Publié il y a 3 ans - Mise à jour le 31.08.2020 - abdel-samari - 6 min  - vu 16658 fois

FAIT DU JOUR Yvan Lachaud : "J'ai peur que l'histoire me donne raison"

Yvan Lachaud lors de notre entretien à la fin du mois d'août 2020 (Photo : AS/Objectif Gard)

L'ex-président de Nîmes métropole, Yvan Lachaud, prend la parole deux mois après sa défaite aux Municipales à Nîmes (Photo : AS/Objectif Gard)

Depuis le 28 juin dernier et ce soir du second tour des Municipales où il a compris qu'il ne serait pas maire de Nîmes, Yvan Lachaud est resté silencieux. Il a décidé de reprendre la parole ce lundi sur Objectif Gard pour la rentrée de notre journal. Interview.

Objectif Gard : Comment allez-vous depuis la fin du mois de juin ?

Yvan Lachaud : Je vais bien, je vous remercie. C'est sûr que j'ai passé un moment difficile surtout quand on a donné beaucoup de sa personne. Mais j'ai pris le temps de la réflexion et je dirais que c'est plus une déception pour ma ville que pour moi. Comme vous le savez, j'ai des occupations professionnelles importantes et, de ce point de vue là, ma motivation est intacte. Je suis déjà replongé dans ma passion et dans le travail.

Qu'avez-vous fait cet été ?

Je suis parti en vacances quinze jours en famille. J'ai fait de la randonnée et profité du bon temps avec mes proches.

Avec deux mois de recul, vous avez eu le temps de comprendre les raisons de votre défaite ?

C'était une élection très particulière dans un contexte inédit lié au covid-19. Rappelons que 70% des Nîmois ne se sont pas déplacés. Il y a après un système et un quadrillage de la ville par l'équipe municipale qu'il était difficile de combattre malgré la meilleure volonté. Une force de frappe installée depuis bien longtemps.

Quelle est votre part de responsabilité dans cette défaite ?

Ce sont les Nîmois qui ont répondu. J'ai fait des propositions mais ils ne m'ont pas mis en tête. Pourtant, je crois avoir toujours été clair. Au final, tout cela bien entendu n'est pas une satisfaction. Après, bien sûr qu'il y a eu des erreurs. Mais que fallait-il faire pour déloger Jean-Paul Fournier ? Pas grand chose malheureusement. Et je vois tous les jours, quand je me promène dans la ville, des nîmois qui m'arrêtent spontanément pour me dire qu'ils regrettent l'issue du vote. C'est dommage, c'est sûr.

"Nous avons fait du bon boulot"

Regrettez-vous votre alliance avec Daniel Richard ?

Non, je ne regrette rien. J'ai fait les choses naturellement avec conviction. Je peux vous assurer que j'aurais tenu parole car notre programme était parfaitement compatible avec une révolution écologique. Je n'ai pas trahi mon programme ni les électeurs, au contraire. J'ai formulé des propositions de bon sens pour l'avenir de la ville. Cela n'a pas apporté les fruits attendus.

Beaucoup dans votre camp regrettent que vous n'ayez pas exploité les six ans à l'Agglo de Nîmes pour préparer la victoire face à Jean-Paul Fournier. Qu'en pensez-vous ?

Mon objectif était de transformer l'agglomération et non pas de faire campagne pendant six ans. Et je crois que de ce point de vue là, nous avons fait du bon boulot. J'ai traité tous les dossiers urgents et pris des décisions majeures qui n'avaient pas été prise depuis des décennies. Tout cela avec une mairie de Nîmes qui ne nous a pas fait de cadeaux.

De quoi êtes-vous le plus fier pendant votre présidence ?

Beaucoup de choses ont été réalisées. Nous avons d'abord étendu la communauté d'agglomération avec l'intégration de plusieurs communes. Nous n'avons pas mis de fiscalité supplémentaire. On a baissé le prix de l'eau lors du changement de délégataire. Idem pour la collecte d'ordures ménagères. Et avec la nouvelle délégation de service public des transports, l'ensemble a permis l'économie de 150 millions d'euros sur huit ans. Un mot également sur l'emprunt toxique qui avait été contracté par mes prédecesseurs. J'ai réglé le problème et ce sont cinq millions d'euros économisés par la collectivité. Par ailleurs, nous avons mis en oeuvre un grand nombre de réalisations. Je pense à l'enseignement supérieur, la T2, l'ouverture de la nouvelle gare Nîmes-Pont du Gard avec une année d'avance. On a favorisé le développement harmonieux du territoire en donnant la possibilité aux communes de travailler sereinement. L'extension du Colisée a offert un confort de travail aux équipes et aux élus. D'ailleurs, je vous fais remarquer que ceux qui viennent de s'installer ne disent plus rien aujourd'hui sur le sujet. Enfin, les finances sont saines. Vous le voyez, il y a plus d'étudiants avec la transformation de l'EERIE, davantage de travail et d'emplois qu'il y a six ans avec le travail que nous avons opéré pour attirer des entreprises. C'est à mettre au crédit de la majorité communautaire et je voudrais leur rendre hommage.

Qu'est-ce que vous regrettez ? Qu'est-ce que vous avez raté en six ans ?

Je me suis fortement et personnellement impliqué dans toutes les décisions, je ne regrette donc rien. J'ai eu surtout à coeur de respecter toutes les sensibilités et tendances politiques. Je ne suis pas un homme de clan.

Votre mandat a donc été parfait ?

Ce n'est pas ce que je dis. Ce qui a pu me déranger, c'est la lourdeur administrative qui a souvent ralenti la mise en oeuvre des projets. Je pense par exemple aux zones d'activités où l'on aurait pu aller plus vite. Je tiens toutefois à souligner que le retard est aussi dû au combat permanent imposé par la ville de Nîmes qui a nuit souvent à l'efficacité. Prenons l'exemple de la communauté urbaine. Depuis trois ans, je la réclamais pour donner plus de moyens à Nîmes métropole. J'ai eu systématiquement un refus de la ville de Nîmes. C'est dommage pour le développement économique du territoire.

"Les magistrats font leur travail"

Êtes-vous inquiet de la publication du rapport de la Chambre régionale des comptes sur votre gestion de Nîmes métropole jusqu'en 2018 ?

Absolument pas. C'est un rapport classique, il n'y a rien d'exceptionnel. Il n'est pas du tout négatif comme certains ont voulu le faire croire. Il y a des recommandations, des attendus et c'est bien normal. Les magistrats font leur travail. Le sujet sera débattu lors du prochain conseil communautaire et j'aurai l'occasion de m'exprimer en son temps. En rappelant que j'ai géré les finances de la ville de Nîmes avec Jean-Paul Fournier pendant 17 ans...

Et les deux années qui ont suivi ? Il semblerait que l'Agglo soit très fortement endettée aujourd'hui. Et l'une des solutions envisagées par le nouveau président Franck Proust, c'est l'instauration de la taxe Gemapi (Taxe pour financer la compétence obligatoire en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, NDLR). Qu'en pensez-vous ?

Je ne suis pas étonné que Franck Proust envisage cette option car il n'aura pas le courage de se battre pour la mise en place d'une communauté urbaine qui permettrait d'éviter l'installation d'un impôt supplémentaire. Je rappelle que c'est 7 à 10 millions d'euros supplémentaires par an directement versé par l'État. Encore une fois c'est du bon sens. C'est à la collectivité de trouver des solutions et pas à travers des taxes payées par les Nîmois et les communes avoisinantes. Je m'y suis refusé pendant des années car les Français et les Nîmois en particulier en ont assez des taxes et impôts qui s'additionnent.

Franck Proust le désormais président de Nîmes métropole Photo Objectif Gard

Allez-vous démissionner de vos mandats à la Ville et à l'Agglo à l'issue des élections sénatoriales ?

Je n'ai pris aucune décision à ce stade. Je suis un homme constructif et je pourrais conserver un rôle de veilleur éclairé pour les Nîmois. Moi, aujourd'hui, j'ai peur pour ma ville,  j'ai peur que les choses n'avancent pas dans le bon sens. J'ai peur de la mainmise de l'administration. J'ai peur tout simplement que l'histoire me donne raison.

C'est terminé la politique ?

Je réfléchis. Vous savez, on apprend plus d'un échec que d'une réussite. Après, je suis et je reste un centriste invétéré et Nîmes a besoin d'une vision équilibrée des choix politiques.

Pour le moment, la vie politique active, c'est fini ?

Je n'ai pas dit cela. Je crois avoir été un président de Nîmes métropole au service de tous les élus du territoire. Une page se tourne aujourd'hui mais je resterai toujours au service des nîmois.

Qui pourrait incarner le centre demain à Nîmes ?

Je n'ai pas d'idée aujourd'hui.

"Je reste passionné par ma ville"

Pourriez-vous être candidat aux Législatives de 2022 sous les couleurs de La République en marche ?

Je ne suis pas dans ce type de réflexion aujourd'hui. Ce qui est certain, c'est que je reste passionné par ma ville et mon territoire, pour toujours. Ma plus grande déception serait de ne pas agir face à une équipe en place qui ne ferait pas bouger les choses. Laissons donc le temps au temps.

L'une de vos plus fidèles, Valérie Rouverand, pourrait briguer la direction de la République en marche dans le Gard. Est-ce que vous la soutiendrez ?

Valérie a de très bonnes capacités pour être une référence LREM efficace. Elle est posée, très bienveillante et compétente de surcroît. Bien sûr que je la soutiens.

Propos recueillis par Abdel Samari

Abdel Samari

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