins de la Fontaine, près des sanitaire et surélevée, une plaque rappelle l'emplacement de l'ancien monument dédié à Lazare Bernard (Photo Anthony Maurin).

Mais Lazare ne s'arrête pas en si bon chemin. Pendant plusieurs années il collabore avec le journal L'Aurore et se fait respecter pour sa franchise, ses idées et la justesse de ses convictions. Zola n'y publiera son "J'accuse...!" qu'en 1898. Premier dreyfusard de France, cabochard mais attachant, le Nîmois meurt à l'âge de 38 ans sans bien ni fortune dans le quasi anonymat. Il a souhaité être enterré au cimetière du Montparnasse, sans cérémonie, ni fleur, ni parole à son égard.

A Nîmes, plusieurs plaques rappellent encore le digne combat mené par cet honorable homme. Aux Jardins de la Fontaine une stèle lui était dédiée mais les affres de la seconde guerre mondiale et les absurdités qui poursuivaient les juifs en ont eu raison... Un petit malin lui coupa le nez pour l'offrir en guise de presse-papier à Mauras et la stèle passa ensuite sous le feu de la dynamite avant que ces morceaux ne soient incorporés au monument pyramidal destiné aux morts pour la liberté sur l'avenue Jean Jaurès.

Anthony Maurin

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