Publié il y a 4 ans - Mise à jour le 04.05.2019 - abdel-samari - 4 min  - vu 858 fois

FAIT DU JOUR Michaël Couzigou, l'inventeur des Grands Jeux Romains

Mickaël Couzigou, ancien directeur de Culturespaces lève les bras au ciel, comme le public, à l'occasion des Grands Jeux Romains. Photo Tony Duret / Objectif Gard

Directeur nîmois de Culturespaces de 2005 à 2017, Michaël Couzigou gère aujourd’hui l’Atelier des lumières à Paris. Retour en arrière avec celui qui a créé et vu naître les Grands jeux Romains (GJR). Interview.

Objectif Gard : Pourquoi avez-vous créé les GJR ?

Michaël Couzigou : Je suis arrivé à Nîmes en 2005 quand Culturespaces a décroché la délégation de service public des monuments romains de la Ville. J’avais pour mission de réorganiser les visites, de créer un pass pour les trois monuments antiques et de remettre en mode tourisme la destination Nîmoise. En 2009, avec Éric Teyssier et Éric Dars, que je connaissais du théâtre antique d’Orange, on a réfléchi à un spectacle nocturne lié à l’histoire de Nîmes, à la romanité, l’été dans les arènes. L’exercice était trop complexe car nous étions néophytes et que les nocturnes demandaient trop de moyens.

Vous avez donc dû trouver autre chose…

C’est toujours avec les deux Éric, autour d’une bonne bouteille de Costières, qu’on s’est dit que les jeux romains se déroulaient à l’époque en journée. Pourquoi ne pas faire la même chose 2000 ans après ? Nous avons commencé à travailler là-dessus avec des reconstituteurs que nous connaissions et, grâce à des textes antiques précis, nous avons planté le décor en 122 après JC lors de la venue à Nîmes de l’empereur Hadrien. On a appelé ça les Grands jeux romains et ça a commencé en avril 2010.

Le fameux volcan islandais était en pleine irruption et le ciel était capricieux. C’est ça ?

Le climat faisait peur ! En plus, c’était tôt dans la saison mais nous avions réussi à réunir 18 000 spectateurs en deux jours dans les arènes. Une prouesse... On s’est dit que nous tenions un bon projet en y ajoutant les déambulations et le culte impérial en ville.

"Personne n'y croyait..."

Avez-vous dû vous battre pour imposer l’idée originale d’une reconstitution historique ?

Il a fallu convaincre car personne n’y croyait. On a montré l’intérêt du spectacle vivant et d'une romanité qui n’était pas poussiéreuse. Nous sommes montés en puissance petit à petit. Nous étions sans thématique mais à partir de 2012, avec la guerre de Troie, nous avons pris l’option de changer de thème chaque année. C’est d’ailleurs cette année-là que nous avons fait la connaissance de Yann Guerrero qui travaillait pour la Pégoulade et qui nous a construit le cheval de Troie à l’École nationale de police. Merci à eux de nous avoir accueillis !

Convaincre la direction de Culturepaces de l’avenir d’un tel projet n’a pas été trop compliqué ?

On a la chance d’avoir une direction qui sait faire confiance. M. Monnier, qui a été mis à contribution pour l’occasion, est passionné par le spectacle. Mais la grosse question tournait autour du budget. C’est un travail collectif mais il a adhéré d’emblée. On perdait de l’argent mais on croyait beaucoup au projet. On se disait qu’il fallait trois ou quatre ans pour que les GJR trouvent leur public. Aujourd’hui ils ont trouvé leur vitesse de croisière et on réinvestit l’argent dans la création de nouveaux décors, l’achat de matériel et de costumes. C’est un projet devenu viable.

Michael Couzigou en pleine action lors d'une précédente édition des Grands Jeux Romains (Photos Anthony Maurin).

La montée en puissance du spectacle réside dans les décors et les têtes d’affiche...

Nous avions fait venir des ours et des loups mais c’est en 2015 avec l’éléphant d’Hannibal que le spectacle est monté en gamme avec une vraie reconstitution, du texte, un scénario, une histoire, un jeu plus théâtralisé... L’année suivante, avec Cléopâtre, nous avons fabriqué les deux galères et nous avons fait trois représentations pour la première fois. On a continué en 2017 avec la reine celte Boudicca et Spartacus l’an passé. J’ai enclenché les préparatifs et Christophe Beth, le nouveau directeur, a produit le spectacle.

Dix ans après leurs débuts que représentent les GJR à Nîmes ?

Avec la tauromachie et les concerts, les GJR sont un pilier des arènes et des animations à Nîmes. Il y avait vraiment la place pour un spectacle mais ce n’est pas toujours le cas ailleurs. Par exemple, à Paris où je suis en poste maintenant, il n’y a rien autour de l’Histoire, du patrimoine et d’un spectacle vivant !

"J'ai des souvenirs extras"

Les GJR ont-ils changé quelque chose à Nîmes ?

On travaille avec Éric Teyssier, une sommité dans son domaine. Les choses sont à la fois sérieuses et ludiques. Il a installé cette fibre dans tout ce que l’on fait. Grâce à Culturespaces la valorisation de la romanité de Nîmes est actée. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. La romanité a toute sa place mais cela n’était pas évident il y a dix ans. Je pense que sans les GJR il n’y aurait pas eu de prise de conscience pour mettre la romanité en avant.

Le centre-ville attend les GJR maintenant ?

Audrey Carbo, Éric Rodier, Nicolas Delprat, tous les commerçants et leurs représentants, avaient envie de jouer le jeu car ils attendaient un autre public, plus familial, en début de saison. Cette fête fédère. Elle est consensuelle. Elle parle à tout le monde car les gens ont le temps de faire les choses. Et ça, ça change tout !

À titre personnel, quelle image retenez-vous de vos GJR ?

J’ai toujours un pincement au cœur. C’est extraordinaire d’avoir participé à ça et ça me manque. J’ai des souvenirs extras. Surtout quand on ouvre la porte du toril et qu’on voit tout ce monde dans les gradins… C’est une émotion unique, je la garde en moi. C’est quelque chose que j’ai dans mon cœur. Le public n’est pas dupe, il voit qu’on prend du plaisir. Il a été très indulgent au début mais il est certain que nous avons créé une chose d’exception à Nîmes.

Et quand vous étiez au cœur de la bataille ?

Je me suis costumé deux ans pour pouvoir faire des ajustements sur la piste sans être trop visible mais franchement ça n’était pas pratique. Je devais courir, beaucoup courir ! En dehors des arènes, autant dire qu’avec une cotte de mailles et des chaussures cloutées, sur la place du Marché je glissais et faisais la danseuse ! J’ai vite repris mes habits de civil mais participer au spectacle m’a beaucoup plu.

Propos recueillis par Anthony Maurin

Abdel Samari

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