PRÉSIDENTIELLE Patrick Malavieille (PCF) : « Virons d'abord Le Pen et ensuite, occupons-nous de Macron ! »
À La Grand-Combe, Jean-Luc Mélenchon s’est placé en tête des suffrages avec 37%. Marine Le Pen, elle, récolte 25%. Le maire PCF a fait son choix : dimanche, il votera Emmanuel Macron pour faire barrage au Front National. Explications.
Objectif Gard : Votre commune a majoritairement voté pour la France Insoumise. Comment l’expliquez-vous ?
Patrick Malavieille : On est une terre où les valeurs de gauche ont du sens. Aussi, il y a certains électeurs PS qui ont basculé au premier tour. À gauche, le vote utile a joué cette fois en faveur de Jean-Luc Mélenchon. Les Grand-Combiens se sont retrouvés sur des valeurs, des idées et des propositions. Je suis assez satisfait… On est loin devant le Front National.
« Nous n’avons pas baissé les bras ! »
Pensez-vous avoir contribué à ce score ? Vous avez été réélu dès le premier tour aux Municipales et aux Départementales. Votre voix compte pour les Grand-Combiens, non ?
Oh… J’ai parrainé la candidature de Jean-Luc Mélenchon, comme beaucoup d’élus communistes. Je veux le dire avec modestie : certaines personnes étaient un peu perdues. Elles hésitaient entre Mélenchon, Hamon et même Macron ! Elles m’ont demandé mon avis, je leur ai donné. En même temps, c’est normal quand on est maire d’une commune…
Une partie des électeurs PCF s'est retournée vers le FN. C’est le cas en Lorraine ou dans le Nord-Pas-de-Calais. A priori, la sociologie est semblable à celle de la Grand-Combe. Comment expliquez-vous qu'ici, la gauche résiste ?
Nous n’avons pas baissé les bras ! Exemple : sur la question des réfugiés syriens. Nous avons accueilli une famille de quatre personnes : quatre femmes, dont le père et le grand-père ont été assassinés à Alep. On m’a dit « fais attention », « ce n’est pas bien vu ». Moi, j’ai expliqué ce que cet accueil représente financièrement. J’ai aussi expliqué que, les mêmes qui étaient contre, étaient des descendants espagnols ou italiens qui avaient eux-mêmes été accueillis !
C'est donc dû à votre pédagogie ?
Oui, il faut sans cesse expliquer et surtout, ne pas baisser sur les valeurs. Expliquer les différences entre les personnes qui ne sont pas issues du même milieu, de la même culture. On a pas les mêmes habitudes : culinaires, vestimentaires. On a pas la même façon de tenir une maison… À la Grand-Combe, nous ne sommes pas riches et nous ne seront pas ruinés par l’accueil de cette famille. Je préfère perdre les élections que perdre mon âme !
« Je ne mets pas ces deux candidats sur un même pied d’égalité »
Marine Le Pen séduit une partie de la gauche, avec notamment sa volonté d’abroger la loi Travail. À La Grand-Combe, 25% d’électeurs ont voté pour elle. Comprenez-vous que certains puissent voter FN dimanche ?
Je les comprends. Mais je leur dis en même temps qu’il se trompent. Emmanuel Macron n’est pas mon candidat du premier tour. Je suis en désaccord avec lui sur beaucoup de points, notamment les questions économiques. Je le considère comme un adversaire politique. Mais Marine Le Pen, elle, c’est une ennemie de la République ! C’est elle que j’affronte d’abord. J’ai fondé ma pensée politique sur l’anti-fascisme, la lutte contre la xénophobie… Alors, bien sûr qu'il a des problèmes avec l'Europe, mais de là à proposer la fermeture des frontières, la sortie de l’euro… Avec le protectionisme à outrance, on va dans le mur. Je ne mets pas ces deux candidats sur un même pied d’égalité. C’est ce qui fonde mon vote au second tour.
Dimanche, vous voterez Emmanuel Macron ?
Je vais utiliser le bulletin de vote Macron qui est le seul à ma disposition pour barrer la route au FN. Ensuite, viendra le temps des élections Législatives, où on rebattra les cartes ! En ce sens, je regrette l’attitude de Jean-Luc Mélenchon (qui n’a pas dit explicitement pour qui il voterait, NDLR). Oui, on peut voter blanc ou s’abstenir, mais on sait que ça profite à Marine Le Pen qui a un électorat très mobilisé.
Mais certains électeurs ont en ras-le-bol. On leur demande à chaque fois de faire un Front Républicain et en retour, ils n’ont rien, aucune inflexion sur le programme.
Ce sont eux les plus difficiles à convaincre. Il y a effectivement des gens honnêtes auxquels c’est la deuxième fois qu’on demande de voter pour un candidat ne correspondant pas à leurs opinions. C’est un problème. C’est le problème de l’élection du Président de la République au suffrage universel. C’est la raison pour laquelle, je reviens à ce que le PCF proposait il y a de nombreuses années : l’élection du Président par le Parlement. Mais je leur dis : virons d'abord Le Pen et ensuite, occupons-nous de Macron aux Législatives.
Propos recueillis par Coralie Mollaret
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