Publié il y a 4 ans - Mise à jour le 22.02.2020 - corentin-corger - 5 min  - vu 1351 fois

FAIT DU JOUR Mohammad Sanad (USAM) : un prince égyptien devenu pharaon

Chez les pros à 15 ans en Égypte, Mohammad Sanad avait un rêve : s'imposer au hand en Europe. Il y est parvenu !
Mohammad Sanad a faim de buts et de titres avec l'USAM (Photo @the agency) - Matthieu Metivet The Agency

Mohammad Sanad sous le maillot de Zamalek en 2010 (Photo DR)

Arrivé à l'été 2017 à l'USAM, Mohammad Sanad réalise sa troisième saison sous le maillot vert. Le discret ailier s'est désormais libéré sur et en dehors du terrain. Avant le déplacement des Nîmois face à Holstebro (match à 15h), l'Égyptien raconte son parcours motivé par un rêve : "jouer au handball en Europe"

Avant de devenir le serial buteur de l'USAM, Mohammad Hisham Sanad est né au Caire, en Égypte, le 16 janvier 1991. Dans une famille où le sport occupe une place importante surtout le volley que le papa pratique par plaisir. Sa petite soeur elle, y fera même une carrière internationale. Après la natation et le squash, "Momo" découvre le handball vers ses 8 ans, poussé par son père. "Comme j'avais toujours une balle à la main, il m'a dit : "je pense que tu devrais essayer le hand." 

La découverte est rapidement concluante et cet enfant semble fait pour ce sport. À Héliopolis, club de la capitale égyptienne, il gravit tous les échelons avec une étonnante précocité. Un petit prince du hand qui intègre l'équipe première chez les seniors à seulement 15 ans ! "J'ai eu la chance de commencer dans un petit club et d'avoir un coach qui aimait bien les jeunes", commente t-il modestement. Une pépite qui ne tarde pas à attiser les convoitises. "En Égypte, ce n'est pas facile de vivre du handball. Il n'y a que deux ou trois clubs où tu peux en vivre".

Cela tombe bien c'est le plus important, Zamalek, qui le recrute en 2011. Pendant deux saisons, l'équipe de Sanad prend le pouvoir et rafle tout sur la scène nationale et continentale : championnat d'Égypte, une Ligue des Champions et deux Super Coupe d'Afrique. Avant le coup d'arrêt et de gros problèmes financiers pour le club phare des bords du Nil. Mohammad en profite pour tenter de concrétiser un rêve qui l'anime depuis le début de sa carrière : "Jouer au hand en Europe. Mais c'est difficile quand tu viens d'Égypte car les clubs hésitent et s'interrogent sur ton professionnalisme." 

Mohammad avec son épouse, Samia, et leur petite fille, Zeina (4 ans) (Photo Mohammad Sanad)

Des recherches vaines qui le contraignent à retourner dans son club formateur d'Héliopolis en 2013, l'obligeant également à occuper une autre activité à côté du handball. Ayant fait des études supérieures en architecture et en finances, il est embauché comme analyste financier. Mais "Momo" n'a qu'une obsession et ne lâche pas le morceau. "J'ai sollicité au moins une dizaine d'agents. Je leur ai envoyé des vidéos et des CV", se souvient l'ailier dont la démarche finit par payer.

Première expérience en Hongrie

En 2015, il reçoit une offre de Komló, promu en première division hongroise : "C'était un petit club mais je ne voulais pas regretter 10 ans après. Je n'avais rien à perdre alors j'ai pris le risque." L'ailier accepte, soutenu par sa famille et son épouse, Samia, qui le suit en terre magyare pendant un an. Un risque payant puisqu'il s'impose dans cette formation qui termine sixième du championnat. Une intégration facilitée, "car en Hongrie tout le monde parle anglais, ce n'est pas comme en France" constate-t-il en ayant fait l'amère expérience notamment avec son coéquipier actuel, Julien Rebichon. "Je parle anglais mais avec l'accent du Sud, on ne comprend pas", sourit le capitaine.

Franck Maurice et David Tebib venus accueillir lors de l'arrivée de "Momo "en gare de Nîmes en juillet 2017 (Photo USAM).

Après cette première expérience, le Cairote voit sa carrière européenne débuter et il est repéré par le club de la Rioja qui est en train de s'implanter parmi les plus grands en Espagne. Il découvre la Ligue des Champions européenne mais doit quitter le club à la fin de l'année encore à cause d'un problème financier.

"Le club a perdu son sponsor numéro 1 et dix joueurs sont partis, dont moi", explique l'intéressé. Son rêve éveillé de jouer en Europe ne peut pas s'arrêter en si bon chemin. Il part donc en quête d'un nouveau challenge sauf que personne ne se bouscule. "Zamalek m'appelait 10 fois par jour pour revenir mais je les faisais patienter au cas où car je ne voulais pas rentrer. Durant ces trois mois j'étais limite en dépression, jusqu'au 23 juin 2017."

Julien fier de lui après avoir entarté Momo dans les vestiaires du Parnasse (Photo Julien Rebichon)

Une date dont il se souvient parfaitement, jour où il signe son contrat avec l'USAM. "C'est le seul joueur que j'ai imposé à Franck (Maurice)", confie le président David Tebib. La recrue est rapidement intégrée dans l'effectif nîmois. Sur le terrain, où il dispute l'intégralité des journées de championnat lors de ses deux premières saisons et termine troisième meilleur réalisateur de Lidl Starligue la saison dernière.

Un buteur devenu le pharaon du Parnasse qui va aussi s'affirmer dans la vie de groupe où le timide Mohammad Sanad a bien changé. "Il m'a entarté avec de la crème Chantilly devant tout le groupe pour me souhaiter mon anniversaire après la victoire à Dunkerque", confie "Rebiche" qui l'a pris sous son aile et qui s'est évidemment vengé "d'un bon coup droit". Et ce pas plus tard que mercredi dernier après le succès face à Aix (30-28) dont le résultat est à voir ci-dessus.

"Ensemble, ils ne sont pas normaux"

Une joie quotidienne pour lui de faire partie de cette bande de joyeux lurons : "Ici c'est différent de tous les clubs de France, on blague plus", assure celui qui fricote avec le duo Gallego-Rebichon. "Ensemble, ils ne sont pas normaux", prévient-il. Une véritable amitié s'est tissée à tel point que le capitaine nîmois doit rejoindre son guide trilingue (arabe, anglais, français) cet été pour passer les vacances en Égypte.

Le hasard de la vie a même rapproché les deux ailiers qui vivent à 200 mètres l'un de l'autre. Ce qui n'est pas forcément une bonne idée. "On dînait tranquillement avec ma famille et il est entré par surprise dans la maison avec Teo (Teodor Paul) et Debs (Rémi Desbonnet) pour me dire de sortir avec eux", raconte Mohammad. "Il a fini son assiette et il est venu !", termine Julien.

Une bonne entente qui règne également en match avec leur geste devenu célèbre, intitulé le Sanachon. Un kung-fu réalisé d'aile en aile que les deux hommes affectionnent particulièrement. "C'est une question de regard", lâche seulement le gaucher de 29 ans qui ne veut pas dévoiler les secrets de fabrication de cette innovation "dont la marque est déposée et cotée en bourse", plaisante Julien Rebichon.

Si le pharaon a accompli son rêve de jouer en Europe, il n'est pas encore rassasié. Et pour arriver au sommet de la pyramide, celui qui a prolongé l'aventure usamiste jusqu'en 2023 veut gagner des titres : "Je suis ambitieux et pas encore satisfait." Des trophées qu'il a déjà soulevés en sélection remportant deux Championnats d'Afrique des Nations (2016 et 2020) faisant de ce handballeur, un prophète en son pays.

De Holstebro (Danemark), Corentin Corger

Corentin Corger

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