Publié il y a 7 ans - Mise à jour le 31.03.2017 - veronique-palomar - 5 min  - vu 475 fois

NÎMES, "Nous sommes les 94 !", la culture gardoise mobilisée

Unique et historique, des qualificatifs qui reviennent concernant la création des 94 et leur appel au Département. Photo V.P

Nous sommes les 94 ! Réunis ce matin au Café Olive à Nîmes, ce nouveau collectif rassemble des acteurs culturels de tout le Gard, toutes formes d'arts confondues, de la plus petite à la plus grosse structure. Il a fait part à la presse locale, déplacée elle aussi au grand complet, de ses inquiétudes, des enjeux de la culture et de la stratégie mise en œuvre pour éviter un désastre annoncé. Une réflexion et un travail collectif, qui nous alerte aussi sur l'importance, philosophe et politique bien sûr, mais aussi économique (et c'est nouveau), de l'impact de la culture dans notre département. 

Michel Lafont, directeur artistique du Ratatouille Théâtre d'Uzès prend la parole devant un public composé de journalistes concentrés et d'acteurs culturels gardois inquiets : "Notre rassemblement en collectif est inédit et historique ! L’année dernière nous étions 70 structures à essayer d’alerter l’institution, la presse et le public. Cette année nous sommes les « 94 » ! Notre rassemblement est inédit car il a fédéré autour d’une même crainte et de mêmes revendications des structures de toutes tailles et de toutes les pratiques artistiques et culturelles de ce département. Notre rassemblement est historique car des montagnes cévenoles aux plages de la méditerranée nous n’avions jamais vu cela !"

0,029 % du budget du Département : l'effet papillon

Il y a une vingtaine d'année, le Gard était un des département phare en matière de politique culturelle. Mais depuis dix ans environ, personne n'ignore qu'au prétexte de la crise, comme d'ailleurs dans d'autres domaines, la culture a subit de nombreuses coupes budgétaires. "Petit à petit, nous avons vu s’écrouler le bel édifice", déplore Michel Lafont. Et de développer : "Réduction permanente des effectifs dans le service culture, disparition du « parc de matériel technique » et de ses techniciens, arrêt des aides à la reprographie, fermeture du « Quaternaire », arrêt des saisons itinérantes de musiques actuelles, théâtre et jeune public, qui irrigue l’ensemble du territoire et amène la Culture et le spectacle vivant aux portes de TOUS les Gardois".

Toutefois, le collectif précise être conscient  du contexte national, régional et départemental, de la redistribution des cartes en matière de responsabilités institutionnelles, de la baisse des dotations de l’état, de l’augmentation du coût des compétences obligatoires, ainsi que l’effort que la situation demande à chacun.  Tout en appuyant sur le fait que bon gré, mal gré,  "l’effort, est déjà assumé par le monde de la culture depuis de nombreuses années ! Et encore plus ces dernières". En effet le budget du département pour la culture est passé, selon le collectif : "de 3 400 000 euros en 2014 à 2 300 000 en 2017 ! Tout ceci réduit le budget de la culture à 0,3 % du budget global du département. Quand à la baisse annoncée de 260.000 euros, elle ne représente que 0,029 % du budget du Département ! Baisse qui se rajoute aux 500 000 déjà amputés au Pont du Gard, entre autre.  Silence consterné dans la salle. "Tous ces chiffres ont été confirmés par nos interlocuteurs !" affirme Michel Lafont et de clore le sujet par une conclusion accablante :  "Cette baisse de 0,029 % peut paraître insignifiante mais elle va causer des dégâts considérables, restreignant en conséquence nos équipes et nos actions de service au public."

La culture ça rapporte !

La nouveauté c'est que cette fois, le collectif a décidé de développer une argumentation nouvelle qui tient en une phrase courte : la culture ça rapporte ! Alors que dans l'inconscient collectif  : ça coûte."Ils nous obligent à être malins", confie souriante Flavie Van Volem, directrice adjointe administrative et culturelle de Paloma. Tordre le cou à une telle idée reçue demandait du travail et de vrais arguments.  Les 94 ont planché et Flavie Van Volem nous livre le résultat de leur travail. Le collectif à mené une "Étude de l’activité et des retombées économiques des structures culturelles gardoises. 37 structures ont répondu à l’enquête entre le 14 et le 27 mars 2017."

Bilan de l'enquête

Ces structures ont totalisé 18 500 000 euros de recettes en 2016 (ventes de billets, ventes de spectacles, buvette, locations d’espaces, subventions...).

Elles ont salarié 1 334 personnes en 2016 (195 équivalent temps plein), pour tous types de métiers : artistes, techniciens, mais également comptables, secrétaires, employés de bar, chargés de communication... Ces personnes étaient très majoritairement domiciliées dans le Gard.

Les salaires nets versés à ces salariés et les titres restaurant attribués représentent 4 003 847 euros, majoritairement dépensés dans le Gard (loyers, alimentation et achats du quotidien, impôts locaux...).

Les dépenses directement effectuées par les structures auprès de fournisseurs gardois représentent 2 917 110 euros en 2016 (32 structures).Ces dépenses sont très diverses : locations scéno-techniques et d’instruments de musique, locations de véhicules, achat de petit matériel, de denrées alimentaires, de matériel informatique, de mobilier, de plantes, graphistes et impression des outils de communication, maintenance informatique, petits travaux de menuiserie, gardiennage et sécurité, entretien des locaux...

Et on peut estimer à :

-  7 300 le nombre de nuitées facturées par des hôtels, gîtes, chambres d’hôtes et autres structures d’hébergement gardoises pour les artistes programmés et accueillis en résidence,

-  23 800 le nombre de repas facturés par des restaurants, tables d’hôtes, traiteurs et entreprises de « catering » pour les artistes programmés et accueillis en résidence.

Au total, les 37 structures ont réinvesti directement 6 921 000 euros sur le territoire en achats, locations, paiement d’honoraires, versement de salaires à des habitants du territoire.

Ces 37 structures totalisent pour 2016 : 1 040 500 euros de subventions du Conseil Départemental au titre de sa politique culturelle. On peut donc considérer que, pour 1 euro investi par le Département, les retombées directes et indirectes pour le territoire sont de 9,91 euros (10 316 500 euros au total).

On peut ajouter à ces données économiques que 620 000 personnes ont bénéficié des actions mises en place par ces structures en 2016 (spectateurs, artistes amateurs et professionnels, élèves des établissements scolaires gardois, etc). Ne sont pas comptabilisés dans ce chiffres, les auditeurs de Raje Nîmes (environ 20 000 / jour) et les lecteurs du fanzine Tonitruances (2 500 exemplaires).

Fin de la conférence de presse, la douceur du temps invitent de petits groupes à poursuivre les débats. Photo V.P

Des revendications réalistes et un dialogue ouvert

La situation et l'argumentation étant clairement posée, il ne reste plus qu'à nous pencher sur les revendications et les actions en cours auprès du Département.

Michel Lafont tient à préciser que : "La culture n’est pas pas une compétence obligatoire de ce département mais elle est une compétence essentielle pour ce territoire !" Et de poursuivre, "Une première rencontre a eu lieu ce lundi au département en présence Mr Patrick Malavieille (vice président délégué à la Culture),Mr Vincent Taisseire (conseiller politique culture auprès du Président),  Mr Alain Toureau (directeur du service éducation, jeunesse, culture culture), Mme Martine Guillerm (directrice du service culture, spectacle vivant). Nous avons pu exposer nos analyses et nos attentes. Nous ne pouvons supporter 1 euro de baisse supplémentaire par rapport à 2016.

Nous demandons un plan de relance le plus rapidement possible.

Nous souhaitons être collectivement consultés sur les enjeux d’une nouvelle politique culturelle.

Puisque le blocage est politique, nous demandons à être reçus par le Président en personne. Suite à quoi, après de franches mais constructives discussions sur la situation de ce département, M. Malavieille, nous a proposé de soutenir et d’obtenir un rendez-vous rapidement avec le Président : ce qui est fait ! Nous serons dans son bureau le 18 avril.  

De mettre en place un groupe de travail pour mettre en œuvre une forme de co-construction des politiques culturelles. Ce groupe serait composé d’élu-e-s, de techniciens du Département, d’acteurs culturels. Il aurait pour mission (....) de travailler à une cohérence des politiques de tous à tous les étages.

Quand à l’abandon de la baisse annoncée… nous verrons cela avec le Président."

Affaire à suivre donc …

Véronique Palomar

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