Publié il y a 5 ans - Mise à jour le 17.12.2018 - veronique-palomar - 3 min  - vu 4308 fois

GILETS JAUNES Aimargues Acte 5

Depuis 4h, ce matin les gilets jaunes ont repris le rond-point de l'autoroute et sont déterminés.
Un graffeur est venu travailler au petit matin pour faire un cadeau de Noël aux résistants du rond-point (photo Véronique Camplan)

Fumigènes jaunes, drapeau français sur fond de ciel bleu : les Gilets jaunes ont désormais une signature visuelle  (photo Véronique Camplan)

Dans la nuit, Ils ont "repris" le rond-point d'Aimargues d'où ils avaient été expulsés par les forces de l'ordre mardi matin et s'organisent peu à peu pour instaurer un blocage total qu'ils ont l'intention de maintenir jusqu'à ce qu'on les entendent. À Aimargues aussi, l'acte V est bien engagé.

Ils se sont réunis dans la nuit. "C'était une réunion secrète, explique un gilet jaune d’Aimargues. Depuis l'expulsion, c'est difficile, on est surveillé, infiltré, balance son voisin. "Alors on ne fait même plus confiance au téléphone. On devient méfiant avec les gens". "On s'est fixé un rendez-vous en allant les uns chez les autres, à l'ancienne", pointe un autre. Une réunion clandestine, qui aurait réuni une centaine de personnes. Débat, vote et à l'unanimité la décision de reprendre le rond-point et de tenir bon. Tous les villages environnants sont représentés et se partagent le rond-point, Aimargues, Aigues-Vives, Aubais, Marsillagues, chacun a son territoire et l'endroit est bouclé.

Aimargues gilets jaunes Acte 5 : la vie s'organise. C'est bien d'avoir conservé un poste à pile, ça permet de glaner un peu d'info ça et là… (photo, Véronique Camplan)

En fin de matinée, il y a encore une partie de ceux qui étaient là à 4h. Un froid vif et un beau soleil, tandis que sur le rond-point la vie s'organise. Une jolie blonde est là de puis 4h, fatiguée mais souriante. Des palettes ont été apportée, les feux piquent les yeux mais réchauffent. Une dame demande timidement "je voudrais me joindre à vous mais je ne connais personne", un groupe souriant l'accueille.

Voitures et camionnettes commencent à arriver : la relève et ceux qui viennent installer de quoi tenir. "La résistance s'organise", sourit une jeune femme. Sur le rond-point, l'information manque sur ce qui se passe ailleurs. On s'interroge sur la rumeur qui dit que les forces de l'ordre empêchent les manifestants de monter à Paris, sur ce qui se passe dans le Nord du pays… Une ambulance arrive sirènes à fond, les gilets jaunes lui montrent comment franchir le rond point sans même avoir à ralentir. Les trains qui passent manifestent leur solidarité à grands coups d'avertisseurs sonores. "Ça fait chaud au cœur", commente un gilet jaune qui, comme les autres, a répondu par un grand signe à cette marque de sympathie.

La fin de l'invisibilité…

Ici, l'acte V doit être celui d'une réforme politique en profondeur. Il n'y a plus une revendication par gilet jaune, comme on pouvait l'avoir entendu, lu ou même constaté précédemment. Malgré des divergences politiques ou d'appartenance sociale, tous semblent maintenant s'exprimer d'une même voix. Un porte-parole déclare : "Nous sommes d'accord pour ne supporter aucune récupération politique ou syndicale. Ce que nous voulons obtenir, c'est une représentativité à l'assemblée après dissolution. Il faudra aussi supprimer tous les postes d'élus qui ne servent à rien."

Voilà pour l'essentiel. Puis il développe :  "Qu'ont fait nos élus depuis le début du mouvement ? Prenez les maires par exemple, on n'en a pas vu un seul sur le rond-point. Et pourtant ils ont été les premiers à pleurer sur la baisse des dotations de l'État. On aurait aimé qu'ils viennent nous voir. On attend toujours, s'exclame l'homme un tantinet énervé. Macron, n'a toujours pas compris. Pas un mot concernant la classe moyenne. Il ne sait pas ce que c'est. Eh bien, c'est celle qui se lève et va travailler tous les jours, paie tout et pour tout le monde, n'a droit à rien et ne s'en sort pas. Il parle encore de multiplier les aides alors que ce que veulent les Français qui travaillent c'est vivre décemment. On nous parle de fracture numérique, de fracture sociale, et on surfacture de 15 € les gens qui paient leur taxe foncière par chèque parce qu'ils n'ont pas utilisé la manière "dématérialisée". C'est une fracture tout court, renchérit son voisin. Celle des ruraux et des urbains est la plus nette. On en a assez d'être invisibles". 

Pendant ce temps, la vie s'organise peu à peu sur le rond-point. Les gilets jaunes craignent une intervention des forces de l'ordre mais ils affirment que rien ne fera fléchir leur détermination, si ce n'est une avancée de leurs revendications.

Véronique Palomar-Camplan

Véronique Palomar

A la une

Voir Plus

A la une

Voir Plus

En direct

Voir Plus

Studio