GARD/HÉRAULT Le devenir du canal du Rhône à Sète en question
Il fait un peu moins de 100 kilomètres et relie Beaucaire à Sète (Hérault) depuis deux siècles : le canal du Rhône à Sète fait l’objet d’une grande concertation sur son devenir, dont le coup d’envoi a été donné ce jeudi au Pont du Gard.
Car la situation actuelle du canal du Rhône à Sète n’est pas fantastique. « L’État a commandité une étude car nous nous rendons compte d’une baisse du trafic fluvial alors que Voies navigables de France (qui exploite le canal, ndlr) a à sa charge des coûts de fonctionnement en forte hausse », explique François Lalanne, préfet chargé de la mission sur le canal du Rhône à Sète, ancien secrétaire général de la préfecture du Gard.
En effet, « il y a 100 000 tonnes de sédiments à évacuer pour assurer un tirant d’eau à trois mètres, et des berges qui s’érodent au fur et à mesure que nous essayons de les entretenir », poursuit François Lalanne. Tant et si bien que se pose désormais une question : « Avons-nous la capacité d’entretenir le canal ?, pose le préfet. C’est beaucoup plus coûteux que ce qui avait été imaginé en dix ou quinze ans. » Et se rajoute à cela le changement climatique, « qui fait que la voie d’eau est fortement sollicitée », note François Lalanne.
Trois scenarii principaux
Le canal est donc à la croisée des chemins, d’autant que des échéances capitales arrivent, avec le plan Rhône-Saône et le prochain contrat de plan État-Région 2021-2027, où seront décidés les futurs investissements. La concertation et le rendu des différents débats permettront d’éclairer le Gouvernement dans ses futures décisions concernant le canal. « Nous sommes à la veille des grands choix stratégiques », résume François Lalanne.
Pour ouvrir la réflexion, le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) a produit un rapport sorti ce jeudi sur le devenir du canal du Rhône à Sète. Le rapport, « foisonnant », selon le qualificatif du préfet Lalanne, propose cinq scenarii, dont trois principaux. « Le premier consiste en se conformer au plan de modernisation de 2010, avec une vision d’augmentation du trafic et des bateaux de 1 000, 1 800 et même 2 500 tonnes, mais dans ce cas il faut investir entre 110 et 225 millions d’euros », pose François Lalanne.
Le deuxième scénario, celui du statu-quo, consiste en « un maintien du trafic actuel, 400 000 tonnes les bonnes années, 250 000 les années basses, en s’appuyant également sur un trafic de niches, le vrac, les céréales et les déchets, à développer avec le port de Sète et la métropole de Montpellier », présente le préfet. Quant au troisième scénario, il suppose de faire « un canal dédié à la pêche, aux loisirs, à la promenade, avec le risque d’abandonner la vocation du fret », avance le préfet.
Une concertation large des élus et des citoyens
Parmi les autres scenarii, le 5 est plus radical : l’abandon du canal. « C’est un scénario terrible, celui du retour à la nature, mais est-il envisageable ? », pose François Lalanne. C’est que les enjeux autour du canal ne sont pas uniquement économiques, loin de là : « Il longe des zones sensibles exposées au risque inondation, à la submersion marine », rappelle le préfet, qui estime que le canal doit être « un bien pour l’environnement du territoire. »
Les cartes sont désormais sur la table. Il s’agit donc de questionner l’avenir de cet équipement qui traverse « deux départements, huit intercommunalités, quinze à vingt communes. Or chacun a sa vision du canal, il n’y a pas de vision d’ensemble. D’où l’idée de tenir cette grande conférence pour raisonner ensemble sur les usages actuels et futurs », explique François Lalanne.
La concertation va se matérialiser par une série de quatre ateliers : un sur les élus locaux, le 4 novembre au siège de la communauté de communes Beaucaire Terre d’Argence, un sur l’environnement le 6 novembre à Villeneuve-lès-Maguelone (Hérault), un sur le fret le 10 novembre à Sète (Hérault) et un dernier le 20 novembre sur le tourisme, à Saint-Gilles.
Parallèlement, une plateforme numérique va être mise en place pour que les citoyens contribuent à cette réflexion globale, et le rapport du CGEDD est en accès libre ici. Les réflexions seront communiquées au Gouvernement début 2021. Charge ensuite à lui de décider du devenir du canal.
Thierry ALLARD
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