BAGNOLS Le campus des métiers, un "pôle d’excellence" au lycée
Et si les entreprises et le monde de l’enseignement travaillaient main dans la main ?
C’est le principe des campus des métiers et des formations, créés en 2013 par la loi pour la refondation de l’école. La région Occitanie en compte dix, le Gard trois, Bagnols un, celui du lycée professionnel Einstein.
« La logique 3E, enseignants, entreprises, élèves »
Axé sur les processus et technologies en milieux sensibles et inauguré jeudi, il propose un parcours de formations complet, du CAP à l’enseignement supérieur. Un parcours pensé avec les entreprises du bassin d’emploi. « On est avant tout dans une logique de réseau dans laquelle on rassemble les acteurs qui travaillent les uns avec les autres, explique le directeur opérationnel du campus bagnolais Philippe Girones. On peut résumer la démarche par la logique 3E, enseignants, entreprises, élèves. »
L’idée est simple, sur le papier en tout cas : favoriser l’employabilité des jeunes au sein du tissu industriel local. Un tissu souvent très spécialisé, notamment sur les questions nucléaires, et qui a du mal à recruter. « On a quinze postes ouverts mais on ne trouve personne, explique le PDG de l’entreprise Bagnolaise D&S group Julien Feja, qui compte 120 salariés dans le domaine de l’ingénierie nucléaire. Aujourd’hui, on ne répond pas à 20 % des besoins de nos clients par manque de personnel. » Le tout sur un territoire qui compte un taux de chômage supérieur à 12 % des actifs… « Nous rencontrons quelquefois des problèmes d’inadéquation entre les besoins des entreprises et les formations des élèves », note la présidente du groupement Cyclium Laurence Sanguinetti Julien.
C’est donc pour en finir avec cette situation que le campus a été créé. Impulsé par la Région et le rectorat, il associe des professionnels, notamment EDF et le CEA autour de deux axes, « la technologie et la pédagogie », rappelle le proviseur du lycée Einstein Franck Ourtal. Les formations proposées visent à définir et mesurer le milieu sensible, comprendre et utiliser les procédés dans lesdits milieux pour in fine y travailler, avec un focus sur l’assainissement et le démantèlement des sites nucléaires et plus largement la valorisation des sites industriels. « Ce sont des domaines particulièrement importants pour le CEA et l’enjeu est énorme, le démantèlement est un vivier d’activités appelé à se développer », affirme le directeur du CEA Marcoule Philippe Guiberteau. EDF y voit une opportunité de profiter de la montée en compétences et en qualifications des étudiants pour répondre aux mutations du secteur, « avec un programme de travail très important, avec le programme Grand Carénage et le démantèlement », souligne le délégué régional de l’électricien Gilles Capy.
« Donner aux entreprises des salariés formés »
Plus largement, ces campus « ont été choisis car ils représentent des pôles d’excellence pour la région, on en attend beaucoup », note madame le recteur Armande Le Pellec Muller. « Ce campus s’inscrit pleinement dans la vocation du Gard et plus particulièrement du Gard rhodanien, le deuxième département industriel de notre région », ajoute la présidente de la région Carole Delga. Une présidente qui l’affirme, « les carnets de commande pleins ne suffisent pas pour créer de l’emploi, il faut soutenir l’innovation et donner aux entreprises des salariés formés qui prennent en compte les mutations dans l’ensemble des domaines. »
Et c’est logique, ça passe par la jeunesse — « 30 % de la population de la région a moins de 25 ans », rappelle Carole Delga, une jeunesse qui reste sous employée, avec un taux d’emploi des jeunes en deçà de la moyenne nationale dans la région. Alors pour madame le recteur, « c’est un défi à relever ensemble. »
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Des projets : le campus n'a pas attendu d’être inauguré pour ouvrir ses portes. Ainsi, des étudiants ont présenté leurs premiers projets, un bras articulé permettant à un drone de porter des charges lourdes, jusqu’à 50 kilos, et un « hologuide », un robot motorisé conçu comme un guide augmenté pour les musées. « Le premier projet vient de l’entreprise vers le milieu scolaire, et le second du milieu scolaire vers l’entreprise, le campus marche dans les deux sens », note le professeur Pascal Dalmeida.
Sur la forme : pas de coupé de ruban, pas de visite, plus de deux heures de discours dans un amphithéâtre sombre, c’est peu dire que cette inauguration a cassé les codes de l’exercice. Pas pour le meilleur : interminable, limite assommante, l’inauguration contrastait avec le dynamisme affiché par un campus qui, nous n’en doutons pas, n’en manque pas par ailleurs. Dommage.
Thierry ALLARD