LE 7H50 du Préfet du Gard : « Ça aurait pu être bien pire... »
Moins nombreux, mais plus violents. C’est le constat que dresse le préfet du Gard, Didier Lauga, après l’acte IX des gilets jaunes.
Objectif Gard : Samedi, à Nîmes, plusieurs casseurs ont brisé des vitrines de banques, se sont attaqués au centre des impôts. Vous attendiez-vous à de telles exactions ?
Didier Lauga : Malheureusement oui. Tous les éléments allaient dans ce sens. En conférence de presse, la veille, j’avais dit que l’on s’attendait à quelque chose de violent. La manifestation s’est déroulée en deux temps : d’abord le matin, avec un millier de personnes et une deuxième vague l’après-midi, avec 500 personnes qui sont entrées dans le centre-ville. Ça a été très compliqué. J’ai suivi la manifestation sur les écrans. J’ai même vu des gilets jaunes filmer leurs camarades en train de casser la vitrine d’une banque.
Qui sont les casseurs ? Des gilets jaunes ou des fauteurs de trouble ?
Il a eu 10 interpellation. Sur ces 10 personnes, deux ont été remis en liberté pour des raisons médicales. Quand ils sont arrêtés, ils sortent de mon domaine de compétence. Je ne fais pas de langue de bois, mais je ne connais pas leurs antécédents.
La manifestation de samedi n’était pas déclarée en préfecture. Au vu de ce qui s’est passé, n’y-a-t-il pas une forme d’impuissance de l’État ?
On peut voir le verre à moitié plein ou à moitié vite. On a essayé de contenir les manifestants au maximum, dont certains venaient clairement pour casser et en découdre avec les forces de l’ordre. Il avait des masques, cagoules… Il y a eu des interpellations. Mais le droit de manifester est un droit constitutionnel. On est plutôt face à une volonté du législateur de maintenir un régime très libéral plutôt qu’à une impuissance de l’État.
Aujourd’hui, ne pas déclarer une manifestation est puni d’une contravention. Ce n’est pas avec ça que l’on va faire trembler les gens. Une sanction plus lourde, je pense que ça donnerait à réfléchir à certains. Je sais que c’est actuellement l’une des pistes à laquelle réfléchit le gouvernement.
Si c’était à refaire, vous seriez-vous préparé différemment ?
Oh, c’est toujours difficile de dire ça ! J’ai demandé des moyens, je les ai eu. Ceux qui ont subi des dommages diront que je suis trop optimiste, mais ça aurait pu être bien pire. Encore une fois, je renvoie aux images. Certains cherchaient l’incident et s’étaient équipés en conséquence. Je pense que le dispositif était adapté à la situation, compte tenu du déroulement de la journée.
Concernant les dégâts sur les agences bancaires. Qui va payer ?
Dans un premier temps, ce sont les assurances. Ensuite, dans le cadre d'une manifestation, il est toujours possible de se retourner contre les auteurs. Mais c’est toujours compliqué de les retrouver. On peut aussi poursuivre l’État, si on estime que les forces de l’ordre ont failli.
Après la trêve des confiseurs, les gilets jaunes semblent avoir repris du service. Vous attendez-vous à de nouveaux mouvements intensifs dans les semaines à venir ?
Tout ce que je vois, c’est que le nombre diminue. Dans le Gard, le 17 novembre, nous avions plusieurs milliers de manifestants dehors. Samedi, il y en avait 1 500 dans tout le Gard. En deux mois, l’effectif a fondu ! Pendant des semaines, nous avions des actions tous les jours : les ronds-points occupés, le carrefour d’Aimargues, le barrage de Dions, la rocade d’Alès… Désormais ça n’existe plus.
Évidement à la place, certains essaient de compenser par la violence. Je reste optimiste et j’espère que le grand débat convaincra certains de retourner sur le chemin de la démocratie. Si la faction violente ne se sent plus soutenue par l’opinion, ils seront moins nombreux et, petit à petit, le phénomène finira par se dissoudre.
Propos recueillis par Coralie Mollaret
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