Publié il y a 3 ans - Mise à jour le 21.10.2020 - philippe-gavillet-de-peney - 2 min  - vu 2379 fois

ÉDITORIAL Le corps en saignant

S'il y a bien quelque chose que l'onde de choc causée par l'ignominieux assassinat de Samuel Paty a  (re)mis en lumière c'est la méfiance, la fracture, voire le désamour qui se sont installés au fur et à mesure du temps entre le corps enseignant et une frange de la population française. Et il est déjà bien loin le temps où des petites filles au destin tout tracé se destinaient majoritairement à devenir "Maîtresse ! comme la Maîtresse". Figure tutélaire, dépositaire du savoir, l'enseignant disposait alors d'une aura que personne n'aurait osé contester. Depuis, bien des biberons ont coulé et les parents de la génération Françoise Dolto ont élevé leur progéniture dans le concept de l'enfant roi. Avant, pour nombre d'entre eux, de faire le plus souvent demi tour au milieu du gué et de capituler devant les exigences, les caprices et les cris des juvéniles tyrans domestiques - une génération spontanée de surdoués, à l'analyse de leurs géniteurs. Ces mêmes terreurs aux dents de lait qui montrent les crocs et remettent en cause l'autorité parentale et dans la foulée celle de leurs enseignants que l'on n'hésite plus à menacer et frapper. Régulièrement remis en cause dans leurs choix pédagogiques, parfois traînés en justice par des parents mécontents, les héritiers des Hussards noirs de la République en charge de dispenser l'instruction obligatoire, gratuite et laïque donnent parfois l'image d'une légion désabusée qui ne sait plus à quel saint se vouer et n'a malheureusement aucun levier à actionner pour inverser la vapeur si ce n'est son irréfragable engagement quotidien au service de sa vocation. Dommage et ils ne méritent pas ça. L'enseignement reste l'un des plus beaux métiers du monde, un véritable sacerdoce qui mérite un respect collégial, un ministère qui en aucun cas ne mérite qu'on le pratique le corps en saignant et l'âme en peine. Pas sûr qu'un hommage, fusse-t-il national, suffise à rendre tout ce qu'on lui doit et ce qu'on lui a pris à une corporation qui a pourtant - et continue- à beaucoup donner.

Philippe GAVILLET de PENEY

Philippe Gavillet de Peney

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