FAIT DU JOUR El Fesquito ou l'art de la fête
Quelle que soit la génération à laquelle on appartient, que l'on dise "disc jockey" ou "DJ", la fonction, entre ombre et lumière, ne laisse pas indifférent. Jérôme Fesquet, si on vit et que l'on sort à Nîmes, il y a des chances pour qu'il nous ait fait chanter, danser… On l'a forcément croisé un jour, ou plutôt un soir… Cette année à la Feria, il est le Monsieur Loyal du Danieli Mais le connaissez-vous vraiment ? Rencontre.
Qui est Jérôme Fesquet ? À la veille de la Feria, rendez-vous est pris pour faire plus ample connaissance avec un des hommes de nos nuits de fête. Il arrive à l'heure pile, ponctuel et élégant, fraîchement rentré d'une"retraite" chez un ami dans les Cévennes. Une mise au vert pour préparer la lecture d'une nouvelle du Prix Hemingway dans les arènes et faire le plein de calme avant quatre jours ininterrompus dans le tumulte de la fête. Un autre talent ? Ou alors est-ce complémentaire ? Rythmer les phrases ou les sons, qu'importe. Le maître mot c'est le tempo et tout se passe dans le même univers. " J'ai découvert la musique à l'âge de 12 ans avec l'album Bleu et l'album Rouge des Beatles. Avant j'étais doué en math et pour le dessin. Je n'ai jamais rien compris à l'encodage musical mais j'ai toujours baigné dans la musique. Il faut dire que mon grand-père maternel était directeur d’Opéras (Béziers, Montpellier, Nice, Nîmes…). Est-ce pour cela que j'ai un sens du rythme inné, une oreille qui me permet de retranscrire un morceau de musique sans connaître la partition?" Tout commence donc par une oreille hors du commun.
Le DJ est un passeur
Mais un don sans travail n'est qu'une sale manie comme disait l'ami Brassens. Alors Le Jeune Fesquet travaille et se tient sans cesse au courant des dernières avancées technologiques. Au fil des années et des rencontres, il passe des platines empruntées aux parents pour animer les boums, aux tables de mixage les plus high-tech. Pour autant, il n'abandonne pas ses vinyles, qu'il classe sans cesse et dont il stocke des quantités impressionnantes sur des clés USB. "J'enregistre directement sur la table de mixage, je ne nettoie pas le son, si ça craque, je laisse cette patte. Sur une clé USB tu peux avoir l'équivalent de 38 tonnes de 45 tours, explique-t-il enthousiaste. "De plus", poursuit-il, "grâce aux nouvelles technologies tu ne tournes plus le dos au public, tu as un accès foudroyant aux morceaux, du coup, tu peux mieux interagir avec les gens… " Parce qu'il est bien là l'art de la fête, sentir les ambiances, les gens, faire monter la pression…
Assembleur de talents
"Tu ne peux pas arriver avec des sets tout prêts et les passer sans rien y changer", note Jérôme, et il poursuit " aujourd'hui les jeunes se préoccupent plus de technique que d'animation. Ce métier me fait penser à celui de cuisinier. Nous sommes des assembleurs de talents, comme un chef assemble les bons produits qu'il a choisi…" Un savoir faire qui réside dans la façon de mélanger, dans l'attention aux autres aussi. "Ça fait deux ans que je travaille sans casque, les platines me donnent le tempo au "vu-mètre". Une façon d'être moins coupé des autres." Bien loin de la société du paraître et de la tendance à la starisation des DJ, Jérôme Fesquet se situe loin des clivages. "Je suis en fin de carrière en temps que DJ", confie t-il, "je me vois mal animer des soirées pour des jeunes de l'âge de mon fils." Son avenir est ailleurs…
Chanteur, compositeur, interprète
"Je ne veux pas qu'on m'enferme dans une boîte… Aujourd'hui, je peaufine des compositions, je travaille sur des projets. J'ai des périodes de création intense. Dans ces moments là, j'ai le sentiment très net de "recevoir" l'inspiration, paroles, musiques… Ensuite, je compose, je travaille et je réfléchis à tout, même au cadre, au spectacle." Dans le domaine, Jérôme n'en est pas à son galop d'essai, "elle m'a dit je t'aime" par exemple est toujours dans la boucle sur le Net, une chanson hommage au Commandant Cousteau aussi… Dernièrement, l'inspiration lui a soufflé un titre proche de la sortie… La composition c'est un monde différent pour le DJ soumit à une obligation de résultat immédiate, un projet à maturation lente, un autre chemin… Mais toujours la même philosophie… Pour Jérôme, un bon morceau est un morceau qui fait danser les gens ! Alors passeur de bonheur Monsieur Fesquet ?
Des boums aux clips* …
Parcours
À l'adolescence, le jeune Jérôme met l'ambiance dans les boums. C'est le temps du mange-disque et de l'électrophone compact spécial 45 tours, avec ses deux petites enceintes. Au début des années 90, il passe pro et anime les galas et autres nuits au Zénith pour les étudiants de Montpellier. Montpellier, la ville qui lui porte chance, puisque c’est la qu’il rencontre Jean-Pierre , "un des rares seigneurs cultivés de la nuit." Antiquaire le jour, maître de cérémonie des fêtes les plus folles la nuit, Jean-Pierre prend Jérôme en affection est lui met le pied à l’étrier. S’enchaînent les fêtes pour Christian Lacroix à Paris, les bodegas des Ferias d’Arles, Béziers, Nîmes, les musiques pour les défilés de Souleïado, les mariages princiers (famille Nonencourt, de Colbert, de La Rochefoucault) et les fêtes privées (Thierry Mugler, Jean Lacourège, famille Christian Clavier, famille Belmondo…) au quatre coins de France… Repéré par Helen Traiteur, il fait la connaissance de Luc Vertige, le talentueux capitaine de l’agence événementielle Soucoupe Sonique qui le prend comme DJ attitré pour les soirées qu’il organise et met en scène. S’ensuivent, le FIPA à Biarritz, puis à Paris le réveillon de Cédric Klapisch, Jean-Pierre Bacri, Agnès Jaoui, les 5 ans d’Arte, la Tour d’Argent, la Maison Blanche, le Pavillon Ledoyen, l’arrivée du Tour de France, la Convention Universal… En 2002, la Ville de Nîmes lui confie la mise en scène de l’Hôtel Meynier de Salinelles pour le cinquantenaire de la Feria. L’Alegría, dès sa première édition à connu un succès qui ne s’est pas démenti pendant dix ans.
Passé à la production, il sort sont premier single en 2004 « Maestro de Alegría » avec son complice Raphaël Lemonnier, pianiste jazzman et arrangeur de renommée internationale qui a signé avec China Moise chez le prestigieux label de jazz Blue Note. D’une rencontre avec Anne-Laure de la Star Ac’ il fait la connaissance de Patrick Liotard et de son studio d’enregistrement. Patrick lui présente Jean Renard (Que je t’aime pour Johnny, Laisse moi t’aimer pour Mike Brant, Dallas pour la télé…) dont il organise pendant la Feria de Nîmes la sortie de son dernier single «Federico», hommage à García Lorca interprété par Anna-Maria.
Avec Patrick Liotard il enregistre son second single « Dreams on Fever » bootleg entre Peggy Lee & JayDee non édité à ce jour. En 2006 l’envie de faire un disque le titille à nouveau et c’est à ce moment là que sa route croise celle d’un autre noctambule : Didier Sabatier DJ phare du clubbing du Sud de la France, dont la voix et la culture musicale le séduise instantanément ! De cette rencontre naît « elle m’a dit je t’aime » qui fait un « tabac » partout où il est joué. Single qui est sorti sur une compilation Sony au mois de janvier 2009 ! Toujours avec Patrick Liotard, Jérôme a enregistré « Scandale à la Feria » diffusé sur Radio France et dont le clip a été réalisé par TV Sud. Mais ce qui ravi le plus Jérôme alias El Fesquito en Feria c’est de voir des gens heureux danser devant ses platines sans aucun à priori de genre de soirée, ni de style musical !
Véronique Palomar
Véronique Palomar@objectifgard.com