Publié il y a 2 ans - Mise à jour le 06.01.2022 - stephanie-marin - 5 min  - vu 892 fois

FAIT DU JOUR Hausse des arrêts maladies : comment les entreprises gardoises s'organisent-elles ?

Photo via MaxPPP - BELPRESS/MAXPPP

Les entreprises font face à une hausse de l'absentéisme maladie. Dans son baromètre annuel publié le 6 décembre dernier, Malakoff Humanis indique que 38% des salariés ont posé un arrêt de travail maladie en 2021 contre 36% l'année précédente. Les principaux motifs concernent la maladie ordinaire pour 22% des arrêts prescrits, les troubles musculosquelettiques (18%), les accidents ou traumatismes (16%) et les troubles psychologiques (15%). La part des arrêts maladie liés au covid a quant à elle doublé, passant de 6% en 2020 à 12% en 2021.

Dans ce contexte, comment les entreprises en France, et dans le Gard plus particulièrement puisque c'est ce qui nous concerne, s'organisent-elles ? D'autant qu'aucun secteur n'est épargné même si certains sont plus touchés que d'autres. Toujours selon le baromètre annuel présenté par Malakoff Humanis, le commerce a enregistré une hausse de six points entre 2020 et 2021 (35%) notamment portée par le covid et les troubles psychologiques, de cinq points pour l'industrie (36%) et de trois points dans les services (38%).

Le télétravail, placé au coeur de la stratégie de lutte contre l'absentéisme par le Gouvernement depuis quelques mois, a été rendu obligatoire à compter du lundi 3 janvier et ce pour trois semaines. Mais comment l'exécutif compte-t-il contrôler l'application de cette mesure ? Et comment faire quand le télétravail est impossible ?

Dans les boulangeries-pâtisseries la question ne peut se poser. Selon Christophe Hardy, président de l'Union des maîtres artisans boulangers du Gard, ces arrêts maladie, sans qu'il ne les remette en cause, peuvent avoir des conséquences dramatiques pour certaines entreprises, faisant grandir la menace d'une fermeture. Et cela ne date pas de la crise sanitaire, et selon lui, "le covid vient en supplément. Pendant les fêtes de fin d'année, trois artisans m'ont contacté pour m'informer de cas de covid et me demander des les aider pour recruter. Un à Beaucaire n'a pas réussi à remplacer son boulanger en arrêt maladie. Il a dû tout faire lui-même et passer une nuit blanche pour honorer toutes ses commandes."

Dans la boulangerie de Christophe Hardy, "Au Moulin à Pains" à Junas bientôt reprise par Garric Coursier et Nathalie Sanchis, déjà gérants de « Ma p’tite Boulange » à Mus. (Photo d'archives : S.Ma/ObjectifGard)

Car pour lui le fond du problème, ce ne sont pas les arrêts maladie, mais la pénurie de main d'oeuvre qui s'est d'autant plus intensifiée ces deux dernières années. "D'après le président de la confédération nationale, il y aurait 9 000 postes à pourvoir dans le secteur en France, ce qui ferait environ 100 postes dans le département. Et franchement, je trouve ça très cohérent", s'inquiète le président de l'UMAB 30.

Les contraintes du métier freineraient les candidats, mais n'étant pas nouvelles, le boulanger basé à Junas apporte d'autres arguments : "La relation au travail a changé et depuis la crise sanitaire on sent que les gens n'ont plus envie de sacrifier leur vie personnelle. Sauf que les générations précédentes n'avaient pas ce choix-là." Un constat partagé par Anne-Marie Dautherives, secrétaire à Confédération nationale de l'artisanat des métiers et des services du Gard.

"Qui aurait cru qu'un jour j'interdirais aux gens de boire un café à deux ?"

Autre secteur : le nucléaire et la recherche. Au CEA Marcoule (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives), ce sont 3 000 personnes qui sont employées. Alors l'absentéisme lié au virus est une inquiétude. Une vigilance accrue est déployée avec la possibilité de se faire vacciner et tester au sein même du site industriel pour endiguer toute propagation. Toute une série de mesures est appliquée pour éviter les contaminations : "On a adapté la cantine avec des jauges réduites et annulé tous les événements festifs. Pas de repas de services non plus pour Noël. Qui aurait cru qu'un jour j'interdirais aux gens de boire un café à deux ? Je me haïs moi-même... Mais on est bien obligé de faire cela", déplore Michel Bedoucha, directeur du centre CEA Marcoule.

Michel Bedoucha est le nouveau directeur du CEA de Marcoule. (photo DR)

Il faut dire que dans certains services opérationnels, un cluster serait très compliqué à gérer. Certaines installations ont besoin d'une surveillance permanente. Alors la direction met un point d'honneur à ce que les gestes barrières, la distanciation physique et le port du masque soient respectés à la lettre. Pour autant, le CEA comme ailleurs, n'est pas épargné par la hausse des cas de covid-19. "Début décembre, on avait entre zéro et deux cas de personnes positives. C'est reparti fin décembre et là, on est à 16 cas. Il faut redoubler de prudence. On verra dans quelques jours si cette explosion des contaminations se retrouve aussi chez nous. On croise les doigts", indique le directeur.

Le CEA Marcoule applique rigoureusement les trois jours de télétravail dès que c'est possible (qui étaient déjà fortement recommandé dès décembre au CEA, NDLR). Voire quatre jours quand la personne est d'accord : "Il faut vraiment une vraie discussion pour éviter les risques psycho-sociaux et ne pas mettre en difficulté les salariés." En télétravail, on retrouve les personnels administratifs, les acheteurs ou les gens de dossiers, soit 20 à 25% des effectifs. C'est impossible en revanche pour les techniciens voire pour les personnes qui traitent de dossiers confidentiels sur ordinateur.

Des mamans obligés de garder leur enfant cas contact

Le télétravail minimise les risques de contaminations au sein des entreprises. Mais certains secteurs ne peuvent pas y recourir. C'est le cas de celui de la vente. À Bagnols-sur-Cèze, dans une enseigne nationale de prêt-à-porter qui tient à rester anonyme, le patron compte 20% d'absentéisme dans ses effectifs : "Il y a les cas de covid, les cas contact et aussi les mamans qui doivent garder leur enfant à la maison car il est cas contact ou la classe est fermée."

Il est difficile pour le secteur de la vente en magasin de recourir au télétravail. (photo Kippelboy/ Commons wikimedia)

"Il y a un impact sur nous bien sûr car on ne peut pas mener de recrutement pour les remplacer. C'est à nous de pallier leur absence et leur charge de travail", poursuit le gérant du magasin. Fort heureusement, peu de contaminations ont lieu au travail, mais majoritairement dans la sphère privée. Mais toute l'équipe redouble d'efforts au magasin pour limiter les contacts entre membres du personnel.

Le gérant attend peut-être de nouvelles consignes, entre autre le port de masques FFP2 pour les employés. Mais malgré les taux d'incidence très hauts, il n'est pas inquiet d'une nouvelle fermeture forcée du magasin :  "Heureusement que l'on se trouve en année d'élection, on ne risque pas grand chose. Mais si ça n'avait pas été le cas, je ne pense pas qu'on y aurait échappé."

Au-delà du quotidien en magasin, le secteur de la mode souffre d'un certaine morosité au niveau national : "L'enseigne a perdu 10% de son chiffre d'affaires par rapport à 2019 et a dû fermer six semaines car notre activité est jugée non-essentielle", rappelle le gérant. Il essaye de développer davantage le drive et la vente en ligne qui ont connu un certain succès. Preuve encore que le covid a déjà profondément impacté nos vies et nos relations aux autres.

Stéphanie Marin et Marie Meunier

Stéphanie Marin

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