Publié il y a 3 ans - Mise à jour le 19.11.2020 - boris-de-la-cruz - 3 min  - vu 9806 fois

GARD Tentative d'assassinat : le long calvaire d'une dame de 91 ans

ASSISES. Cette nonagénaire avait été grièvement blessée en pleine nuit, alors qu'elle dormait dans son lit.
(Photo d'illustration)

"Venez, venez, venez, je n'ai plus de bras", hurle la vieille dame à la permanence de la société de télé assistance. Nous sommes le 7 novembre 2017, il est précisément 23h14 dans une discrète villa du petit village de Saint-Siffret.

La personne qui a eu le courage d'appuyer sur son bracelet d'alerte s'appelle Hélène Védrine, elle est âgée de 91 ans. Les propos enregistrés et diffusés hier à la barre de la cour d'assises du Gard ont jeté l'effroi dans la salle d'audience. On avait l'impression de revivre le calvaire de cette ancienne professeure de philosophie à la Sorbonne qui appelait à l'aide après qu'on lui a tiré dessus, chez elle, en pleine nuit et alors qu'elle dormait.

"Attendez madame, les pompiers vont arriver," essaie de rassurer la standardiste de la société de télé assistance qui comprend très rapidement que la vieille dame est dans une situation difficile et en panique. Hélène Védrine, entre deux propos prononcés dans la douleur, gémit et hurle. La standardiste contacte à 23h16 l'infirmière de la victime qui n'est pas joignable à cette heure. À 23h17, la société contacte la nièce de madame Védrine, qui figure sur la liste des proches à prévenir en cas de problème. La nièce répond : "Je ne peux pas y aller, je suis à 40 kilomètres."

"Alors que vous étiez en réalité à 12 kilomètres et que votre mari était parti juste avant vous venger, selon ses déclarations, et que vous le saviez armé", ajoute le président de la cour d'assises, Éric Emmanuelidis. "Là, il ne s'agissait pas de lui voler ses chéquiers mais de porter assistance à une vieille dame en souffrance", complète le magistrat faisant référence aux plaintes de madame Védrine à l'encontre de sa nièce et des condamnations de cette dernière pour "escroquerie".

D'ailleurs le mari accusé de tentative d'assassinat serait parti venger son épouse ce soir-là car la vieille tante avait déposé plainte contre sa nièce suite à des vols d'argent sur ses comptes. La nièce réplique au président pour se justifier de ne pas avoir fait le déplacement ce soir-là : "J'étais sous contrôle judiciaire, je ne pouvais pas sortir le soir."

Dans le box des accusés, l'époux de la nièce de la victime est mis en cause pour tentative d'assassinat. Le médecin légiste Mounir Benslima, qui a participé à la reconstitution en présence du mis en examen, trouvera les explications de l'accusé "incompatibles avec les constations médico-légales" concernant sa version le soir du drame. Un peu plus bas, deux jeunes hommes, les enfants, du couple, et une femme, la nièce de la victime comparaissent eux pour "abstention volontaire d'empêcher un crime ou un délit contre l'intégrité d'une personne".

Amputée du bras gauche

Un procès surprenant et émouvant avec un banc des parties civiles qui est vide. Hélène Védrine n'a pas eu d'enfant. Avant qu'on ne lui tire dessus, "elle était parfaitement lucide, consciente, autonome et active et ce drame va subitement et immédiatement changer sa vie. Elle va devenir une autre personne, insiste le président Emmanuelidis. Un véritable naufrage intellectuel attribué à ce coup de feu."

Elle lisait de nombreux journaux, s'intéressait à la politique et aux grands débats de société, aimait écrire, mais c'était aussi une dame moderne qui utilisait tous les jours son ordinateur et Internet. Elle faisait une heure de grec par jour, histoire de ne pas oublier ses références. En quelques minutes cette femme brillante va devenir un légume expliquera à la barre le médecin légiste, le docteur Mounir Benslima, chef de l'unité de médecine légale du CHU de Nîmes.

Transférée aux urgences du CHU de Nîmes, la victime "va subir six opérations en un mois, et sera amputée d'une main, puis ensuite de tout le membre supérieur gauche", résume le docteur Benslima. Hélène Védrine n'est jamais rentrée chez elle. Opérée, longuement hospitalisée, puis placée en EHPAD, elle est décédée il y a un an, avant le procès renvoyant ses proches devant la juridiction criminelle. Le verdict est attendu jeudi soir ou vendredi.

Boris De la Cruz

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