Publié il y a 1 an - Mise à jour le 25.08.2022 - pierre-havez - 3 min  - vu 3802 fois

TRIBUNAL « Dans le milieu on m’appelle le chat, je peux vider une maison sans réveiller ses occupants »

Palais de Justice de Nîmes (Photo Yannick Pons) - Yannick Pons

Franck et Michel sont chacun condamnés à douze ans de prison ferme pour le home-jacking ultra-violent chez un homme de 77 ans, le 9 juillet 2020 à Manduel. Ligoté et frappé à coups de club de golf et de pied de biche, la pauvre victime avait été laissée pour morte.

Cette nuit-là, les gendarmes sont finalement appelés par le septuagénaire, choqué, roué de coups et le crâne fracassé. L’homme vient de se libérer de ses liens après un long calvaire. Vers 4 heures du matin, un duo l’a surpris en plein sommeil, ligoté dans sa chambre avec des ceintures et frappé avec un club de golf et un pied de biche, afin de lui dérober des télévisions, un ordinateur, deux cartes bancaires, des montres Rolex... Une fois obtenu les codes des cartes sous la menace, les deux comparses ont laissé leur victime attachée, incendié son véhicule, puis pris la fuite pour effectuer plusieurs milliers d’euros d’achat.

T-shirt noir à motifs brillants, Michel, 31 ans, admet le vol mais conteste les coups. « Quand je l’ai vu blessé à terre en sang, j’ai cru qu’il était mort, mais quand je l’ai secoué avec le club de golf, il a bougé, alors j’ai paniqué, j’ai vomi et je suis sorti de la chambre. » Son ADN a pourtant été retrouvé sur le club de golf et la victime assure avoir été frappée par deux complices. « Vous avez rapidement repris vos esprits puisque vous êtes immédiatement allé vérifier les codes bancaires que votre victime vous avait donné », lui fait remarquer le président, Denis Weisbuch.

Fasciné par le vol

L’expert psychiatre décrit Michel comme impulsif, dyssocial et fasciné par le vol. « J’ai gâché ma jeunesse en détention, aujourd’hui j’ai 31 ans, je veux laisser ma place à quelqu’un d’autre… », tente d’évacuer le récidiviste. « Avez-vous réalisé que votre victime ait pu mourir ? », interroge l’avocate du septuagénaire. Le prévenu opine du chef. « Mais alors pourquoi vous n’appelez pas les secours ? », insiste-t-elle. « Je n’assume pas sur le coup, j’ai été lâche c’est vrai, comme beaucoup de gens l’auraient été, je crois. Mais dix minutes après notre départ, les pompiers étaient chez lui, se défausse Michel. Mais oui, je savais qu’il pouvait mourir. Dans la voiture, je voulais frapper Franck à cause de ce qu’il avait fait. Je suis un voleur depuis toujours, c’est vrai, il n’y a qu’à voir mon casier, mais je ne suis pas violent : dans le milieu on m’appelle le chat, je ne fais pas de bruit, je peux vider une maison sans réveiller ses occupants… »

« Je suis redescendu une fois en prison »

À ses côtés, vêtu d’un polo rouge, Franck, 42 ans, confirme la version de Michel. « Au départ, je suis monté dans sa chambre sans le réveiller pour lui prendre sa Rolex à côté de son lit, puis je lui ai porté un coup, il y a eu du sang partout et j’ai paniqué. J’ai agi n’importe comment, mais je ne me souviens pas que Michel l’ait frappé aux jambes… », ajoute l’aîné des deux prévenus.

Le juge fait la moue. Pour lui, les deux complices n’ont jamais paniqué puisque leur violence visait à obtenir les codes des cartes bancaires. « On était venu pour de l’argent, il fallait aller jusqu’au bout, je l’avais déjà frappé de toute façon. J’ai essayé de le calmer en lui donnant un peu à boire », admet Franck à demi-mot. Un accès de compassion contesté par la victime. Le juge insiste, pointant que sur des écoutes téléphoniques, Franck se vante de son forfait auprès d’un ami. « J’étais fier de ma connerie car j’étais sous cocaïne. Y’avait pas de regret à ce moment-là, j’étais en mode festif, sous alcool. J’étais complètement déconnecté de ce que j’avais fait. C’est ensuite qu’il y a eu la redescente, une fois en prison », tente d’expliquer Franck. L’homme a ensuite fait deux tentatives de suicide en détention.

Douze ans ferme

Abasourdi par tant de désinvolture, le procureur requiert 12 ans d’emprisonnement contre les deux récidivistes. « C’est un dossier totalement ignoble du début à la fin : un homme âgé surpris dans son sommeil, qui a subi des violences extrêmes, dont il a failli mourir... Il aurait été très facile de voler le véhicule ou la Rolex sans menaces, ni coups. Mais leur premier réflexe en trouvant les cartes bancaires est d’en vouloir encore plus, quitte à s’acharner sur leur victime, assène Stéphane Bertrand. Dès le départ, ils savaient qu’il y avait quelqu’un à l’intérieur puisque la voiture était garée dans la propriété. C’est un risque qu’ils ont pris sciemment. Ils n’ont jamais paniqué, au contraire ils ont fait preuve de froideur jusqu’au bout, vérifiant qu’ils n’avaient pas laissé d’ADN sur place... C’est la première fois que je vois deux personnes massacrer un homme âgé et le ficeler avant de partir, sans lui laisser aucune chance. » Michel et Franck écopent tous les deux de douze années d’emprisonnement.

Pierre Havez

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