Publié il y a 1 an - Mise à jour le 06.10.2022 - francois-desmeures - 3 min  - vu 770 fois

SAINT-JEAN-DU-GARD La Bête a pénétré les murs de Maison Rouge

(Photo François Desmeures / Objectif Gard)

Gérard Lattier, lors de la présentation de son exposition à Maison Rouge (photo François Desmeures / Objectif Gard)

Jusqu'au 31 décembre, Gérard Lattier a accroché 42 tableaux, réalisés entre 1989 et 1993, sur le thème de la Bête du Gévaudan, au musée Maison Rouge de Saint-Jean-du-Gard. Entre peinture naïve et traits effrayants et sanguinolents, le peintre-conteur livre un récit chronologique et légendaire d'une histoire qui marque encore les balades dans les forêts lozériennes. 

"La Bête". Par acquis de conscience, le musée des Vallées cévenoles a sous-titré l'exposition "Une histoire de la bête du Gévaudan". Mais, même si Saint-Jean-du-Gard est loin du Gévaudan, il est presque inutile de préciser quel animal est évoqué quand la Bête en question prend une majuscule (*). Historiques et oniriques, légendaires voire prémonitoires, les tableaux de Gérard Lattier éclatent de couleurs vives et rappellent les iconographies des démons de l'art gothique dans un décor quasi enfantin.

Jeanne Boulet, la première victime morte de la Bête du Gévaudan (photo François Desmeures / Objectif Gard)

L'exposition d'aujourd'hui est née d'un rendez-vous avorté, une commande publique du musée de la Margeride à Gérard Lattier, en 1989. Une commande qui ne va finalement pas à son terme mais a, ensuite, fait l'objet d'ouvrages. Enfin, en 2020, la commune de Saint-Étienne-de-Lugdarès (Ardèche), village de la première victime de la Bête, a acheté la série exposée à Saint-Jean jusqu'à la fin de l'année.

En clin d'oeil, Gérard Lattier s'est même infiltré dans l'un de ses tableaux (photo François Desmeures / Objectif Gard)

"C'est une histoire de riches et de pauvres, une histoire de pouvoir, résume Gérard Lattier avec son ton chantant de conteur occitan. Et la Bête, c'est la bête intérieure de chacun, interprète le conteur octogénaire, c'est Dr. Jekyll et Mr. Hyde, ou La Nuit du chasseur." Lui parle de sa propre bête, de la mort de son père dans les bombardements de Nîmes, au cours de la Seconde Guerre mondiale. "J'ai été orphelin de guerre, il fallait vivre avec... Il faut affronter sa bête intérieure, que l'on traîne. Et c'est bien de l'avoir apprivoisée."

(Photo François Desmeures / Objectif Gard)

Celle de son exposition est loin de l'être. Sauvage dans ses interventions et ses exécutions, mais provoquant parfois un rictus alors même qu'elle se promène avec un membre d'une victime dans la gueule.  De sa première apparition signalée par l'attaque d'une vachère (sauvée par ses vaches), le 1er juin 1764, à sa mort supposée le 19 juin 1767, en passant par sa première victime, Jeanne Boulet, le 3 juillet 1764, la Bête du Gévaudan aura fait plus d'une centaine de morts, souvent des jeunes filles.

Un récit dans lequel s'est alors engouffré l'évêque de Mende de l'époque pour expliquer le phénomène comme un châtiment divin. En 1767, un enfant du pays, Jean Chastel, tue finalement un gros loup et les morts cessent ensuite. Le vrai-faux fusil de Chastel, authentifié par Gérard Lattier lui-même, trône également en vitrine de l'exposition, avant les sept hypothèses du peintre sur ce qu'aurait pu être cette bête. Un loup ? Un homme ? Un martien ? Un animal ensauvagé ? L'auteur ne répond pas. Mais tout autant qu'ils évoquent une époque, ses tableaux sont un appel à l'imagination. C'est donc au visiteur de construire la suite, et de découvrir finalement, face au miroir, quel monstre il pourrait être.

François Desmeures

francois.desmeures@objectifgard.com

(*) Et pourtant... Bien moins connue que son homologue du Gévaudan, la Bête des Cévennes a bel et bien existé, entre 1809 et 1817. L'historien Jean-Paul Chabrol lui consacrera une conférence, à Maison Rouge, dimanche 27 novembre à 14h. 

Dimanche 23 octobre aura lieu la première animation en lien avec l'exposition, une Dictée de la Bête par l'académie française et le centre poétique de Mende, en hommage au poète lozérien Léon Bourrié. Puis, jusqu'au 31 décembre, Maison Rouge a prévu d'autres animations, notamment lors des vacances de la Toussaint. Renseignements sur www.maisonrouge-musee.fr

À chacun, en fin d'exposition, d'émettre son hypothèse sur la réalité physique de la Bête parmi les sept propositions de l'artiste (photo François Desmeures / Objectif Gard)

François Desmeures

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