Publié il y a 6 ans - Mise à jour le 05.01.2018 - anthony-maurin - 6 min  - vu 2163 fois

FAIT DU JOUR Commerce en centre-ville : redynamisation, ou pas…

À quelques jours de la fin des fêtes de fin d'année, impressions croisées sur les retombées commerciales.
(Photo Anthony Maurin).

Cette année, la municipalité nîmoise a multiplié les animations du centre ville pendant la période des fêtes, histoire d'attirer les chalands mais surtout les consommateurs dans l'Écusson, histoire de relancer le commerce en centre ville. Impressions à chaud des commerçants et point de vue de Sophie Roulle, adjointe déléguée à la redynamisation du centre ville.

L'anonymat est de mise...  Au vu des expériences passées, de nombreux commerçants souhaitent rester anonymes mais demeurent une source d'information fiable. Pourtant et on le sait, les Nîmois ont la fâcheuse tendance de crier au loup quand ils voient passer un chien affamé. Les commerçants se plaignent depuis des lustres, ça fait partie du folklore local. Cette année, pour la première fois depuis une décennie, les problèmes semblent sérieux.

Avant d'aller au cœur du sujet, le point positif qui se dégage du centre-ville en 2017, c'est sans nul doute la montée en puissance des Grands Jeux Romains. Sinon, la fréquentation touristique paraît en hausse mais les différences sont nettes entre les saisons et la fréquentation hors tourisme est quant à elle en chute libre depuis trois ans. "Bientôt, bien travailler en saison ne suffira pas pour faire vivre le centre ville à l'année! On va tout droit vers des commerces éphémères qui ouvriront de mai à octobre, cela semble être une volonté municipale. De plus, la fréquentation des ferias est en baisse," lâche un commerçant des boulevards.

Même constat du côté de la municipalité. Pas encore de chiffres sur les recettes des fêtes de fin d'année mais l'adjointe confirme : "les commerçants sont plutôt satisfaits de la période comprise entre la feria et le dernier jeudi de Nîmes. En revanche, en dehors de cette période, j'ai des échos négatifs".

Aux Halles, on observe une certaine stabilité dans le fonctionnement avec un taux de vacance qui est moins important que par le passé. Occupation, animation, fonctionnement… Dans ce secteur du commerce en centre-ville, les choses se sont apaisées et ont laissé place à la fréquentation. Les Halles sont un attrait touristique non négligeable, surtout depuis que les commerçants ouvrent même au mois d'août!

Mais ailleurs, comme dans les ruelles de l’Écusson, la pilule est dure à avaler... "Je n'ai jamais été dans la situation financière dans laquelle je me trouve actuellement. Cela fait trois mois que je suis constamment à -30% de mon chiffre habituel. Même si je pense diversifier mon offre pour stopper l'hémorragie, je n'ai jamais eu de problème de trésorerie... Pendant les fêtes, mon chiffre a été divisé par dix sur certains produits! Les consommateurs ne font plus d'achat compulsif" avoue un commerçant qui nourrit les Nîmois.

Et de reprendre, "Le problème? Pour moi il est long, a un accordéon au milieu et a des roues... Il s'appelle TCSP! Lui et ce tout qu'il a engendré... Parkings souterrains quasi obligatoires, stationnement de surface souvent impossible et répression implacable. C'est décourageant pour les clients qui doivent se poser de nombreuses questions avant de venir, alors que par le passé ils venaient par plaisir en centre-ville".

Sophie Roulle objecte : "Le problème du stationnement est un faux problème, quand on va faire ses courses dans une grande surface, il faut souvent se garer loin et marcher longtemps. Le stationnement existe en centre ville. Il est payant certes, mais il existe. Cette année, nous avons fait l'effort de mettre en place la gratuité tous les samedis de décembre sur les places de surface… "

Les enjeux? Le stationnement, les transports et la sécurité.

Certains commerces, notamment alimentaires, ne passent plus de commandes et font les fins de placards pour redonner un brin d'air à leur trésorerie. "Je ne sais plus quoi faire! Toute la journée je me demande comment m'en sortir et depuis trois mois, je ne me verse pas un centime. C'est dur de travailler sans sérénité et si ça continue comme ça, je ne donne pas cher de ma peau" ajoute son voisin.

On pourrait croire que le secteur alimentaire est le seul à être touché. Que nenni. Le vestimentaire l'est tout autant mais en réalité, ce sont à peu près tous les types de commerces qui constatent une baisse de leur chiffre d'affaires. "Pour moi c'est moins bien... Surtout les trois derniers mois de l'année! Devant mon magasin la Ville doit faire des travaux qui ne sont toujours pas faits. Les gens ont des problèmes de stationnement et on entend qu'un jardin sera réalisé derrière le Musée de la Romanité alors qu'un parking aurait été un aménagement plus censé!," note quant à lui un autre commerçant de l’Écusson.

Il est certain que pour venir passer un moment en ville, le parcours du combattant à de quoi décourager le consommateur lambda. Surtout quand ce dernier peut directement aller à l'extérieur de la cité, se garer gratuitement et consommer en toute quiétude. "La Coupole n'est plus la locomotive qu'elle était. Un simple coup de pinceau aurait peut-être suffi mais il fallait surtout des enseignes plus importantes! Le TCSP fait chier tout le monde, vide la ville plus qu'il ne la remplit et n'offre aucune amélioration à la situation. Pour 2017, je suis à -5% de mon chiffre d'affaires mais ma boutique est bien placée. Pour le seul mois de décembre, il me manque 80 clients par jour. Ces clients avaient un panier moyen de 8 euros..." note une commerçante d'une petite rue non loin des arènes.

Pour Sophie Roulle, la redynamisation passe par un travail concerté entre municipalité et commerçants. "On doit travailler ensemble, essayer de choses. L'expérience de cette année est un test. Ramener les gens en centre ville prendra du temps. Il faut installer des habitudes. "

La Ville, durant les fêtes de fin d'année et voyant les problèmes récurrents étouffer son centre, avait décidé de laisser le stationnement de surface gratuit les samedis. "C'est très bien mais pourquoi le parking de la CCI était fermé? Les animations? Je n'ai rien vu alors que c'était au programme. On est tous aux abois et il est plus facile de sortir de Nîmes que d'y entrer, je ne sais pas ce que la Mairie cherche à faire mais je constate que le phénomène d'insécurité est devenu oppressant. Cela freine, surtout en soirée, la venue des clients," avoue le propriétaire d'un commerce nocturne.

"Pour la première fois, il y avait un dispositif vraiment important déployé en centre ville", constate l'adjointe, "la maison du père Noël n'a pas désempli, plus de 800 personnes par jour. On avait placé les tickets du petit train dans les magasins pour que les gens y entrent. Après, on ne peut pas obliger les chalands à devenir des consommateurs, on a travaillé en concertation avec les commerçants, on va debriefer ensemble…  On aura les chiffres plus tard. Je ne vous cache pas que j'ai des retours négatifs." Mais elle affirme aussi que,  "certains ont cartonné comme Flying Tiger, la toute nouvelle boutique de la rue de l'Aspic qui a dépassé ses prévisions, ou encore Lacoste à La Coupole …"

Et malheur à celui qui évoque le stationnement de nuit en ville. "Ah non... Ne me parlez pas du stationnement ni du plan de circulation! C'est une aberration d'avoir coupé le tour des boulevards. Pour le stationnement de surface et les parkings souterrains, n'en parlons même pas. En plus de cela, il y a la réglementation comme les chartes qu'on nous impose. On nous demande beaucoup trop par rapport à ce qu'on gagne! Les élus ne sont pas à la hauteur des enjeux, j'aimerais qu'ils se rendent compte qu'on joue le jeu depuis des années... Après les travaux qui furent longs, l'absence de stationnement qui est gênante, la nouvelle charte qui est trop pointilleuse et qui a dépassé ses prévisions, les gobelets réutilisables... Voilà des contraintes qui nous font travailler plus pour gagner moins. De toutes ces concessions, aucun commerçant n'a récolté les fruits!" ajoute le commerçant.

Points communs et dissonances

En analysant un tantinet les propos tenus par les principaux intéressés, quelques points sont communs à bon nombre de commerces et font écho aux constatations de la municipalité. De mai à septembre, des Grands Jeux Romains à la Feria des Vendanges, personne ne peut se plaindre des retombées économiques liées à la saison. Aussi bien en animation qu'en fréquentation, les commerçants sont heureux d'être Nîmois. Par contre, dès qu'on s'aventure hors saison, on ressent une ville appauvrie, une clientèle qui dépense moins et un sentiment d'insécurité qui semble grandissant. Mais le plus douloureux des propos entendus est le suivant... "Je suis commerçant à Nîmes depuis longtemps mais s'il me fallait ouvrir un magasin aujourd'hui dans cette ville, je ne le ferais certainement pas!" 

Après le débriefing prévu à la fin du mois, nous aurons plus de précisions sur les retombées des fêtes. "Il faut sans cesse trouver des idées nouvelles et le faire ensemble," conclut Sophie Roulle …

(Photo Anthony Maurin).

Anthony Maurin

Actualités

Voir Plus

A la une

Voir Plus

En direct

Voir Plus

Studio