NÎMES Pascal Derepas, président de FA-FTP : "Nous avons un système à deux vitesses, pourquoi stigmatiser le personnel territorial ?"
L'assemblée générale du syndicat FA-FTP (Fédération autonome de la fonction publique territoriale) Nîmes et Nîmes Métropole s'est déroulée mardi 25 janvier, dans une des salles du stade des Costières et en présence du président fédéral, Pascal Derepas. L'occasion d'en savoir plus sur les projets de cette organisation syndicale, à moins d'un an des élections professionnelles.
ObjectifGard : C'est une année charnière pour le syndicat : les élections professionnelles auront lieu le 8 décembre 2022.
Pascal Derepas : Aujourd'hui, par rapport à cela, je me dois - au-delà d'une activité ministérielle encore assez dense sur les négociations jusqu'à la veille des présidentielles - de rencontrer les gens sur le terrain pour évoquer les bonnes raisons de nous rejoindre. Comme les partis politiques, les structures font leur campagne avec les argumentaires concrets sur la partie revendicative.
Quelles sont ces bonnes raisons ?
Avant toute chose, c'est l'autonomie. Parce que d'abord nous sommes une fédération apolitique et le fait de n'avoir aucune accointance politique nous permet d'avoir une liberté d'expression auprès des différentes gouvernances, instances et autorités que nous pouvons rencontrer. Donc le deuxième point, c'est la liberté. Sur la partie dations, c'est la solidarité. Quelque soit le cadre d'emploi, la situation, nous sommes très attachés à l'humain. On peut parfois nous faire le reproche d'avoir plus de sympathisants que d'adhérents. Sur le plan national, sur le versant territorial, nous sommes la cinquième force syndicale et nous sommes aussi représentatifs sur le Conseil supérieur de la fonction publique et au Conseil commun de la fonction publique.
Vous parliez de négociations avec le ministère, quel est l'enjeu majeur ?
Le pouvoir d'achat et la revalorisation du point d'indice qui est gelé depuis plus de dix ans. Nous demandons l'automatisation de cette revalorisation au même titre que le SMIC basé sur le pouvoir d'achat. 80% des agents de la fonction publique territoriale sont des catégories C avec un salaire net mensuel de moins de 1 500 €. Ce sont des agents des services techniques, des adjoints administratifs, des agents territoriaux spécialistes des écoles maternelles, des agents d'animation etc. La deuxième revendication, c'est l'absorption de la précarité puisque nous avons une multitude d'agents de la catégorie évoquée contractuels et notamment dans le domaine périscolaire par exemple. Ce sont des CDD à des temps non complets sur les basses de 17h, 25h ou 30h par mois. J'ai pour exemple un agent rencontré dernièrement et qui a eu sur les six dernières années 88 contrats. Où est le projet de vie, l'aspect social, la sécurité dans ces conditions ? Aujourd'hui, nous avons des inepties, des incohérences. Il y a eu le projet Segur, la revalorisation des grilles indiciaires du personnel de santé dans l'hospitalier. Dans la fonction publique territoriale, nous avons aussi des métiers affiliés au médico-social. Pourquoi ne sont-ils pas concernés par ce projet Segur ? Nous avons un système à deux vitesses, pourquoi stigmatiser le personnel territorial qui fait le même métier ?
La fonction publique territoriale se sent-elle menacée ? Et par quoi ?
Aujourd'hui, c'est marche ou crève. En clair, tu viens bosser, si tu n'acceptes pas les règles, on ne renouvelle pas ton contrat. Le désengagement de l'État envers les collectivités territoriales impacte directement leur budget. Nous n'avons pas une estimation sur la perte d'emplois mais sur la précarité. Dans ces catégories C, quasiment 20% des agents ont atteint cette précarité. Bien sûr, on va vous balancer la loi du 6 août 2019, cette fameuse loi de la transformation de la fonction publique qui dit que dans le cas où les collectivités ne pourraient pas recruter sur le plan statutaire, elles pourront le faire sur le plan contractuel. Sur des expertises, des missions ponctuelles, ça peut être un bienfait mais il ne faut surtout pas généraliser l'outil qui est proposé. Si on a été capable de faire 88 contrats à un agent, c'est que quelque part, il n'était pas si mauvais que ça.
Y-a-t-il eu un tournant concernant cette précarité ? Un accélération à un moment précis ?
La précarité a été accentuée lors de la mise en oeuvre de la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, dite « MAPTAM ». Le personnel titulaire a été transféré sans perdre ses acquis. Pour les contractuels, soit il n'y a pas eu de renouvellement et cela a été souvent le cas, soit il y a eu un reclassement. On ne veut pas juste dire : "il faut titulariser". Non, on veut professionnaliser les agents et cela va passer par de la formation. Nous proposons d'accompagner par des formations, par des modules sur une évaluation qui va amener vers de la qualité de vie au travail. C'est fondamental si on veut conserver une vraie qualité dans le service public.
Vous dites être un syndicat apolitique. Est-ce encore possible aujourd'hui ?
Oui. Lors des dernières échéances municipales et départementales, des membres nationaux du syndicat ont été élus dans des conseils. C'est un choix, mais il n'est pas compatible avec nos statuts, ils ont donc démissionné. Et je voudrais souligner le fait que nous sommes la seule organisation syndicale qui ne perçoit pas de fonds publics.
Propos recueillis par Stéphanie Marin