Publié il y a 5 ans - Mise à jour le 29.05.2018 - veronique-palomar - 6 min  - vu 2673 fois

FAIT DU JOUR Le nouveau contrôle technique : sécurité ou discrimination ?

Depuis le 20 mai dernier, les modalités du contrôle technique ont changé.
(Photo d'illustration)

Les petits budgets pourraient être contraints à l'abandon de leur véhicule faute de moyens …(photo d'illustration)

Depuis le 20 mais dernier, la législation sur le contrôle technique des véhicules a changé. Dix points de contrôle supplémentaires et des tarifs qui ont un peu augmenté.

Sur le papier, ces mesures semblent louables et militent en faveur d'une amélioration de la sécurité routière. Pourtant, nombre d'usagers et même certains professionnels semblent nuancer ces bonnes intentions. À force de durcir la législation on finit peut-être par tomber dans la répression et à priver, à terme, les petits budgets de leur véhicule.

Qu'est-ce qui a changé ?

Le nouveau contrôle technique est entré en application le 20 mai dernier. Certains redoutaient une ruée dans les centres de contrôle technique dans les semaines précédant cette entrée en vigueur. Crainte confirmée. Les professionnels assurent pourtant que les modifications ne sont pas si nombreuses. C'est la présentation qui a été totalement revue et un nombre de points contrôlés en hausse. Désormais, plus moyen d'échapper à grand-chose. Les défaillances dites mineures sont moins nombreuses (139 contre 230 pour les règles précédentes). En revanche, les défaillances majeures avec obligation de réparation dans un délai de deux mois suivi d'une validation via une contre-visite sont en augmentation : de 177 points à 340.

Les points vérifiés

Le contrôle technique comprenait jusqu'alors 123 vérifications d'organes contre 131 aujourd'hui. La vérification de ces pièces peut déboucher sur une liste de 600 défauts possibles contre 409 pour le contrôle technique actuel. Surtout, le nouveau contrôle technique comprend trois niveaux de défauts contre deux jusque-là.

Le premier se nomme "défaillance mineure" et comprend donc 139 points de contrôle qui n'appellent pas de contre-visite. Le second, appelé "défaillance majeure" en compte 340. Parmi les nouveaux points soumis à contre-visite, citons le mauvais état des balais d'essuie-glace, le lave-glace à sec (!), l'usure des disques de freins ou des plaquettes… Si un ou plusieurs points sont défaillants, la voiture sera soumise à contre-visite et le propriétaire aura deux mois pour réaliser les réparations. Le troisième dit,  "défaillance critique", comprend 127 points de contrôle. Leur non-validation entraîne l'immobilisation immédiate du véhicule. Ce peut être une fuite du liquide de frein, des pneus trop usés (pneus dits "lisses"), la corrosion du châssis… Mais aussi une fêlure sur le pare-brise gênant la visibilité du conducteur. Une vignette sera apposée sur le pare-brise et le propriétaire aura normalement deux mois de délais mais seulement 24 heures d'utilisation du véhicule pour faire réparer le problème.

Quand le passer ? Quelles règles  ? Quelles amendes ?

La vignette doit obligatoirement être collée sur le pare-brise (photo d'illustration)

En cas de contrôle conforme : Le contrôleur appose sur la carte grise un "timbre carte grise" qui indique la date limite de validité du visa. Il appose également à l'intérieur du véhicule une vignette qu'il aura poinçonnée afin d'indiquer le mois et l'année du prochain contrôle.

En cas de défauts constatés : Si le diagnostic a constaté des défauts, vous avez l'obligation d'effectuer, dans certains cas, les réparations nécessaires. L'obligation de réparer concerne plus de 50 points dont le système de freinage, l'éclairage, les pneumatiques, la suspension, la direction, les équipements de sécurité... Vous avez deux mois pour agir avant de vous soumettre à une contre-visite. Celle-ci doit également avoir lieu dans un centre de contrôle agréé (pas obligatoirement le même, NDLR).

Quand ? Un véhicule doit être soumis au contrôle technique dans les six mois qui précèdent la date du 4ème anniversaire de la mise en circulation. Ainsi, pour un véhicule mis en circulation le 1er juillet 2014, le contrôle technique devra être effectué entre le 1er janvier et le 30 juin 2018. Tous les contrôles sont valables deux ans. De nouveaux contrôles périodiques doivent donc être effectués tous les deux ans qui suivent le premier contrôle. De plus, en cas de vente d'un véhicule de plus de quatre ans, un contrôle technique doit être effectué et un procès-verbal de contrôle doit être remis à l'acquéreur. Celui-ci doit dater de moins de six mois pour qu'une nouvelle carte grise soit remise à l'acquéreur. Attention ! Si vous ne faites pas cette déclaration à temps, l'assureur est en droit de refuser de vous indemniser. Il devra néanmoins prouver que votre retard lui a causé un préjudice.

Les amendes :  un automobiliste qui n'aurait pas réparé le défaut critique remarqué au contrôle technique et qui continuerait de circuler s'expose à une amende de 135 euros. En cas d'accident, sa responsabilité est engagée et sa carte grise peut être retenue. Il dispose alors d'une semaine pour passer le contrôle technique. Sans preuve de ce contrôle, il ne peut pas obtenir de duplicata de la carte grise. De même en cas de vente, la préfecture refusera de délivrer une nouvelle carte grise à l'acquéreur.

Quels tarifs pour ma voiture ?

Après le contrôle, les réparations… (photo d'illustration)

Un centre agrée : Le contrôle doit obligatoirement être effectué dans un centre agréé par la DREAL (Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement placée sous l’autorité du préfet de région). Il existe 4 900 centres répartis sur toute la France. Le contrôle peut avoir lieu dans n'importe lequel d'entre eux et pas nécessairement dans le département d'immatriculation. Contrairement aux idées reçues, le prix du contrôle technique n'est pas défini par un décret de loi mais bel et bien fixé par les centres de contrôle eux-mêmes, qui sont des entreprises indépendantes soumises à un contrôle de l'État sur la conformité et pas sur les prix. Chaque centre peut donc appliquer son propre tarif. De même, en fonction du type de véhicule, le prix diffère.

Nouveau et plus cher. Avec un contrôle technique plus long, les centres de contrôle technique devraient faire monter les prix pour compenser ce temps supplémentaire passé sur chaque véhicule ainsi que l'acquisition de matériel dont ils ont obligatoirement dû se doter pour procéder aux nouvelles vérifications. Si l'on compte aujourd'hui entre 50 et 80 euros pour un contrôle technique en fonction des régions, le prix a grimpé en moyenne de 20% au minimum. Surtout la contre-visite, aujourd'hui gratuite dans une très large majorité des cas, est devenue payante dans la plupart des cas, son prix se situant entre la gratuité et 40 €.

Fourchettes de prix contrôle : Véhicule léger essence : de 49 € à 75 €; Véhicule léger diesel : de 49 € à 85 €; Véhicule utilitaire : de 50 € à 100 €; Véhicule GPL : de 79 € à 130 €; Poids lourd : de 79 € à 250 €

"Notre but c'est de faire de la prévention, j'ai l'impression que j'entre dans la répression"

Nicolas Canipel gère le centre Autour du boulevard Talabot à Nîmes (photo Véronique Palomar)

Nicolas Canipel gère un centre agréé de contrôle technique affilié à l'Automobile club de France à Nîmes. Pour lui le problème posé par le nouveau contrôle technique est d'ordre social. "Sur le papier, un contrôle technique conforme à la législation européenne, c'est bien," introduit-il. "Mais un Allemand n'a pas les moyens d'un Grec", modère le gérant. "La législation se durcit, contrôles et réparations. La facture s'alourdit considérablement pour les gens qui ont des petits budgets et sont contraints de rouler dans des véhicules de plus de 4 ans."

"Aujourd'hui tout est sensible, il va surtout falloir bien choisir son garage et faire très attention à l'entretien." D'autant plus, laisse entendre Nicolas Canivel, que l'électronique et le contrôle par des machines laisse et laissera de moins en moins de place à l'appréciation des professionnels. "On doit apprécier les situations et donner un coup de main aux gens qui n'ont pas les moyens", constate-t-il. Et il enfonce le clou, "sinon, ceux qui ont des salaires compris entre 1 200 et 1 500 € ne pourront plus se servir de leur voiture pour aller au travail".

Une situation, qui selon Nicolas Canivel n'est pas due à l'augmentation des prix du contrôle. "Nous avons augmenté nos prix de 10€ en dix ans. Ce n'est pas ce qui fait la différence, ce sont les réparations et l'entretien. On est obligé d'acheter du matériel pour rester en conformité et c'est en grande partie pour cela que nous sommes obligés d'augmenter nos tarifs. Mais ce n'est pas cela qui pèse dans balance. Notre but c'est de faire de la prévention, j'ai le sentiment que j'entre dans la répression", se désole  le spécialiste.

Côté usagers tous les sons de cloche vont dans le même sens : trop cher, trop contraignant… "À l'avenir", affirme Francine 49 ans, institutrice, "il faudra changer de voiture tous les 4 ans et vivre à crédit avec des formules "entretien compris". Je pense que c'est vers ce type de solution que veut nous faire pencher le gouvernement".

À qui profite la loi ? Il faudra du recul pour en juger. En attendant, il faut être vigilant et penser à l'entretien de son véhicule avant l'irréparable…

Véronique Palomar

Véronique Palomar

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