Publié il y a 8 ans - Mise à jour le 08.12.2016 - eloise-levesque - 4 min  - vu 336 fois

FAIT DU JOUR L'ex-trésorier d'EELV LR soupçonné d'abus de confiance

L'ancien local d'EELV, sur le boulevard du Jeu de Paume à Montpellier. EL/OG

Révélation Objectif Gard. Europe Ecologie les Verts Languedoc-Roussillon attaque son ancien trésorier pour abus de confiance, vol et recel dans la gestion de son patrimoine. Le mis en cause* est Jean-Claude Holdrinet, élu d'opposition au conseil municipal d'Alès.

L'affaire démarre en janvier 2014. Jean-Claude Holdrinet est alors élu trésorier de la section régionale d'Europe Ecologie les Verts et devient gestionnaire de deux sociétés civiles immobilières appartenant au parti. A l'époque, la fédération sort d'une mise sous tutelle de deux ans qui l'a déjà égratignée. Elle doit repartir du bon pied. "Mesuré, débonnaire, courtois, c'était l'homme de confiance de Paris, il faisait bien son job. Il était une caution morale", se souvient un ancien cadre du parti. "Il était attaché à ces sujets et ce n'est pas des tâches qu'on aime faire", ajoute le nouveau trésorier Laurent Dupont qui se souvient des "bonnes relations" qu'il entretenait avec ce conseiller en gestion à son compte, installé à St-Christol-lès-Alès.

Mais en juin 2015, le conseiller municipal d'Alès, troisième sur la liste de l'ex-socialiste Benjamin Mathéaud, décide de démissionner pour "des raisons de santé". Le parti lui réclame alors tous les documents liés à son poste de trésorier : chéquiers, relevés bancaires, contrats, etc. "A partir de là, il n'a plus agi normalement. Il a invoqué des problèmes personnels et ne nous a rien rendu. On l'a cru pendant tout l'été. Puis on s'est posé des questions", explique, mal à l'aise, Michèle Comps, secrétaire régionale EELV LR.

"On a été mauvais"

Malgré les demandes répétées des instances régionales et nationales, Jean-Claude Holdrinet se mure dans le silence pendant des mois. "On a essayé de régler tout ça en interne, mais il a fait le mort. Il a coupé tous ses téléphones", affirme Sibylle Jannekeyn, conseillère fédérale nîmoise. Or le parti doit attester de son activité financière auprès des instances dirigeantes. "Les comptes de cette région s’avèrent en première approche approximatifs", remarque la Commission nationale des financements politiques en 2015 dans son compte rendu. Et pour cause : "Pendant deux ans, il n'a remis aucun document au comptable", explique l'actuel trésorier.

En avril 2016, EELV dépose un référé et obtient gain de cause, avec astreinte financière. "On n'a eu aucun contact physique. Il a déposé les documents dans un box à Montpellier, on ne disposait que des codes pour aller les chercher", raconte Laurent Dupont. Les écologistes découvrent alors des "dépenses somptueuses et des achats de matériel personnel" sur les comptes du parti, mais décident de ne pas poursuivre. "La responsabilité est partagée. L'exécutif a peut-être été négligeant. On a été mauvais", admet le trésorier qui - depuis - a décidé de rationaliser et de systématiser la présentation des dépenses.

Des locaux sous-évalués, des commissions personnelles

En parallèle, EELV LR découvre aussi des irrégularités sur la gestion de patrimoine et des SCI. "Il a vendu deux locaux à des prix très sous-évalués. On avait acheté celui de Nîmes à 24 000 €, il l'a cédé pour 6 000 € en 2015. Idem pour Montpellier : acquis 135 000 € en 2006, et revendu à 90 000 €. C'est le même notaire alésien qui a fait les deux transactions", affirme Laurent Dupont. Et d'ajouter : "Nous ne savons pas quel lien il a avec les acheteurs, ce sera à l'enquête de le découvrir". Au passage, il se serait versé un total de 3 100 € de commission sans en référer à ses associés, un avantage contraire aux statuts du parti.

La fédération ne veut pas laisser passer. "Il a profité d'une situation de monopole décisionnaire, il avait une grosse responsabilité", assène l'actuel trésorier. Son co-gérant Martial Jourdan n'était, selon une ex-figure du parti, "qu'un prête-nom, qui a plus subi qu'agi". Pour autant, les statuts de la SCI Un toit pour les Verts LR sont clairs : toute opération supérieure à 1 500 € devra être "notifiée par le gérant à chacun de ses co-gérants, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par remise en mains propres, 15 jours au moins à l’avance".

Europe Ecologie les Verts a-t-elle manqué de discernement ? Un ancien membre de l'une des SCI justifie : "On n'a jamais vu un chéquier, jamais rien signé. Jean-Claude promettait des réunions qui n'avaient jamais lieu. Mais il était du genre à nous rappeler à l'ordre sur le droit. Quand j'ai su, les bras m'en sont tombés". Un autre est plus amer : "Le système était opaque avant lui, il n'a fait que le faire perdurer. C'est le national qui va devoir rendre des comptes".

"On ne veut pas étouffer l'affaire"

Une plainte vient d'être déposée pour abus de confiance, faux, usage de faux et recel, auprès du procureur de Montpellier, par Maître Scheuer. Une mise en demeure est également en cours depuis mai dernier car le mis en cause détiendrait toujours des preuves. Quelles conséquences pour les finances EELV LR dont le budget annuel avoisine seulement 60 000 € ? "Aucune, nous n'avions aucune dépendance financière vis à vis de ces deux SCI. Simplement nous aurions pû tirer un meilleur bénéfice de la vente des locaux. L'essentiel est de marquer le coup. On a une éthique et on veut faire les choses correctement. On ne veut pas étouffer l'affaire", conclut le nouveau trésorier qui a dissout les deux SCI. Jean-Claude Holdrinet, fidèle absent des conseils municipaux d'Alès, n'est désormais plus adhérent à EELV. Contacté par Objectif Gard, il n'a pas souhaité répondre à nos questions.

* Aucun procès n'ayant eu lieu, Jean-Claude Holdrinet est présumé innocent

Eloïse Levesque

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