Publié il y a 4 ans - Mise à jour le 24.04.2019 - veronique-palomar - 4 min  - vu 369 fois

MERCREDI CULTURE Écrivaine en résidence, Stéphanie Lopez raconte...

Rencontre en Petite Camargue avec un auteur en pleine création.
Stéphanie Lopez (Photo Sam Artigau)

La journée mondiale des droits d'auteurs, c'était il y a deux jours. L'occasion, d'une rencontre avec l'un d'eux, non pas pour la sortie d'un livre mais pendant son écriture.

Stéphanie Lopez vit à Manchester (Angleterre) mais c'est en Camargue qu'elle a décidé de se retirer pour entreprendre l'écriture d'un nouveau roman. Elle nous reçoit à la Laune, à côté de Vauvert, la résidence d'écriture de l'association Les Avocats du diable.

En Angleterre, on fait plus confiance aux gens qu'aux diplômes

Stéphanie Lopez a commencé son parcours par une carrière de journaliste musicale, autre passion qui guide ses pas. "Et puis un jour j'en ai eu marre d'écrire la carrière des autres. Cela générait de la frustration d une pas pouvoir aller au bout de mes envies. Alors j'ai décidé de partir pour Manchester, qui représente ce que je considère comme la Mecque des musiciens." 

Son truc, c'est le chant et l'écriture. S'expatrier lui donne des ailes, elle enseigne le français, "parce qu'en Angleterre, on fait plus confiance aux gens qu'aux diplômes",  manage un groupe et réalise un reportage sur la formation À certain ratio. Ses premières amours restant tout de même les mots, l'écrivaine déjà auteur de deux romans, La Tectonique des rêves et Kléptorama et d'un essai sur le groupe Dépêche Mode, nourrit l'envie d'un autre ouvrage.

"J'étais à Manchester quand j'ai eu connaissance de l'appel à projet, se souvient Stéphanie. J'ai envoyé ma candidature et tout collait, même la période. J'ai profité de cette opportunité luxueuse de m'y mettre sérieusement".  Écrire exige de la concentration, du temps et du calme, trois conditions que l'on a du mal à réunir au quotidien. Une résidence offre tout cela mais il faut faire des choix et  quelques sacrifices si l'on ne vit pas encore de sa plume.

Stéphanie Lopez (photo Véronique Camplan)

Cela fait bientôt deux mois que Stéphanie est à la Laune. "C'est la première fois que je viens en Camargue. j'ai découvert cette terre si plate, si sèche qui ne ressemble à aucune autre. C'est un endroit unique." À la LauneStéphanie dispose d'une pièce dont les fenêtres donnent sur la campagne environnante, d'une salle de bain et d'un kitchenette. Elle a aussi un vélo pour la promenade et une petite voiture à disposition pour pousser un peu plus loin et faire ses courses.

Ce n'est pas monastique mais l'idée de retraite est bien là. Les écrivains viennent seuls avec ce que Stéphanie appelle, "un contrat moral avec soi-même. En vérité, je n'ai de comptes à rendre qu'à moi-même mais je dois profiter au maximum de cette chance qui m'est donnée pour faire avancer mon projet. En plus, j'ai le soutien de la région Occitanie qui, grâce à l'appui des Avocats du diable, m'a octroyée une bourse d'écriture."

J'ai découvert cette terre si plate, si sèche…

Mais le processus de création n'est pas un exercice qui se plie facilement aux lois communes du travail. "J'écris par salves. Il y a des jours où ça fuse. Je peux rester sans bouger 5 heures d'affiliées à écrire, d'autres où rien ne vient." Chaque auteur a son rituel pour vaincre l'effrayante page blanche. Stéphanie, elle, se lève tôt et au saut du lit part courir une vingtaine de minutes. "Ça lance la journée, et ici, c'est tellement agréable. Maintenant j'ai des amis chevaux qui viennent me voir." Douche, café et c'est parti ! Enfin pas tout les jours. "" Des occupations qui laissent tout de même un goût un peu amer. Ce n'est pas bon pour le moral, alors j'ai écris un petit texte à l'usage de  ceux et  de celles qui viendront après moi."

Alors que la résidence s'achève, il est l'heure de faire le point. "J'ai commencé par écrire deux chansons pour Destijl, un groupe de Montpellier qui enregistre tous ses EP à Manchester et sort un nouvel album à la rentrée. Puis j'ai compilé toutes mes notes et écris 50 pages de mon prochain livre. En travaillant ici, je lui ai donné une autre direction que celle que j'avais en tête. Plus vivante, moins didactique. J'ai lancé la machine. Même si je ne sais pas encore où cela va m'emmener, je suis certaine maintenant que je vais aller au bout. Une chose est sûre, l'an prochain, j'aimerais bien venir le terminer ici."

Véronique Palomar Camplan

Pour en savoir plus, sur la Laune et sa résidence d'écriture : residence@avocatsdudiable.com

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L'info en plus

Résidus

Le cadeau de Stéphanie Lopez à ses successeurs à la résidence (et à vous aussi)

( photo F G )

C'est marrant ce pacte qu'on signe avec soi-même pour se domicilier dans l'écriture. On arrive en résidence avec la casquette "Auteur" qui nous ferait presque oublier combien on a du mal à se situer dans une CSP, et sous la visière l'horizon scintille de phrases sublimes qui tomberaient toutes seules , comme si la magie de la Laune allait faire le boulot à notre place. On rêve de fulgurances au clair de lune, de pensées construites comme le temple de Borobudur, du génie qu'on trouverait sous les pas d'un cheval. Puisque la poésie est là, il n'y a qu'à la tenir, n'est-ce pas ? Dans tes rêves l'auteur. Ici la terre si plate va s'occuper de tes hauteurs. Tu croyais que tu allais entrer comme ça avec ton gros baluchon de problèmes majuscules, et qu'après avoir tout bien résidé, tu sortirais légère comme la huppe, le sac poubelle de ta vie transmuté en chef d'œuvre manquer d'arbre ? Non, bien sûr, on en rigole : si tu tiens bon la barre, ce que tu as commencé ici, aboutira dans un an, deux ans, et comme la fin du monde a tout loisir de survenir avant, personne (sinon toi), ne t'en voudra de rester couchée dans l'herbe. Elles sont si belles ces prairie de narcisses au bord des étangs. Entends-tu la conversation des fauvettes ? Elle vaut bien la phrase suprême que tu contemples à l'horizon - cette ligne parfaite, insaisissable. Le ciel est une page blanche et les flamands volent dedans. Écoute-la, le cœur immense. La lune sait tout ce que tu ne saisis pas. Tu vis comme le cheval blanc se fout du clocher qui brûle ? Allez pose ta casquette. Sans la visière, l'horizon scintille de ta propre vérité. 

Véronique Palomar

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