
La ministre Moreno fait son cinéma. Elle l'avait assuré dans nos colonnes : "Il s’agit d’un temps fort pour mon ministère." Ce jeudi, la venue dans le Gard de la ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l'Égalité des chances, Élisabeth Moreno, a permis à quelques rares témoins privilégiés, journalistes et élus, de s'offrir en exclusivité un nouvel épisode pas piqué des hannetons de la désormais institutionnalisée politique-spectacle étatique.
Inscrite dans le cadre de la tenue, mardi dernier, du premier comité de suivi du "Plan national d’actions pour l’égalité des droits, contre la haine et les discriminations anti-LGBT+ 2020-2023", la visite officielle a vite tourné à la caricature. Accueillie comme une star sous l'oeil des caméras et des appareils photos d'une presse empressée (les nôtres y compris !), couverte de cadeaux, volant volontiers la vedette aux acteurs, le héraut désigné de la cause des femmes et de la communauté LGBTQIA+ - cet horrible sigle fourre-tout abscons aux allures de formule scientifique (dis)qualifie les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, trans, queers, intersexes et asexuelles -, a passé une bonne partie de sa visite officielle à Saint-Laurent-d'Aigouse, au château de Calvières, dans les coulisses de la série de TF1 Ici tout commence.
Endossant les attitudes et les mimiques de la groupie de base, la ministre fan a pu échanger tout à loisir avec les comédiens de ce sitcom à la sauce gauloise qui réunit chaque soir 4 millions de Français derrière leur petit écran et qui aborde ces questions de société. Calvières n'a rien eu d'un calvaire pour l'ancienne directrice commerciale Europe de l'entreprise chinoise de matériel informatique Lenovo, surprise sur le plateau de tournage à s'ébaubir de tout et à s'amuser comme une gamine de façon un peu puérile - "Je peux dire moteur ?".
Tout ça n'est pas bien grave mais montre toutefois les limites étriquées de l'action et de la communication d'un ministère pas franchement à la hauteur des enjeux et dont on serait en droit d'attendre autre chose que ces démonstrations pathétiques et l'utilisation populiste d'un feuilleton populaire. Et ce même si Élisabeth Moreno martèle que "la fiction et les médias ont un rôle à jouer pour faire évoluer les mentalités à l'égard des LGBT+", on continuera à penser que le sujet est bien trop important pour le confier à un quelconque ministère.
Sans compter que - tous bisexuels, homosexuels ou lesbiennes (*) - de nombreuses personnalités ayant marqué l'Histoire, la science, les arts, la musique et la littérature restent, de part leur talent, leur charisme ou leur œuvre, les plus convaincants émissaires d'une communauté qui n'a pas besoin d'ambassadeurs de cette farine pour faire évoluer les mentalités vers la tolérance universelle et le respect auquel chacun a droit. Prochaine étape encore plus "bling bling " et décalée : le jour où pour se mettre en scène la ministre se toquera de monter sur le char de tête pour animer la joyeuse célébration de la confraternelle et polychrome Gay Pride... Chiche !
* La poétesse grecque Sappho, Aristote, Alexandre le Grand, Léonard de Vinci, le roi d'Angleterre Richard cœur de lion, William Shakespeare, Louis XIII, Frédéric II de Prusse, Frédéric Chopin, Gustave Flaubert, Verlaine et son ami Rimbaud, Marcel Proust, qui entretenait une liaison avec Lucien Daudet, le fils du Nîmois Alphonse, Colette, le peintre Francis Bacon, Eleanor Roosevelt, Rudyard Kipling, James Dean, François Sagan, David Bowie ou Sonia Rykiel (liste non exhaustive)...


Philippe GAVILLET de PENEY