FAIT DU JOUR Didier Lauga, Préfet du Gard "Les bureaux de vote auront tous les bulletins des candidats"
Après la Féria de Nîmes et quelques jours avant le lancement de la saison estivale dans le Gard, ObjectifGard est parti à la rencontre du Préfet du Gard, Didier Lauga pour faire le point sur les sujets chauds en matière de sécurité. Rattrapée par l'actualité, notre rédaction s'est intéressée à la problématique de livraison du matériel électoral dans les boites aux lettres des gardois. Interview.
ObjectifGard : Après les difficultés de livraison du matériel électoral chez bon nombre de gardois, pouvez-vous faire un point sur la situation ?
Didier Lauga, Préfet du Gard : Le matériel a été livré avec difficulté dans certains lieux du Gard, c'est exact. Cela ne veut pas dire que le dysfonctionnement est lié à la Préfecture ou à la Poste mais à l'opérateur qui était en charge de l'intégration des professions de foi et bulletins dans les enveloppes et à l'acheminement au domicile des Gardois. Malheureusement, après des sondages réalisés par nos services et les alertes de plusieurs candidats, nous avons constaté des anomalies. La commission de propagande, qui s'est réunie hier avec à sa tête un représentant de la Préfecture du Gard, de la Poste et la Vice-Présidente du TGI de Nîmes en présence des candidats, a reconnu la situation dans plusieurs communes des six circonscriptions du Gard. Mais il est important de le dire, il y a aussi des enveloppes complètes qui ont bien été livrées. Face à cela, qu'est-ce que l'on peut faire ? Premier point : le code électoral est très clair, nous ne pouvons plus redistribuer les plis car la limite était fixée au mercredi 00h00. Deuxièmement, et c'est heureux, ce sont nos services qui font les envois des plis dans les mairies. Donc, je peux le dire ce matin, tous les bureaux de vote auront l'ensemble des bulletins de tous les candidats engagés dans ces élections législatives.
Malgré cela, des recours et une éventuelle annulation de l'élection sont possibles ?
Tout à fait. Après les élections, il peut y avoir des contestations car le matériel de propagande aura été livré dans de mauvaises conditions. C'est un juge administratif qui statuera et déterminera l'opportunité d'annuler ou pas l'élection. Ce problème a déjà eu lieu, dans des proportions moindres. Généralement, une annulation peut être prononcée si l'écart des voix entre les deux premiers ou les trois premiers est faible. À ce moment là, on peut considérer que le défaut de livraison du matériel électoral a causé une altération du vote.
Mais comment a t'on pu en arriver là ?
Un exemple : dans la première circonscription, cinq bulletins sur les treize ont été distribué. Il en manque huit. Comment on fait? On les achemine à nouveau ? Et ceux qui ont eu sept bulletins ? On en livre que six ? C'est impensable et infaisable. Cela nous renvoie finalement à la raison d'être du choix de cet opérateur. Avant, même si cela engageait des agents de la préfecture sur plusieurs jours, le travail était assuré régulièrement. Depuis de nombreuses années, on ne le fait plus comme la quasi totalité des préfectures de France pour des questions de coûts et de praticité. Cette société Koba, pour ne pas la citer, a remporté un appel d'offres régional, je ne suis pas à l'origine de ce choix. À la fois, c'est cette même société qui avait assuré la Présidentielle et tout c'était très bien passé.
Cette société est engagée par appel d'offres à la réussite de l'opération tout de même, des sanctions sont possibles ?
Cette société gère aujourd'hui 65% des distributions électorales en France. Elle a plusieurs plateformes et il semblerait que le dysfonctionnement soit lié à celle de Lyon. Cette usine lyonnaise, que mes services sont partis visiter en urgence, gère 80 circonscriptions dans la Région Occitanie soit 8 millions d'électeurs. L'appel d'offre prévoyait le recrutement de chômeurs longue durée, donc des personnes qui pouvaient être très éloignées de l'emploi, donc peut-être un peu moins opérationnelles ainsi qu'un grand nombre de personnel d'intérim qui n'était peut-être pas très au fait du caractère extrêmement important de ce travail. Par ailleurs, des contrôles qualité auraient dû être réalisé chaque jour, or, il semble, selon le courrier que j'ai reçu de la direction de cette entreprise, que des contrôles sur deux nuits, n'ont pas été fait. Des sanctions seront donc forcément prises car il est caractérisé que le travail a été défaillant.
Est-ce la même société qui s'occupera de la distribution du matériel électoral pour le second tour des Législatives ?
Nous n'avons pas de solution de rechange. Savez-vous qu'il existe très peu d'entreprises en France en capacité de livrer autant de plis ? Nous ferons donc appel à cette même société même si vous vous en doutez, nous mettrons en place des contrôles renforcés.
Changeons de sujet. Pouvez-vous dresser le bilan en matière de sécurité après la Feria de Nîmes ?
C'est globalement un bon bilan. C'est avant tout l'aboutissement d'un très gros travail en amont avec la mairie de Nîmes, les gendarmes et policiers. D'un point de vue chiffres, le nombre de plaintes est en baisse d'un tiers. Nous sommes passés de 234 plaintes en 2016 à 177 en 2017. Des plaintes en plus pour des faits mineurs, ce qui n'a pas été toujours le cas les années précédentes. Un deuxième indicateur : les données sécurité routière. De ce point de vue là aussi, les voyants sont au vert, prenant en compte le renforcement des contrôles en particulier la nuit. Par rapport à 2016, on observe une baisse significative. Un chiffre révélateur : de 4,8% de situation d'alcoolémie positive en 2016, nous sommes passé à 3,5% en 2017. Par ailleurs, comme vous le savez, mes deux principales craintes durant cette feria étaient davantage liées à la menace terroriste, nous avons un des départements français les plus radicalisés. Il était donc indispensable d'avoir les moyens nécessaires. Je crois que de ce point de vue là le ministère nous a entendu et a déployé plus de forces policières sur place.
Concernant les anti-corridas, vous avez eu la main lourde avec une multiplication de garde à vue, n'est-ce pas un peu trop ?
À Alès, une semaine plus tôt, le CRAC a organisé une manifestation pacifiste et déclarée bien en amont : tout s'est parfaitement bien passé. À Nîmes, les anti-corridas depuis deux ans préparaient une action ce samedi soir là pour perturber la corrida qui avait lieu dans les Arènes. Ils n'avaient pas fait de déclaration obligatoire au préalable et semblaient animés d'une envie de violence. Nous sommes donc intervenus car il n'est pas possible d'agir dans l'illégalité. Je ne suis pas là pour défendre les uns par rapport aux autres. Je suis là pour m'assurer que tout le monde respecte les règles du jeu. Si les anti-corridas organisent un congrès et que des afficionados perturbent sa tenue illégalement, j'interviendrais de la même façon.
Un mot sur la sécurité au sens large à l'occasion de la saison estivale et de la multiplication des festivités ?
Rien n'est acquis, voilà ce que je veux vous dire. Il est possible que je sois dans l'obligation d'interdire des concerts dans les arènes. Il est possible que des dispositions soient prises pour le passage de la Vuelta, de la Feria de septembre. Ce n'est pas mon souhait, entendons-nous bien mais si cela s'avérait nécessaire, je n'aurais pas le choix. Nous travaillons en étroite confiance notamment avec la mairie de Nîmes que je voudrais saluer car les équipes de sécurité sont au rendez-vous pour que tout s'organise parfaitement.
Concernant la sécurité routière, la situation est aussi tendue cette année 2017. Avec le début de l'été et l'arrivée des touristes, vous redoutez que les mauvais chiffres s'alourdissent ?
Le bilan du département du Gard en matière de mortalité est mauvais. Après un record à la baisse en 2014, un record à la hausse en 2015, 2016 était plutôt une année correcte. Depuis le début de l'année, les résultats ne sont pas satisfaisants. Pourtant, nous multiplions les contrôles, je me déplace même symboliquement avec les forces de l'ordre. Le procureur de Nîmes et celui d'Alès sont également actifs sur ces questions. Je déplore cette situation qui est aggravée par ailleurs par l'augmentation des accidents et des blessés. Tout est au rouge. Les causes sont toujours les mêmes : alcoolémie, stupéfiants, vitesse et inattention. Les Gardois doivent changer leur comportement au volant, il faut être davantage vigilant et attentif en conduisant. Quand vous êtes au volant, concentrez-vous !
Un mot pour finir sur la situation qui reste toujours en suspend à la CCI Gard. Le tribunal administratif doit se prononcer à la fin juin ...
J'ai rencontré Eric Giraudier après l'article dans vos colonnes. Une décision doit effectivement être rendue, nous l'attendons. Ce qui est certain, c'est que M. Giraudier est de fait le président de la CCI Gard actuellement. Ce que je souhaite plus largement et je l'ai dit à M. Giraudier, c'est que la CCI Gard se mette au service des entreprises du territoire. Ce département souffre d'un fort chômage et il est indispensable, comme le fait parfaitement ces derniers mois la Chambre de Métiers et depuis plus longtemps la Chambre d'Agriculture du Gard, d'être mobilisé pour l'économie gardoise. M. Giraudier s'est engagé dans cet objectif, je serais donc attentif à sa réalisation.
Propos recueillis par Abdel SAMARI