Publié il y a 4 ans - Mise à jour le 28.03.2020 - anthony-maurin - 4 min  - vu 2369 fois

FAIT DU JOUR Quand l'union de la table fait la force de l'esprit

Christelle Fresne et Guillaume Bescond (Photo DR).

En compagnie de l'Art des Choix, une boulangerie (Photo DR).

La " Bonne franquette " de Guillaume Bescond vient en aide à de nombreuses personnes en ces temps de crise. En effet, ce restaurateur autodidacte est au cœur d'un élan de générosité visant à préparer 300 plateaux repas tous les trois jours à destination du CHU de Nîmes.

"Je suis de Nages-et-Solorgues. J'ai 36 ans. Je suis le papa d'une petite fille de 4,5 ans et je suis restaurateur sans diplôme ", avoue Guillaume Bescond. Sans diplôme d'accord mais avec un cœur gros comme ça ! Celui qui a commencé par implanter un food-truck, une friterie très améliorée dans laquelle il ne travaille que des produits frais et de très bonne qualité, sur le parking de l'Intermarché de Caveirac, a poursuivi son aventure pour créé un point traiteur, chez lui, à Nages.

" Il y a deux ans j'ai monté ce point traiteur et aujourd'hui, avec la conjoncture, j'ai fermé le food-truck et les réservations pour notre aspect traiteur s'annulent toutes et c'est normal ! On s'assoit sur beaucoup d'argent. On a râlé mais nous n'étions pas seuls... ", ajoute le restaurateur qui met le sourire aux lèvres.

Pas seuls, c'est sûr.  " Les infirmières du CHU de Nîmes râlaient après la fermeture des cuisines centrales et nous sommes rentrés en contact avec Christelle Fresne, une infirmière en Réa 3 pour savoir si on pouvait aider, explique Guillaume Bescond. Ils étaient une soixantaine dans le service. J'avais de la nourriture que j'allais jeter et pour ne pas gâcher, j'ai fait un premier envoi de ma poche. "

De soixante, nous sommes aujourd'hui passés à 300. Tous les trois jours - il faut tout de même qu'il se repose, profite de sa famille et fasse la paperasse administrative du moment -, Guillaume livre ses 300 plateau-repas. Avant, il faisait le trajet jusqu'au CHU mais pour des raison évidentes de sécurité, il les apporte à présente chez Christelle qui les emmène sur son lieu de travail. Les services approvisionnés ? Celui des maladies infectieuses et tropicales, les urgences, la cardiologie, la cancérologie et la psychiatrie en plus de la réanimation 3...

De tomates en préparation (Photo DR).

Pour nourrir tout ce beau monde, Guillaume a dû partir à la chasse au produit. Ses restes ne suffisent plus, loin de là ! Et il faut aussi varier les plaisirs. Parmentier de brandade, gardiane, saumon, pâtes bolognaises, tarte aux pommes, viennoiseries... " Je prépare les plats à partir des produits que je récupère. Le boulanger nous fournit les viennoiseries et le pain. J'ai contacté Métro Caissargues qui nous donne la charcuterie, le fromage... La boucherie Daudé à Calvisson, un autre à La Calmette qui aujourd'hui me donne 10 kilos de poulet... J'ai aussi vu avec le primeur de Calvisson-Caveirac, le Petit verger de La Calmette et demain, le boulanger l'Art Des Choix doit nous faire des fougasses d'Aigues-Mortes et du pain. "

Mais d'autres arrivent et se joignent à l'élan de générosité initié par Guillaume Bescond. " Le Rucher du prieuré va nous fournir en huile d'olive, miel et pain d'épices ! Le petit boucher qui est en fait un magasin polyvalent à La Calmette s'arrange pour nous donner ce qu'il a et la boucherie Daudé vient de nous fournir 20 kilos de viande de taureau. Une boulangerie à Sommières doit me rappeler ", énumère Guillaume avant de rappeler celles et ceux restés dans l'ombre, Olivier, sa femme Ihsane et leurs filles laila, Célia et Marie-Claude.

Un parmentier de brandade (Photo DR).

Une livraison tous les trois jours, à ce rythme, on peut vite s'épuiser et épuiser les stocks. " Je peux tenir jusqu'à la fin ! Mais il me faut des matières premières... Parfois, j'achète de ma poche les plats en aluminium et d'autres choses mais je ne veux surtout pas d'argent ! Idem pour les personnes adorables qui veulent me donner de la nourriture. Pour de raisons d'hygiène nous ne pouvons pas les accepter mais s'ils ont du sec, emballé et non transformé, je prends ! Des pâtes, du riz, des épices et des plats... ", assure le restaurateur.

Pas là pour faire le buzz alors que des vies sont en jeu, Bescond et les siens savent qu'ils vivent dans un monde de cons qui sont souvent jaloux de ce type de générosité sans arrière-pensée. " Appelez-moi si vous êtes des éleveurs qui avez de la viande, des primeurs... Nous prenons tout ce qui ce mange mais je le transformerai pour en faire un plat qu'on donnera au personnel soignant qui en a besoin. "

Une tarte aux pommes (Photo DR).

Alors, quand on sait que la table et les repas qui vont avec sont un liant naturel de la cohésion humaine, on n'hésite pas et on avance. " C'est dans ces moments de vie que l'on se rend compte que les gens sous soudés. C'est malheureux de devoir en arriver là pour s'en rendre compte. On voit aussi ceux qui sont là juste pour se faire du fric et c'est un peu dégueulasse... Mais on voit bien plus de solidarité ! Ce que je retiens de cette aventure, c'est le sourire des infirmières et médecins qu'on livre. Ils mangent bien, ça leur fait chaud au cœur et à moi aussi ça me remonte le moral ! ", conclut sagement Guillaume Bescond, ancien sapeur-pompier et ambulancier au SMUR.

" Je connais la sensation du partage de la table dans ces moments. Les gardes sont longues, le travail est dur et le moral est primordial. Dans ces métiers, ce sont souvent des couples qui travaillent au même endroit donc l'un ne peut pas faire la cuisine pour l'autre et, la fatigue aidant, on peut vite être démoralisé alors nous sommes là pour éviter ces situations ! "

Anthony Maurin

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