Publié il y a 4 ans - Mise à jour le 27.12.2019 - anthony-maurin - 4 min  - vu 363 fois

FAIT DU JOUR Noël est mort, vive Noël !

Le 25 décembre passé, c'est l'heure, pour certains, de revendre les cadeaux... Un business qui prend de l'ampleur.
Des bijoux (Photo Anthony Maurin).

Des instruments de musique (Photo Anthony Maurin).

Dans une société consumériste, la valeur d'un cadeau n'a de sens que pour celui qui attache une importance à ce qui se cache derrière le papier coloré. Dans un monde où acheter c'est vivre, Noël est la fête de la renaissance humaine... Ou plutôt du déclin visible de la société.

Si par le passé offrir un cadeau avait un sens, aujourd'hui, nous l'avons un peu oublié. Les cadeaux sont devenus des objets plus ou moins personnalisés, des attentions plus ou moins déguisées mais des outils de communication forcenés.

Il est certain que par le passé, recevoir un cadeau donnait du sens à une relation, à un moment particulier dans la vie. L'avènement de la mondialisation et d'Internet font que ces sentiments ne sont plus tout à fait à l'ordre du jour. Oui, un cadeau n'est plus synonyme d'amour ou d'amitié et derrière les sourires de façade se trame une période bien plus sombre que les nuits d'hiver, celle de la revente des cadeaux...

Des montres (Photo Anthony Maurin).

"C'est vrai, je l'avoue mais je n'en suis pas fière...", lance Cindy sur le pas de la porte d'une boutique du centre-ville de Nîmes. La jeune femme est venue revendre quelques cadeaux faits par sa famille afin de se racheter une panoplie plus à son goût. "Les gens sont gentils, ils font des cadeaux, mais c'est rarement personnalisé et pour le coup ça ne me plaît pas. Je préfère revendre ce téléphone pour me faire une cagnotte et en acheter un meilleur dans quelques mois. Mon copain m'a aussi donné deux de ses cadeaux pour les revendre, il veut acheter une autre console", poursuit la Marguerittoise.

On ne connaît pas la crise

"Le lendemain de Noël, comme vous pouvez le voir, les gens n'ont plus aucun tabou ! Ils viennent très tôt nous revendre leurs cadeaux. Je pense que ça c'est toujours fait par le passé, mais c'était moins flagrant et moins rapide. On dirait que c'est devenu une course... Avec les soldes qui arrivent, ils veulent immédiatement pouvoir profiter des meilleures offres. Nous, de notre côté, nous sommes contents car le magasin fonctionne très bien ! ", assure un employé d'une boutique d'occasions.

Des jeux vidéos (Photo Anthony Maurin).

En jetant un coup d’œil alentour on remarque le nombre de cadeaux faits en série. "Nous ne sommes que le 26, il n'est que 15h et j'ai déjà racheté deux Iphone 7, deux ordinateurs portables, trois tablettes, des bijoux et quelque DVD. Les gens n'hésitent plus et me le disent directement. Ces cadeaux ne leur ont pas plu alors ils viennent les revendre et s'en rachèteront d'autres plus à leurs goût !", affirme un autre salarié d'une boutique à l'extérieur de la ville. Quid des cadeaux du cœur ?

Ils n'ont presque plus le droit d'exister. Aujourd'hui, mieux vaut faire deux cadeaux plutôt qu'un... C'est triste, surtout quand les deux cadeaux n'en font, en réalité, pas même un vrai ! Faire un cadeau pour faire un cadeau ne sert à rien. Autant prendre le temps de personnaliser ses achats et de tenter de toucher au cœur votre cible festive. Un cadeau, c'est aussi dire quelque chose.

Deux écoles, impolitesse ou délicatesse ?

"Si mes amis, mes enfants ou les personnes auxquelles je fais des cadeaux me font le coup de les revendre, je n'en ferais plus !", s'exclame un client qui a laissé traîner l'oreille. "Sérieusement, je sais que cela se fait de plus en plus, mais je ne comprends pas comment on peut revendre un cadeau. Il faut être très impoli, méchant même pour le faire !", désespère-t-il.

Des smartphones (Photo Anthony Maurin).

Des habits, des objets connectés, des livres, de l'informatique, des jouets, des jeux de société... Le lendemain de Noël, ce n'est pas au pied du sapin où l'on trouve le plus de cadeaux, c'est bel et bien sur Internet ou dans les boutiques d'objets d'occasion. D'une tristesse rare, ce sentiment d'impuissance face à un gaspillage qui n'en est pas met toujours un peu mal à l'aise.

"Mais non, il n'y a pas de honte à faire ça !", se rassure Nathalie, la quarantaine. "Si les gens qui vous font des cadeaux vous aiment vraiment, ils comprendront la revente. En fait, ils veulent avant tout faire plaisir. Leurs goûts ne sont pas les vôtres ? Rien de grave, revendez et faites-vous un beau cadeau ainsi, tout le monde sera content et la personne qui aura racheté votre cadeau sera elle aussi heureuse car elle l'aura acheté moins cher !" Un raisonnement imparable mais quand même...

Après les pains, la multiplications des jouets

"Ce que je fais avec cet  argent ?" Nathalie tend ses mains et montre quatre billets de 20 euros. "Je le mets dans une cagnotte pour partir en Angleterre avant l'été. Je n'ai pas tout vendu, simplement ce que je n'aime pas. Avec un peu de chance mon voyage sera un bon souvenir et cela sera grâce aux cadeaux revendus !" Tout va presque bien qui finit pratiquement pas trop mal.

Pour les plus timides, celles et ceux qui n'osent pas, qui ne veulent pas être vus en boutique, il y a l'option vente en ligne. Des sites sont spécialisés dans ce secteur commercial et vous attendent pour donner une seconde vie à vos cadeaux. "On a surtout des familles qui revendent les jouets des enfants car ils sont en double ou en triple. Je ne devrais pas le dire comme ça mais les gens font trop de cadeaux ! Il y a des paquets partout et les petits n'arrivent même plus à jouer avec ce qu'ils aiment tellement il y a de choses sous le sapin. La plupart du temps ils jouent avec le carton d'emballage plus longtemps qu'avec le jouet. Depuis dix ans, le lendemain de Noël, nous rachetons à bon prix des cadeaux neufs, même pas servis", avoue Frédéric, gérant d'une boutique éphémère.

À force de vouloir gâter leurs petits bouts, les adultes en perdent la notion de raison. Les cadeaux s'empilent, s'entassent, se multiplient à l'identique. La ligne d'horizon se bouche et le porte-monnaie déverse son flot de billets pour assouvir une course contre le temps, perdue d'avance. Noël et son esprit ne sont plus à la fête. Noël est mort, vive Noël !

Anthony Maurin

Anthony Maurin

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