Publié il y a 5 ans - Mise à jour le 18.09.2018 - thierry-allard - 4 min  - vu 2057 fois

FAIT DU JOUR À Tavel, une association dénonce une urbanisation « anarchique »

Mondialement connu pour son vin rosé, le village de Tavel et ses près de 2 000 habitants est depuis quelques jours le théâtre d’une polémique sur son urbanisation.
Xavier Ternisien et Joëlle Mercier Jarboua, président et vice-présidente de Tavel avenir et patrimoine (Photo : Thierry Allard / Objectif Gard)

Le sujet a été mis sur le tapis par une toute nouvelle association, Tavel avenir et patrimoine, fondée le 31 août dernier en réaction à la construction d’un lotissement derrière le cimetière, à l’entrée du village.

« C’est le point de départ, explique Xavier Ternisien, président de l’association. Pour nous cette entrée est la carte de visite du village, avec la cave coopérative classée aux monuments historiques et donc cet assemblage hétéroclite de maisons avec des murs en parpaings pas enduits. » Un lotissement construit sur d’anciennes terres viticoles, ce que dénonce également l’association, qui compte « lutter contre l’étalement urbain, la dimension du village est suffisante, poursuit le président. Il faut également lutter contre le mitage du paysage et urbaniser les dents creuses, comme le veut la loi. »

Parmi ces dents creuses identifiés par la mairie, l’enclos des Cépages, un projet de lotissement à la sortie du village auquel le préfet du Gard s’est opposé par arrêté cet été pour des questions de risque d’inondation par ruissellement. « Un projet surdimensionné avec une quarantaine de lots (27 en réalité, ndlr) sur une parcelle minuscule », commente Xavier Ternisien, qui se félicite de la décision du préfet.

« C’est l’anarchie complète »

Le préfet qui est le véritable décisionnaire en matière d’urbanisme à Tavel : « la commune est soumise au RNU (le Règlement national de l’urbanisme, ndlr) car le Plan local de l’urbanisme (PLU, ndlr) n’est pas encore adopté, donc tous les projets sont soumis à l’avis conforme du préfet. Le préfet a la mainmise et s’appuie sur l’étude de zonage de l’inondation par ruissellement. Il peut demander des vides sanitaires plus hauts », explique-t-on du côté de la mairie de Tavel. « C’est l’anarchie complète », tranche Xavier Ternisien, dont l’association demande « un urbanisme cohérent. »

Car pour ce dernier, dont l’association se déclare apolitique et ni dans le camp de la majorité ni de l’opposition, « dans l’équipe municipale actuelle rien n’est pensé. Il n’y a pas de vision », notamment pour le centre-village. Un centre où, d’après l’association, « 8 à 10 % des maisons sont inoccupées. Au départ c’était pour loger les saisonniers, mais il y a de moins en moins de saisonniers donc les maisons se dégradent », affirme le président de l’association qui veut « éviter une évolution "à la Roquemaure". »

Le tout sans compter « plein de détails qui donnent à voir un village délaissé », poursuit la vice-présidente de l’association Joëlle Mercier Jarboua, avec des barrières différentes ou encore l’absence de voie cyclable. Alors l’association se voit comme « une vigie, mais en même temps une force de proposition pour faire émerger des bonnes idées qui peuvent contribuer à améliorer le cadre de vie. »

Les municipales en filigrane

Du côté de la mairie, on apprécie moyennement. « Cette association, nous l’avons découvert par voie de presse. Elle ne s’est jamais officiellement présentée en mairie », affirme le maire, Claude Philip. Sur le fond, la mairie martèle qu’elle ne peut finalement pas faire grand chose contre l’artificialisation des terres viticoles : « sur Tavel il y a des propriétaires de vignes qui décident d’arracher pour faire de la vente immobilière. Il est impossible de refuser. Quand on traverse la commune il y a des vignes de part et d’autres. Si on refuse la vente d’un terrain le propriétaire va faire un recours pour excès de pouvoir contre le maire. » Bref, circulez, y’a rien à voir : « les vignes font partie de l’enveloppe urbaine. » Et tant mieux si Tavel gagne des habitants, « c’est plutôt bon signe, c’est que la commune est attractive. » Quant à la question du centre-village, « depuis trois ans nous avons deux fleurs au concours national des Villes et villages fleuris, donc c’est bien que le centre n’est pas abandonné », élude la municipalité.

L’accusation d’absence de vision de la mairie est elle aussi balayée : « nous avons un programme pluriannuel d’investissements pour nos équipements, un projet de réfection de la traversée du village qui suivra celui des écoles et nous avons obtenu la réalisation d’un giratoire entre Tavel et Pujaut. On a une vision, mais elle est peut-être différente de celle de cette association. »

En creux, on pourrait voir dans cette polémique le coup d’envoi de la campagne des municipales de 2020 dans la commune. Du côté de Tavel avenir et patrimoine, on ne dit pas non. Les propos de Xavier Ternisien, qui évoque « une force de proposition, d’opposition aux projets les plus néfastes et d’information pour les Tavellois », sont un indice de ce qui pourrait à terme constituer une liste. « Vous savez, ça fait plusieurs fois qu’ils indiquent qu’ils sont apolitiques. Quand on l’est vraiment on ne le précise pas », grince le maire. « Les boules puantes vont arriver. On va nous accuser d’être de droite ou de gauche, mais nous ne sommes rien de tout ça, il s’agit d’une action citoyenne, répond Xavier Ternisien. On va prendre des coups mais on y va. »

D’autant que le sujet de l’urbanisme va revenir fréquemment sur la table dans les prochains mois : la mairie travaille à l’élaboration de son Plan local d’urbanisme, en estimant logiquement que « le RNU est une solution qui ne doit rester que transitoire, le PLU sera plus opportun. » Le précieux document ne devrait pas entrer en vigueur avant un an.

Thierry ALLARD

thierry.allard@objectifgard.com

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